Le protocole les yeux fermés

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L'obligation de réfléchir prime sur le respect du protocole

Est-il encore permis de réfléchir au Québec? Est-il permis de poser des gestes empreints de logique et d’humanité? Ou sommes-nous en train de devenir des automates qui suivent bêtement des procédures bureaucratiques?
Un motoneigiste américain fait un accident dans le parc des Laurentides, à trois kilomètres de l’Étape. Deux bons samaritains arrivent sur les lieux. L’un s’occupe de l’homme dans un état critique. L’autre va chercher du secours. Les paramédics n’interviennent pas puisque l’homme se trouve sur un sentier en forêt.
L’homme meurt. Les responsables des services ambulanciers sont formels: le protocole a été suivi à la lettre.
Fugues
De nombreuses fugues de jeunes filles sont survenues à Laval cet hiver, la plupart étant laissées en pâture à des gangs de rue.
La situation a atteint une telle gravité que la ministre responsable a mandaté un vérificateur pour faire le tour de la situation. Rapport rendu public hier: le protocole a été respecté. Ah! Pourquoi s’inquiéter alors?
Il fallait voir l’aplomb de la ministre Charlebois dans sa conférence de presse lorsqu’elle a cité le rapport: «Le Centre jeunesse de Laval a bien respecté tous les protocoles existants».
Et vlan! Comme si cette affirmation venait de clouer le bec à tous ceux qui ont critiqué l’approche du Centre jeunesse face au fléau des fugues.
Il y a deux ans, un homme dont la tête avait été heurtée accidentellement par un wagon de métro est mort sur le quai sans que personne vienne à son secours pendant plus d’un quart d’heure. La réponse de la Société de transport de Montréal? Les protocoles de la STM furent respectés. Fort bien.
Un homme meurt sans soins. Des jeunes filles fuguent à répétition. On croirait que le résultat passe au second rang, derrière le respect du protocole. On croirait qu’un intervenant a plus de chance d’être blâmé en discipline s’il sauve une vie en dérogeant du protocole que s’il laisse les choses aller en se réfugiant scrupuleusement derrière les directives!
Réfléchir en 2016 ?
Cette aberration résulte simplement d’une certitude que si vous suivez à la lettre tous les protocoles, votre syndicat vous défendra et votre supérieur vous défendra. Ils auront à la main un petit catéchisme des règles et procédures qui semblera vous donner raison et dans lequel il n’est nulle part fait mention de la responsabilité de réfléchir.
Je me rappelle les propos de l’enseignant à mon premier cours de philosophie au Cégep de Rivière-du-Loup. Questionné sur l’utilité des cours de philo, il avait expliqué que leur présence au collégial constitue un choix de société visant à former des citoyens capables de réfléchir.
En somme, nous formons des citoyens capables de réfléchir, pour ensuite leur interdire de le faire... ils n’ont qu’à suivre le protocole.
Quant aux services ambulanciers, les choses risquent de changer. La victime étant un Américain, le Québec a l’air fou, cela donne mauvaise presse, sans parler des risques de poursuites judiciaires de la famille. C’est malheureusement ça qui fait bouger les choses.


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