Les agriculteurs ne veulent plus céder un pouce, même pour sauver l’ALENA

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Le système de gestion de l'offre ne doit pas être abandonné

Le Canada ne doit pas céder un pouce sur le système de gestion de l’offre à la table de renégociation de l’ALENA, disent les producteurs concernés. Ni en réponse à l’exigence extravagante du gouvernement Trump de son démantèlement, ni dans l’éventualité où les discussions deviendraient plus raisonnables et où on lui demanderait, comme lors des dernières négociations commerciales, d’assouplir encore un peu sa politique agricole.



Les agriculteurs canadiens sous gestion de l’offre et leurs gouvernements sont unanimes face à la nature excessive des demandes américaines dans le cadre de la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), a déclaré vendredi, en conférence de presse à Montréal, le président de l’Union des producteurs agricoles (UPA) et porte-parole du Mouvement pour la gestion de l’offre, Marcel Groleau. « Par rapport à ce que les Américains demandent, nous serions mieux sans l’ALENA qu’avec un [nouveau] traité. »



On en veut notamment à cette exigence du gouvernement de Donald Trump d’un démantèlement pur et simple en dix ans du système de gestion de l’offre qui s’applique au Canada à la production de lait, de volaille et d’oeufs.



Mais, même si le camp américain en venait à modérer sa position et que les négociations prenaient un tour plus normal, les agriculteurs ne seraient pas plus disposés à ce qu’on discute d’éventuels assouplissements au système actuel, ni de l’entrée au Canada de plus d’importations en franchise de droits, comme cela a été le cas dans les dernières ententes commerciales conclues par le Canada avec l’Union européenne ainsi que dans le cadre du Partenariat transpacifique. « On a assez donné, s’est exclamé le président de La Coop fédérée, Ghislain Gervais. Ça suffit que, dans le cadre de négociations, la gestion de l’offre serve de monnaie d’échange. Aujourd’hui, ce qu’on demande, c’est le maintien intégral du système. »



Scénario catastrophe



Tenue à la veille de la sixième ronde de la renégociation de l’ALENA, qui se tiendra du 21 au 29 janvier à Montréal, la conférence de presse de vendredi a servi à dévoiler les conclusions d’une étude commandée à la firme de consultants PricewaterhouseCoopers (PwC) sur les impacts d’un éventuel démantèlement du système de gestion de l’offre canadien pour les producteurs de volaille et d’oeufs. Laissés sans défense face à la concurrence américaine de gigantesques fermes généreusement subventionnées, les producteurs canadiens perdraient de 40 % à 70 % de leur propre marché national dans le poulet, de 80 % à 90 % de celui dans les oeufs et la totalité de celui dans la dinde, dit-on, faisant disparaître de 58 000 à 80 000 emplois au Canada — dont 26 000 au Québec —, principalement situés en région.



Ces estimations s’ajoutent à celles d’une autre étude du Boston Consulting Group, réalisée en 2015 et portant sur le secteur du lait, cette fois, où l’on évaluait les pertes à 40 % du marché et jusqu’à 24 000 emplois directs au Canada, dont la moitié au Québec.



Les baisses de prix pour les consommateurs qui en résulteraient seraient probablement modestes, estime PwC. Pour éviter ce démantèlement de leur agriculture et défendre une certaine souveraineté alimentaire, dit-on, les gouvernements au Canada se verraient rapidement obligés de remplacer le système actuel de quotas de production et des barrières à l’importation par un soutien financier « massif ».



Mais une telle solution est exclue, a affirmé le ministre québécois de l’Agriculture, Laurent Lessard. « Il n’y a pas de plan B. […] Lorsqu’on rencontre le gouvernement canadien, on lui dit : “Il n’y a pas un morceau qui s’enlève, parce que c’est toute la structure qui tomberait.” »



Difficiles discussions



Jusqu’à présent, les parties ne sont pas parvenues à avancer d’un pouce sur les enjeux les plus litigieux de la négociation entreprise à la fin de l’été et d’abord censée se conclure avant la fin de 2017. Accusé de présenter des exigences excessives seulement pour avoir l’excuse de conclure à l’échec de l’exercice, le camp américain demande aussi une forte hausse du contenu américain minimal dans la fabrication des automobiles, l’élimination ou la neutralisation des mécanismes de règlement des différends, un resserrement de l’accès au marché des contrats publics américains et la fin automatique de l’entente au bout de cinq ans, à moins que les trois pays ne conviennent chaque fois de la renouveler.


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