Une première mondiale en Bolivie

Les juges élus par scrutin universel

Les chantres de la démocratie s'y opposent, allez donc savoir pourquoi?

Tribune libre

GRANDE PREMIÈRE MONDIALE EN BOLIVIE

Le 16 octobre prochain, 5.2 millions (5.243.375) de Boliviens et Boliviennes sont appelés aux urnes pour élire les magistrats titulaires et suppléants des Tribunaux constitutionnels (18), de la Cour suprême de justice (14), de l’Agroalimentaire (14) et du Conseil de la Magistrature (10). Il n’y a pas un seul pays au monde où un tel pouvoir est reconnu au peuple et pour lequel tous les moyens sont pris pour qu’il puisse l’exercer. Un pas de plus vers une véritable démocratie, véritable pouvoir du peuple pour le peuple.
L’opération est évidemment complexe et aura exigé la mise en place de divers mécanismes pour que les candidats puissent se faire connaître et valoir auprès des électeurs et électrices. Depuis plus d’une année ces procédures sont en marche. La liste finale des candidats et candidates éligibles, au nombre de 115 a été largement diffusée et sera à la base des choix au scrutin du 16 octobre prochain visant à combler les 56 postes prévus à la constitution pour les grands tribunaux de la Magistrature. Des professionnels de familles autochtones sont sur cette liste et pourront éventuellement occupés pour la première fois de ces hautes fonctions dans la magistrature.
Cette initiative au service de la démocratie, véritable pouvoir du peuple, devrait réjouir tous les démocrates du monde. Toutefois, il ne semble pas que ce soit le cas pour les représentants de la droite politique du pays qui mène actuellement une campagne pour que le plus grand nombre s’abstienne de voter ou encore annule leur vote. Cette campagne se retrouve au cœur de la marche menée par la Confédération des peuples indigènes de l’Orient bolivien. Sous le couvert de la défense de la nature et des valeurs culturelles des nations indigènes, ses dirigeants veulent absolument arriver à la capitale nationale, La Paz, pour y créer des évènements de nature à faire annuler ou rendre inopérante cette convocation aux urnes. Déjà le Gouvernement sait que l’Ambassade des Etats-Unis et certains ONG qui en dépendent financent et appuient ces dirigeants.
UN RAPPEL DE CERTAINS FAITS
Le parc national de TIPNIS couvre un territoire de 1.2 millions d’hectares où vivent 5 500 à 6 000 indiens de diverses nations. Le projet de construction de la route, la partie traversant le parc, correspond à 180 hectares de forêts. Une proportion non négligeable à relever pour bien circonscrire le problème.
Le 15 août dernier une marche a été entreprise par environ 600 indiens (10% de la population du Parc) pour s’opposer à la construction de cette route, constituant une menace pour le milieu ambiant et susceptible d’affecter les modes de vie autochtones.
Le gouvernement, soucieux de rassurer les populations locales et de négocier avec les représentants de la Confédérations, envoie des délégations de haut niveau. Toutefois, à la mi-septembre divers incidents se produisirent et viennent changer la « donne ».
Le tout a commencé lorsque la délégation gouvernementale, dirigé par le ministre des Relations extérieures, a été prise en otage de force pour servir de bouclier humain aux marcheurs devant franchir une barricade policière mise en place pour éviter une confrontation entre les indiens s’affirmant contre la construction de la route et d’autres, également regroupés à peu de distance, proclamant leur accord pour la construction de la route. Heureusement, les otages ont pu être libérés et revenir à la Capitale avec le souvenir d’une bonne frousse.
Mais voilà que le 25 septembre, quelques jours plus tard, la police s’attaque directement aux marcheurs, les réprimant violemment et les repoussant dans des autobus jusqu’à leurs villages d’où ils étaient partis. Les journalistes et les caméras de télévision ont pu témoigner de cette violence qui n’a toutefois pas fait de morts ni de blessés graves, contrairement à ce que certains journaux ont affirmé. Ce comportement des policiers rappelait les jours noirs des régimes antérieurs et ne ressemblait en rien au régime tel que perçu et voulu par le gouvernement d’Évo Morales. Ce fut donc une commotion généralisée dans l’opinion publique et au sein même de l’exécutif gouvernemental qui n’était d’aucune manière à l’origine de cette décision et de cette violence gratuite.
Le Président, surpris par cette initiative des policiers et scandalisé par un tel évènement, a aussitôt ordonné la tenue d’une enquête pour découvrir les auteurs et responsables d’une telle intervention. Il a accepté la démission de deux de ses ministres et démit de ses fonctions le chef de police, alors en fonction sur les lieux. Il a demandé à la commission des droits de la personne des Nations Unies de se joindre à cette enquête tout comme à l’UNASUR et au peuple bolivien d’y participer par ses divers représentants. La lumière doit être faite, a dit le Président, et les coupables doivent être jugés.
Il a aussitôt suspendu tous les travaux de construction du tronçon 2 de la route devant traverser le parc TIPNIS et promis de s’en remettre au peuple quant à la suite à donner à ce projet. Il a invité les médias et les diverses instances sociales à s’impliquer pour débattre du sujet sur la base d’une information objective et à partir de données fiables.
Ces gestes posés par le Président n’ont pas ébranlé la détermination des dirigeants de la Confédération des peuples indigènes de l’Orient de reprendre leur marche, se refusant, cette fois, à tout dialogue avec le Gouvernement, l’objectif étant d’arriver à la Paz le 14 ou 15 septembre, juste avant la tenue du scrutin pour l’élection des juges.
Le président Morales déplore ce comportement et rappelle que sur les 16 points rassemblant les principales revendications des protestataires, certains sont d’ordre technique et peuvent facilement trouver une solution. D’autres, par contre, sont plus complexes et méritent d’être soigneusement analysés et discutés.
Par exemple, ils demandent d’arrêter la construction de l’autoroute et l’exploitation du potentiel hydrocarbure au nord de la Paz, de même que d’empêcher le développement du pôle agroindustriel du nord « paceno ». Deux demandes qui n’ont rien à voir avec le territoire du Parc TIPNIS, pas plus d’ailleurs qu’avec les communautés indiennes et l’environnement. Ces points doivent relever de d’autres instances.
Tout cela fait dire au Président que les véritables motifs de la marche n’est pas ceux de la protection de l’environnement et de la forêts pas plus que ceux des modes de vie autochtones, mais plutôt d’ordre politique visant la déstabilisation du gouvernement et l’empêchement des élections du 16 octobre prochain visant la nomination des juges. (http://www1.abi.bo/# )
Un fait intéressant à relever, celui d'une déclaration du maire de Palos Blancos, Freddy Nazario Escobar qui la réputation de bien connaitre les indiens de la région du Parc TIPNIS, Il affirme que les indiens légitimes, originaires de la région de TIPNIS, qui participent à la marche ne dépassent pas 50 personnes et que les autres, de plusieurs centaines, ne sont pas des résidents du parc, mais plutôt des personnes engagées par la droite politique. ( http://www1.abi.bo/# )
Le 13 octobre prochain, une grande mobilisation est convoquée à la Paz pour marquer le « jour de la libération et de l’identité nationale », qui était célébré autrefois comme le «jour de la découverte de l’Amérique, jour de la race ». Cette convocation est sous la coordination de la Confédérations des Femmes paysannes Indigènes Originaires de Bolivia-Bartolina Sira (CNMCIOB-BS), de la Confédération Syndicale Unique des travailleurs paysans (CSUTCB) et de la Confédération des Communautés Interculturelles de Bolivie. Cette mobilisation qui réunira des milliers de personnes se fera en appui au président Évo Morales et à son gouvernement dans leur combat pour une Bolivie nouvelle.
Il sera intéressant de voir le traitement que nos médias occidentaux et « démocratiques » vont accorder à ces évènements : celui du 13 octobre avec cette mobilisation pour le Jour de la libération et de l’identité nationale, celui du 14 ou du 15 avec l’arrivée des marcheurs à la Paz et finalement celui du 16 octobre, jour du scrutin pour l’élection des juges.
Oscar Fortin
Québec, le 4 octobre 2011
http://humanisme.blogspot.com

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Formation en Science Politique et en théologie. Expérience de travail en relations et coopération internationales ainsi que dans les milieux populaires. Actuellement retraité et sans cesse interpellé par tout ce qui peut rendre nos sociétés plus humaines.





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