La lettre Marois-Duceppe au président Sarkozy

Les relations France-Québec

Tribune libre

Je vous propose d'examiner les quatre grandes faiblesses de la lettre, en date du 4 février, de Pauline Marois et de Gilles Duceppe au Président Sarkosy.
1- Elle sollicite encore une fois l'appui déclaré de la France pour l'entrée du Québec aux Nations Unies suite à un éventuel référendum gagnant. On sait depuis plusieurs années pourtant que les présidents français sont agacés par cette demande incessante. De plus, il n'y a pas un personnage politique le moindrement futé qui répondrait à une telle question hypothétique sur un évènement si éloigné dans le temps, au plus tôt en 2020 même dans les rêves les plus vaporeux, et qui serait inévitablement contesté par un ou plusieurs pays amis, très certainement par le Canada, par certains de ses amis du Commonwealth et probablement par les États-Unis avec lesquels la France partage d'importants intérêts.
2- Elle compare le Québec au 38 pays qui ont été admis à l'ONU depuis 1980. Il n'y a pas un personnage politique le moindrement futé qui ne comprenne pas que la situation politique, économique et sociale qui prévaut au Canada n'a absolument rien à voir avec les conditions qui ont prévalues avant l'accession de ces 38 pays à leur indépendance politique.
3- Elle soutient que les indépendantistes aiment et respectent le Canada. Même que leurs leaders pensent que le Canada serait un bon pays avec lequel coopérer dans l'avenir. Il n'y a pas un personnage politique le moindrement futé qui s'engagerait à prédire que, suite à un vote pour la séparation, la réaction des canadiens du Québec et d'ailleurs ressemblerait à un grand fleuve tranquille, et que les personnages politiques canadiens s'empresseraient de proposer des formules de coopération aux sécessionistes Québécois. On a déjà vu des gens songer à provoquer un divorce et souhaiter qu'il se réalise par consentement mutuel, mais rarement quand les partenaires se sont "chamaillé" durant plus de 40 ans.
4- Elle reproche au président de la France de ne pas comprendre les indépendantistes Québécois et leurs leaders tout en évitant soigneusement de dire que l'on soit au courant que son pays est engagé depuis 50 ans dans le processus irréversible d'un intégration de plus en plus avancée dans l'Union européenne. Comment espérer qu'un personnage politique le moindrement futé soit préoccupé par les protestations indépendantistes des leaders politiques Québécois qui, à plusieurs reprises, ont exercé sur leur territoire tout une gamme de pouvoirs exclusifs garantis par une constitution, qui ont partagé le pouvoir avec les autre membres de la fédération canadienne et qui se mobilisent dans l'espoir de l'exercer à nouveau, alors que son pays, la France, négocie quotidiennement les meilleurs méthodes pour transférer au pouvoir central qu'exerce l'Union européenne ce qui lui reste de pouvoirs souverains et qui a mis en commun, dans cette politique lucide et volontaire d'intégration, tout une gamme de politiques économiques et sociales, et y a sacrifié sa propre monnaie, son passeport, son permis de conduire, ses mécanismes de contrôle de la mobilité des biens et des personnes, et qui s'apprête à mobiliser ses meilleurs politiciens en vue de l'élection en juin prochain d'un Parlement européen qui accroît régulièrement son poids et ses pouvoirs, sans compter toute l'énergie que déploie la France pour contribuer au fonctionnement harmonieux des institutions de l'Union européenne qui détiennent l'essentiel des attributs, nationaux et internationaux, d'un État souverain.
Allez ensuite comprendre pourquoi on ne se comprend pas.
Georges Paquet

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Membre du service diplomatique canadien de 1967 à 2002, notamment au Nigeria, en France, en Belgique (auprès de l'Union européenne), à Haïti, à Rome (auprès du Saint Siège) et en Côte d'Ivoire





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