Isabelle Mayault - Provocation ou panache ? Voilà que, quelques deux mois et demi après l'abordage sanglant d'une flottille humanitaire à destination de Gaza en eaux internationales par l'armée israélienne, un autre navire aux motivations similaires se dirige vers l'Etat hébreu. Sauf que cette fois, il bat pavillon libanais.
Le Mariam, nommé ainsi en hommage à la vierge Marie, no less, attend depuis des semaines dans le port de Tripoli le feu vert du gouvernement libanais pour rallier Chypre. Puis, de là, son but ultime : Gaza. La date du départ a été tenue secrète jusqu'au dernier moment, les retards successifs étant dûs aux pressions diplomatiques d'Israël sur le gouvernement libanais via les diplomaties française et espagnole.
En vain. Le week-end dernier, le Mariam a quitté le port de Tripoli. A bord, une cinquantaine de passagers. « Passagères » serait plus exact : il s'agit exclusivement de femmes. Des libanaises, des américaines, des européennes. Des médecins, des journalistes, des nonnes. Et même une femme enceinte, obstinée. « Notre unique but est d'arriver à Gaza », confie l'une des organisatrices à une journaliste du Guardian.
L'escale à Chypre est obligatoire. La libre circulation de navires entre Israël et le Liban n'est toujours pas d'actualité. Bonne foi et idéalisme sont de mise : les participantes réaffirmaient avec conviction avant leur départ que leur démarche était « purement humanitaire » et « apolitique ». Sauf qu'en cas d'accrochage, il sera difficile de prouver que le gouvernement libanais, de fait responsable d'avoir donné son aval pour le départ de la flottille, ignorait sa destination finale.
Côté israélien, l'affaire est prise très au sérieux : Gabriela Shalev, ambassadrice d'Israël aux Nations Unies, a déclaré que l'Etat hébreu « était en droit d'user de "tous les moyens" pour éviter que des militants se rendent par bateau du Liban à Gaza ». Pendant que le ministre de la Défense, Ehud Barak, assurait cet été : "Nous considérerons le gouvernement du Liban responsable de tout navire venant de ses ports et de toute personne qui embarquerait sur ces navires. Il pourrait y avoir des frictions qui conduiraient à la violence, ce qui est totalement inutile et ne pourrait pas être justifié maintenant que la voie vers Gaza est ouverte".
Bien sûr, les intentions de ces humanitaires sont louables. Après l'avortement de tant d'autres flottilles – la lybienne, puis l'iranienne, annoncées à grand bruit, n'ont jamais vu le jour -, après la réaction consternante de la communauté internationale malgré la mort de 9 ressortissants turcs causée par l'armée israélienne le 31 mai dernier, on attendait un peu d'action. Et que Gaza ne retombe pas, avec l'été, dans un oubli profond.
Pourtant, vu la fébrilité des rapports qu'entretiennent depuis quelques semaines le Liban et l'Etat hébreu, on peut aujourd'hui questionner la pertinence d'un tel timing.
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