Patricia Briel - Une nouvelle version de la banalité du mal est à l’œuvre dans nos sociétés, dit la philosophe et psychanalyste française Julia Kristeva, qui la décèle dans «l’automatisation en cours de l’espèce humaine»
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Une nouvelle version de la banalité du mal est à l’œuvre dans nos sociétés, dit la philosophe et psychanalyste française Julia Kristeva, qui la décèle dans «l’automatisation en cours de l’espèce humaine». De nos jours, elle se loge par exemple dans certains automatismes que génère la soumission à des contraintes auxquelles l’homme ne peut plus échapper, comme la performance au travail, l’urgence ou la compétitivité. On la voit à l’œuvre dans l’injonction «réussis ou crève» qui semble flotter dans l’air du temps. Elle est aussi perceptible dans la difficulté à tenir compte des ressources limitées de la planète.
Elle a pour corollaire une culture de l’éphémère, une perte de la mémoire longue, une hyperactivité effrénée qui nous rend incapables de réfléchir, et une communication souvent vide de contenu. Nous vivons à l’époque de la performance insignifiante, dit le philosophe italien Fabio Merlini dans un livre récent*. La machine tourne à vide. La désorientation est totale. Cette situation engendre des souffrances et des protestations que l’on aurait tort d’ignorer.
Il est peut-être utile de tourner nos regards vers cet enfant né dans une étable au sein d’une famille pauvre. Sa vie et sa mort sur une croix ont été à l’origine d’une nouvelle civilisation qui a engendré, sans toujours parvenir à les respecter, des valeurs altruistes précieuses et pacifiantes. Noël est le symbole du pouvoir de la fragilité. En effet, plus qu’une faiblesse, elle est une force. Car ce n’est qu’en se reconnaissant vulnérable que l’être humain peut créer les conditions de sa survie, et travailler à un monde plus équitable, moins violent et plus respectueux des ressources disponibles.
La fragilité sauvera-t-elle le monde, pour paraphraser Dostoïevski? Ce n’est pas certain, tant il est évident que l’homme a de la peine à tirer des leçons de ses erreurs, comme le montrent les catastrophes nucléaires. A vrai dire, nous n’avons plus d’autre choix que d’écouter notre vulnérabilité.
*L’époque de la performance insignifiante, Editions du Cerf
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Nous nous trouvons, aujourd'hui, face à un incroyable renforcement des moyens mis à notre disposition pour communiquer, travailler, produire, accroître, renforcer et améliorer la gamme de nos prestations. C'est comme si, pour la première fois de notre histoire, se frayait un chemin l'idée selon laquelle il n'y a plus aucun obstacle à la possibilité de disposer de façon inconditionnée non seulement du monde, mais encore de nous-mêmes. Pourtant, dans cette prolifération sans bornes de dispositifs fonctionnels, quelque chose semble paradoxalement ne pas fonctionner comme cela devrait. La « machine » tourne à une vitesse inouïe, mais dans ce tourbillon — que notre quotidien subit comme un destin inévitable — nous peinons à trouver une position capable de donner sens à nos actions. La désorientation est totale. Culture de l'éphémère, hyperactivité effrénée, communication sans contenus sont quelques-uns des phénomènes analysés dans les pages de ce livre, avec pour objectif d'esquisser le profil de l'époque dans laquelle nous vivons, et de nous aider à comprendre « où nous avons fini ». Mais aussi à partir d'où, peut-être, il est possible de recommencer. Ce volume constitue une réflexion désenchantée sur l'idéologie contemporaine et sur ses mécanismes de dissimulation ; chaque page laisse transparaître l'embarras à l'égard d'une culture résignée et opportuniste, incapable d'assumer la responsabilité d'une projectualité de long terme.
Collaboration : Sabine Plaud
_ Dimensions : 195 x 135 x 16 - Poids : 230 grammes
_ ISBN : 978-2-204-09289-0 - SODIS : 8289461 - EAN : 9782204092890
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