Franc-Parler

Les pieds dans les plats

Donc, entre deux gorgées de vin, le chef de l'ADQ a dit que l'immigration au Québec avait franchi un seuil critique (ce qui est objectivement faux).

Immigration - capacité d'accueil



Imaginez que vous êtes Mario Dumont.
Vous êtes le chef de l'opposition. Vous êtes à la veille de la plus importante rentrée parlementaire de votre carrière. Tous les Québécois vont avoir les yeux rivés sur vous pour savoir si oui ou non vous avez ce qu'il faut pour être premier ministre.
La commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables (l'un de vos thèmes fétiches, qui vous a porté au seuil du pouvoir) va bientôt commencer ses audiences.
Et le PQ, que vous avez envoyé dans les cordes, a repris ses forces. Son nouveau chef, qui a une expérience d'enfer, ressemble à Sylvester Stallone dans Rocky III.
Elle a «The Eye of the Tiger», et ne rêve que d'une chose: vous foutre la plus grosse baffe de votre vie, et vous voir retourner dans votre coin en criant «Maman»...
Allez-vous surveiller ce que vous dites et contrôler votre image?
Ou allez-vous manger du couscous et parler de tout et de rien chez un journaliste de La Presse, en sachant fort bien que seulement une partie de votre sympathique tête-à-tête va se retrouver dans le journal le lendemain?
Vous allez choisir la première option, bien sûr.
Eh bien Mario Dumont, lui, a choisi la seconde.
Bientôt, si ça continue, dans la prochaine édition du Larousse illustré, on va retrouver sa photo sous la rubrique «Amateur».
Je suis cool
Comprenez-moi bien: je ne critique aucunement le travail de mon confrère des Francs-Tireurs. Il a fait son boulot.
Mais je ne comprends pas pourquoi le chef de l'opposition, à une période aussi cruciale de sa carrière, a choisi de se prêter à ce genre d'exercice.
Qu'il rencontre des éditorialistes dans un contexte officiel, accompagné de son attaché de presse, certes. Mais qu'il aille souper chez un chroniqueur afin de discuter à bâtons rompus entre deux bouchées de couscous, dans un climat de franche camaraderie qui multiplie les «tu» et les «toi»? Vraiment, ça me dépasse... C'est quoi, l'idée? Mario Dumont veut avoir l'air cool ?
On s'en fout. Si le chef de l'opposition veut participer à la finale de Star Académie, qu'il m'appelle, je lui donnerai le numéro de téléphone de Julie. Il veut montrer qu'il préfère le couscous au pâté chinois? Wow. Stop the press.
J'espère sincèrement que le plat qu'a mangé Mario Dumont était bon. Car au cours des prochains jours, ses adversaires politiques ne se gêneront pas pour lui resservir les restes de sa semoule...
Avec des amis comme ça...
Donc, entre deux gorgées de vin, le chef de l'ADQ a dit que l'immigration au Québec avait franchi un seuil critique (ce qui est objectivement faux).
Ce qui est désolant, dans cette affirmation malhabile, c'est qu'elle jette un doute sur tous les Québécois qui, avec raison, se posent des questions sur les fameux «accommodements».
À partir d'aujourd'hui, ils vont passer pour des paranos qui perçoivent l'immigration comme une menace.
Merci, monsieur Dumont. Vous venez de donner une jambette à tous ceux qui, depuis des mois, défendent bec et ongles vos positions en disant que non, vous n'êtes pas un disciple de Jean-Marie Le Pen.
La prochaine fois que vous voulez manger un couscous, de grâce, prenez les Pages Jaunes et faites-vous en livrer un.


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