«Macron, c’est moi»

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Mondialisation et souverainisme s'affronteront au second tour






La rupture était annoncée. Elle est maintenant consommée. À l’occasion de cette élection présidentielle, nous assistons à la fin d’une époque. Celle qu’avait ouverte en France l’élection de François Mitterrand, dont le génie politique avait permis d’unir la gauche sous un même parapluie. Un compromis concrétisé en 1971 au congrès d’Épinay par sa stratégie d’union de la gauche.


 

Pendant 45 ans, les socialistes auront donc réussi tant bien que mal à domestiquer cette gauche tumultueuse, ce qui leur offrira les clés du pouvoir en 1981. En annonçant qu’il allait voter pour Emmanuel Macron dès le premier tour de l’élection présidentielle, reniant ainsi sa parole de candidat aux primaires, l’ancien premier ministre de François Hollande, Manuel Valls, est sur le point de faire imploser le parti de François Mitterrand. Confirmant du coup ce qu’il soutenait depuis longtemps : l’existence en son sein de deux gauches « irréconciliables ».


 

Ces deux gauches, que François Hollande aura forcées tant bien que mal à cohabiter une dernière fois, sont aujourd’hui en guerre ouverte. D’un côté, Emmanuel Macron, l’ancien conseiller et ministre de l’Économie de Hollande qui rallie derrière lui l’essentiel des ténors et des électeurs socialistes. Bref, la gauche de gouvernement. De l’autre, les frondeurs du PS qui ont remporté la primaire avec Benoît Hamon et qui rivalisent dans une dernière fuite en avant avec un candidat encore plus à gauche, Jean-Luc Mélenchon. Bref, la gauche de protestation.


 

L’ironie de l’histoire, c’est que c’est l’ancien ministre socialiste de l’Économie, Emmanuel Macron, qui en quittant le gouvernement en août 2016 et en fondant le mouvement En Marche aura concrétisé la stratégie imaginée par Manuel Valls et François Hollande. Dès 2015, ce dernier n’avait-il pas confié aux journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme (Un président ne devrait pas dire ça, Stock) avoir songé à liquider le PS et à le remplacer par un grand « Parti du progrès » qui permettrait « de s’adresser aux électeurs ou aux cadres des autres partis » ? Autrement dit, un Parti démocrate à l’américaine. Même si rien ne s’est déroulé comme prévu, François Hollande passera à l’histoire comme celui qui a conçu cette transformation.


 

« Macron, c’est moi », avait d’ailleurs confié le président un jour où il se sentait des états d’âme à la Flaubert. Il ne croyait pas si bien dire. Presque tous ses proches ont aujourd’hui rallié Emmanuel Macron. Lui-même, d’ailleurs, cache de moins en moins son choix. Depuis quelques semaines, le président a d’ailleurs retrouvé le sourire et le plaisir jubilatoire qu’il ressent chaque fois qu’il croise des journalistes. Comme s’il avait conscience qu’Emmanuel Macron n’était au fond que le chef d’orchestre d’une partition qu’il avait lui-même écrite. À défaut de se représenter, son projet semblerait donc sur le point de triompher.


 

Pourtant, si les clivages entre gauche et droite traditionnelles paraissent brouillés, ils sont loin de l’être en matière de catégories sociales. On voit en effet se dessiner dans cette élection trois camps parfaitement campés. D’abord celui de la mondialisation heureuse, représenté par Emmanuel Macron, qui rallie plus de 40 % de ceux qui disent appartenir aux classes privilégiées, aisées, moyennes ou supérieures. Alors qu’il ne rallie que 17 % des ouvriers, Emmanuel Macron recueille le vote de 42 % des cadres supérieurs. Face à lui, le vote en faveur de Marine Le Pen est aussi typé. On y retrouve 40 % des électeurs qui s’identifient aux classes populaires. La candidate du Front national recrute même 51 % des ouvriers et fait des ravages chez les jeunes qui n’accèdent pas aux études supérieures. Voilà donc les élites de gauche contre le peuple de droite, pour reprendre de vieilles catégories marxistes que les socialistes n’osent plus évoquer. On comprend pourquoi !


 
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