Le mépris de la pensée

17. Actualité archives 2007

Libre-Opinion: Paraît dans Le Devoir du 5 octobre un article intitulé: «Des macchabées pour détruire les mythes», dans lequel on nous informe d'une étude en cours qui établit la cause des décès de 49 membres de la dynastie des Médicis et nous rappelle, en passant, que cette puissante famille de marchands fut le mécène des grands artistes de l'époque, dont Michel-Ange et Léonard de Vinci.

Qui ne connaît pas, au moins de nom, ces grands artistes et qui connaît, même de nom, François de Médicis, grand-duc de Toscane, me suis-je demandé.
Et cela m'a fait penser à [Guy A. Lepage->2275] osant se colleter à [Victor-Lévy Beaulieu,->2276] osant même feindre de trouver pathétique que cet immense écrivain ne connaisse pas le sens des mots. Et je me suis consolée de l'injustifiable popularité du premier en pensant qu'il serait oublié avant même d'être mort, alors que le deuxième vivrait dans l'histoire et la culture, bien après sa mort.
Je regarde peu la télévision, précisément pour ne pas encombrer ma vie et ma pensée d'insignifiances. Par conséquent, après trois visionnements, la saison dernière, de Tout le monde en parle, j'ai mis cette émission dans le panier de celles favorables à l'abêtissement et, donc, à éviter. Je n'ai par conséquent pas vu l'émission critiquée par Victor-Lévy Beaulieu. J'ai toutefois lu cette critique et la réplique de Guy A. Lepage, parue dans La Presse du 4 octobre. Et c'est à cette réplique que je viens ici répliquer à mon tour, tant son inintelligence m'offusque, tant sa mesquinerie, nécessairement liée à la sottise, m'offusque, car, contrairement aux Médicis, Guy A. Lepage n'a ni l'envergure, ni la culture, ni la générosité nécessaires à la reconnaissance du génie des créateurs à l'oeuvre dans la société québécoise.
Plaçant l'événement télévisuel au centre de la vie culturelle et lui-même au centre de l'événement télévisuel, il confond allègrement verbiage et pensée, production et création, et, suprême ânerie, cause et effet.

Ainsi, il se moque de Victor-Lévy Beaulieu qui envoie ses ouvrages, en service de presse, aux recherchistes de son émission, comme à tous les attachés et attachées de presse de tous les médias. Ceux-ci étant de nos jours -- en tous cas se devant de l'être dans nos sociétés démocratiques -- les mécènes qui assurent la diffusion des oeuvres, il n'est que normal de faire appel à leurs services, payés, est-il besoin de le souligner, par les deniers publics.
Parle, parle. Jase, jase.
C'est bien connu, il n'est pas indispensable de penser pour parler, mais pour écrire, il faut nécessairement penser. Mais ne pense pas qui veut et quand celui qui ne pense pas se mêle d'écrire, il laisse voir son incurie intellectuelle.
C'est la démonstration qu'a faite Guy A. Lepage dans sa réplique à VLB. En faisant étalage de sa connaissance du Moyen Âge, en des allusions tout droit sorties d'une encyclopédie destinée à faire «tout connaître d'un sujet en 20 lignes et quatre illustrations en couleurs», il a cru ainsi convaincre ses éventuels lecteurs qu'il pouvait discuter de plain-pied avec l'écrivain, qu'il pouvait confondre la frivolité de son rôle dans notre espace culturel avec l'engagement social, politique et culturel de l'auteur d'une oeuvre magistrale. C'est exactement cela en quoi consiste le fascisme : le mépris de la pensée.
Or, quoi de plus absent que le respect de la pensée dans l'article de Guy A. Lepage ? Il s'en vante d'ailleurs. Il s'agit pour lui, avant tout, de se bidonner, dit-il. Ce qui, évidemment, n'a rien à voir avec le plaisir de l'invention ludique qu'une émission intelligente pourrait nous offrir. Ce qui semble n'être pas la marque de commerce de Tout le monde en parle, à en juger par les commentaires des lecteurs.
C'est regrettable et je le regrette.
Andrée Ferretti
_ Écrivaine

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Andrée Ferretti124 articles

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"Rien de plus farouche en moi que le désir du pays perdu, rien de plus déterminé que ma vocation à le reconquérir. "

Andrée Ferretti née Bertrand (Montréal, 1935 - ) est une femme politique et
une écrivaine québécoise. Née à Montréal dans une famille modeste, elle fut
l'une des premières femmes à adhérer au mouvement souverainiste québécois
en 1958.Vice-présidente du Rassemblement pour l'indépendance nationale, elle
représente la tendance la plus radicale du parti, privilégiant l'agitation sociale
au-dessus de la voie électorale. Démissionnaire du parti suite à une crise
interne, elle fonde le Front de libération populaire (FLP) en mars 1968.Pendant
les années 1970, elle publie plusieurs textes en faveur de l'indépendance dans
Le Devoir et Parti pris tout en poursuivant des études philosophiques. En 1979,
la Société Saint-Jean-Baptiste la désigne patriote de l'année.
Avec Gaston Miron, elle a notamment a écrit un recueil de textes sur
l'indépendance. Elle a aussi publié plusieurs romans chez VLB éditeur et la
maison d'édition Typo.





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