Les questions Lisée

04f14157d9fb778c776c2fa1470c8251

«Pas le plus populaire, mais le plus lucide»






Jean-François Lisée est capable de lancer des débats qui dérangent. Lorsqu’il s’en était pris à Pierre Karl Péladeau lors de la course de l’an passé, il avait raté son effet. Il avait attaqué trop personnellement celui que nombre de militants voyaient comme le sauveur. Cela lui avait valu bien des reproches et l’avait même isolé pendant un moment.




Cependant, cette fois-ci, le candidat Lisée a aiguisé ses couteaux et fait mouche sur des sujets cruciaux. Il a d’abord été celui qui a posé les questions crûment concernant le piège pour le PQ de promettre un référendum dans le prochain mandat.




50 000 annuellement ?




Puis il a ajouté une intervention finement ciselée sur le thème de l’immigration. Le texte est en nuance et bien rédigé, mais le message central est clair: la cible de 50 000 immigrants par année est trop élevée pour le Québec.




Personne du monde politique n’avait osé aller plus loin que de s’opposer à la proposition de Philippe Couillard de hausser de seuil de 50 à 60 000. (D’ailleurs le gouvernement a reculé là-dessus sans explication.) Mais Lisée amène le débat sur un autre terrain: le chiffre actuel de 50 000 serait-il déjà au-dessus de la capacité d’accueil de la société québécoise?




Je ne m’explique toujours pas comment une proposition aussi fondamentale n’a pas généré plus de débats entre les candidats qui aspirent à diriger le PQ. Seul Alexandre Cloutier, près d’une semaine plus tard, a fini par réagir. Celui-ci blâme Lisée, qualifie son approche d’irresponsable, mais refuse de se positionner sur la question. Il s’en remet à des consultations à venir avec des «experts».




Pas de fuite




Une fois le débat lancé, il va devenir incontournable. Aucun candidat ne pourra faire l’économie de se prononcer sur sa vision de l’immigration, incluant sur l’enjeu précis du nombre d’immigrants que le Québec veut accueillir annuellement. C’est grotesque de s’en remettre à de futures consultations obscures dans une matière aussi claire. Un aspirant-chef doit partager sa pensée là-dessus.




Jean-François Lisée a le mérite d’avoir mis correctement la discussion sur les rails. Un débat sur l’immigration peut devenir explosif et déraper. On se souviendra qu’il y a quelques semaines, le premier ministre lui-même avait utilisé l’expression «souffler sur les braises de l’intolérance» dès la première question soulevée par François Legault sur une hausse des seuils.




Monsieur Lisée réaffirme des valeurs fondamentales de pluralisme politique, sa volonté de lutter fermement contre toute forme d’intolérance et sa volonté de voir des nouveaux arrivants vivre des réussites humaines en sol québécois. Il veut mandater le vérificateur général pour évaluer la capacité d’accueil et de francisation des institutions québécoises afin de dépolitiser le débat. Tout cela tient la route.




Mais ayant pris toutes ces précautions et posé toutes ces balises, il qualifie d’échec honteux la politique des dernières années basée sur des seuils élevés d’immigration. Une déclaration courageuse.




La campagne au PQ est jeune. Lisée ne part pas dans le fauteuil du plus populaire. Mais il apparaît le plus lucide pour l’instant.



 




Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé