Le doc caquiste, lui, est pour le pot: il traite des enfants avec de l’huile de cannabis

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Dissension autour de la légalisation du cannabis à la CAQ

Le médecin vedette de la Coalition avenir Québec est plus ouvert à la légalisation du cannabis que sa propre formation politique : il traite des enfants avec succès grâce à un dérivé de cette substance.


Le Dr Lionel Carmant n’a pas encore annoncé sa candidature aux prochaines élections provinciales d’octobre, même s’il est pressenti comme « ministrable » à la Santé dans un éventuel gouvernement caquiste. Mais ce qu’on sait déjà assurément, c’est qu’il est beaucoup moins frileux que ses collègues caquistes au sujet de la légalisation du cannabis.


« De toute façon, on n’a pas le choix », dit-il, conscient que le projet de loi fédéral semble inévitable et que le Québec devra s’y conformer.


« Je suis pour la légalisation, on est rendu là dans notre société », a-t-il déclaré en entrevue alors qu’il expliquait les effets bénéfiques de l’huile de cannabis administrée à des enfants épileptiques.


Selon lui, l’âge minimal pour en consommer de manière récréative devrait être de 21 ans.


La CAQ avance le même chiffre, mais a adopté une position beaucoup plus hostile par rapport au pot. Son porte-parole en matière de justice, Simon Jolin-Barrette, a d’ailleurs affirmé le 13 septembre dernier que son parti est « opposé à la légalisation du cannabis ».


Il a soutenu que la CAQ souhaitait « ramener le débat sur la lutte contre la consommation de cannabis ».


Mandaté par la CAQ


Le Dr Carmant axe ses recherches sur l’impact de l’épilepsie chez les enfants. Pionnier dans le domaine, il a mis sur pied un protocole pour traiter des jeunes épileptiques avec de l’huile de cannabis.


La CAQ lui a d’ailleurs donné le mandat d’élaborer un plan de dépistage précoce des troubles de développement chez les tout-petits lorsque son chef François Legault l’a présenté fièrement aux médias, le 22 janvier, lors du caucus du parti à Sainte-Adèle.


Sur la question du cannabis, le Dr Carmant a bien l’intention d’aider la CAQ à trouver des solutions.


« Je peux leur expliquer les effets secondaires et les avantages [...] Disons-le, c’est très utilisé, la marijuana, et je pense que pour aller au fond du problème, il faut comprendre pourquoi autant de jeunes l’utilisent, dit-il. Je sais que ce sont souvent des enfants dépressifs et anxieux. »


« Je comprends les gens qui veulent retarder l’âge. Ce qui m’inquiète encore plus, c’est comment [le distributeur de] la marijuana non légale va s’ajuster pour garder sa clientèle », remarque le Dr Carmant.


Pour ou contre


Dans l’échiquier politique québécois, le Parti libéral a également des réticences face à la légalisation promise par le gouvernement Trudeau. La ministre déléguée à la Santé publique, Lucie Charlebois, n’a jamais caché son inquiétude face à la légalisation « d’une substance qui comporte d’importants risques pour la santé ».


Le Parti québécois est quant à lui plus souple. Il adhère à la proposition d’Ottawa de fixer l’âge légal à 18 ans.


Québec solidaire est également pour le projet de loi fédéral. Le député Amir Khadir a aussi demandé le mois dernier au gouvernement Couillard de permettre la culture de plants de cannabis à domicile.


IL FAIT DES MIRACLES AVEC L’HUILE DE CANNABIS


Le docteur Lionel Carmant réussit à soigner de nombreux enfants épileptiques grâce à un traitement à base d’huile de cannabis sans effet euphorisant. Son protocole fête sa première année d’existence ce mois-ci et il compte déjà un « miracle ».


« Le plus jeune traité avait un ou deux mois à son arrivée, souligne le chercheur. La moyenne d’âge de mes patients est cinq ou six ans. »


Pour bénéficier du traitement, les enfants doivent préalablement avoir essayé sans succès cinq médicaments anticonvulsivants. Le traitement d’huile de cannabis est donc leur dernier recours.


Et les résultats sont concluants. « Il y a certains patients qui ne font plus de crises, se réjouit le Dr Carmant. Des enfants arrêtent de convulser, ils ont un meilleur contact et plus d’interaction. »


Kemyth, 17 ans, fait partie du 30 % des jeunes du registre pour qui le traitement fonctionne. Sa mère lui met sur la langue un millilitre d’huile par jour. Fini les crises d’épilepsie à l’école et à la maison.



PHOTO COURTOISIE


Myriam Ambroise

Mère


« Avant, il disait des mots, maintenant il fait des phrases, se réjouit sa mère Myriam Ambroise. C’est un miracle. »


Le produit que consomme Kemyth est une molécule dérivée du pot, appelée cannabidiol. Il n’a pas d’effet euphorisant.


Dispendieux


La famille dépense 202 $ par mois pour se procurer de l’huile de cannabis. À l’aise financièrement, Mme Ambroise est consciente que plusieurs familles ne sont pas dans la même situation qu’elle.


« Je trouve dommage que des enfants n’aient pas accès à ce traitement en raison du coût. Il faudrait que ce soit payé par le gouvernement », s’exclame la mère de deux garçons.


Selon le Dr Carmant, des familles ont dû justement renoncer au traitement en raison des coûts. « On pensait recruter 100 enfants cette année. On en a accueilli une quarantaine » ajoute-t-il.


À long terme, des jeunes avec d’autres problèmes de santé pourraient être traités à l’huile de cannabis.


« [De] 35 à 50 % des enfants qui font de l’épilepsie ont aussi des retards de développement [TDAH, autisme] et on remarque que parfois leur état s’améliore. Est-ce que c’est la diminution des crises ou l’effet de l’huile, c’est difficile à dire pour l’instant », affirme le neurologue qui continue ses recherches.


Si, pour l’instant, l’ajout d’une dose de THC – la substance responsable de l’effet euphorisant du pot – est interdit, le Dr Carmant n’est pas fermé à l’idée.


« On a de la recherche à faire pour mieux comprendre l’efficacité de la marijuana sur l’épilepsie », évoque-t-il.