La politique d'assimilation «canadian» se poursuit

Le déni de l'évidence, ou l'illusion tranquille.

Tribune libre


Très nombreux sont les québécois(es) qui croient toujours qu'ils (elles) vivent dans un beau grand pays, bilingue. Le but de ce texte est d'abord de leur faire voir qu'ils (elles) se trompent lourdement et qu'en réalité les francophones du Canada connaissent un déclin constant depuis 1867.
En 1766 les francophones formaient 99% de la population du Canada. En 1867 ils n'étaient plus que 29% et au dernier recensement selon Statistique Canada ils ne comptaient que 22.1% de la population totale du Canada.
À l'extérieur du Québec, entre 1951 et 2006, la proportion de Canadiens de langue maternelle française est passé de 7.3% en 1951 à seulement 4.1% en 2006. De plus, le pourcentage de la population qui avait le français comme langue d'usage à la maison est passé de 4.3% en 1971 à seulement 2% en 2006. Voici ce pourcentage dans chacune des provinces hors- Québec :
Terre-neuve:0.01%, Île-du-Prince Édouard:2%, Nouvelle-Écosse : 1.9%, Nouveau Brunswick : 29%, Ontario:2.4%, Manitoba:1.8%,Saskatchewan:0.45%, Alberta:0.6%, Colombie-Britannique : 0.4%,Territoires-du Nord-Ouest:1%, Yukon:1.8%, Nunavut:0.7%. (voir statistiques Canada )
Le déclin inexorable du français au Canada est un fait indéniable. Mais comment expliquer ce fait? Disons tout d'abord que dans son fameux rapport, Lord Durham avait dit que l'on se devait d'assimiler les francophones du Canada et qu'agir ainsi serait bon pour eux car ils étaient inférieurs. Les neuf provinces hors Québec et les territoires fédéraux ont au cours des années passé beaucoup de lois dans le seul but de faire disparaître la langue française. Ils ont mis en application le rapport Durham.
Toutes ces lois anti-françaises ont fortement contribué au déclin du français. Tous les parties politiques y ont contribué : les libéraux, les conservateurs, le NPD et le gouvernement fédéral. Soit dit en passant le gouvernement fédéral n'a jamais remis en question aucune de ces lois et la population anglophone de toutes ces provinces n'a jamais élevé la voix pour les dénoncer.
En plus de toutes ces lois un autre facteur a contribué encore d'avantage au déclin du français. Voici comment , règle générale, ça se passe dans les provinces hors Québec. Tout le monde du travail, tout l'espace publique commercial fonctionnent en anglais seulement. Les anglophones ne se disent jamais qu'étant donné que le Canada est fondé sur la coexistence des deux peuples fondateurs , ils se doivent de s'assurer du respect de ces deux peuples, autant oralement que dans l'affichage. Pas du tout. Dans les faits, règle générale, les commerçants anglophones imposent leur langue à tous.
Dès qu'un francophone sort de chez lui, soit pour aller travailler , soit pour magasiner, il doit laisser sa langue à la maison et parler l'anglais. S'il est très courageux et très déterminé, bien que tout l'affichage soit en anglais seulement, il osera peut-être exiger d'être servi en français. Dans ce cas, le plus souvent, on lui répondra avec un sourire la phrase passe- partout. « Sorry , but I don't speak French. » Dans la réalité de tous les jours sa langue maternelle est confinée à la sphère du privé. Les francophones hors Québec ont à peu près le même statut que celui d'un immigrant nouvellement arrivé.
Quand on affirme que le Canada est un pays bilingue, on oublie de dire qu'il s'agit d'un bilinguisme purement administratif qui ne change strictement rien dans la vie de tous les jours. D'ailleurs, même le droit des écoles françaises, récemment concédé par peur que le Québec ne choisisse l'indépendance, n'y change rien. En effet, à quoi sert de faire tes études en français si tu sais d'avance que tu devras travailler en anglais. Une langue et sa culture ne peuvent aucunement s'épanouir dans un environnement désertique.
La langue française est en voie d'extinction tout simplement parce qu'elle ne sert à rien. Dans l'espace publique elle n'est ni reconnue ni respectée sauf dans les rares enclaves francophones où ceux-ci peuvent se soutenir les uns les autres parce qu'ils sont encore assez nombreux. Mais même là ils se doivent tous d'être bilingues.
Voyons maintenant ce qui se passe au Québec. Ici aussi la langue française est en déclin. Charles Castonguay , un professeur retraité de mathématiques et de statistiques de l'université d'Ottawa a récemment écrit un livre sur le sujet intitulé « LE FRANÇAIS DÉGRINGOLE. »
Dans cette ouvrage il nous montre que le Québec est la seule province de tout le Canada où la majorité est en chute libre. Entre 1951 et 1971 le poids des francophones du Québec est passé de 82.5%à 80.7% soit une perte de presque 2% en vingt ans. Entre 2001 et 2006 le poids des francophones est passé de 81% à 79.1% soit une perte d'un autre 2% mais cette fois en l'espace de seulement cinq années. L'année 2006 est l'année du dernier recensement au Canada. Qu'en est-il en 2012? Et pendant ce temps les anglophones du Québec n'ont subi aucun recul. M. Castonguay nous dit que c'est du jamais vu dans l'histoire des recensements depuis 1871, l'année du début des recensements.
Pourquoi en est-il ainsi? Parce que le Québec est la seule province où la majorité se comporte en minorité. Je m'explique : Au Québec les citoyens se divisent eux-mêmes en trois groupes,francophones, anglophones et allophones. On entend parfois les expressions «  francophones du Québec ou franco-québécois ». Ailleurs tu n'entendras jamais les ontariens employer l'expression «  anglo-ontarien » ou les albertains parler « d'anglo-albertains »  . Pourquoi? Parce que pour eux il est clair que l'Ontario ou l'Alberta sont des provinces anglaises.
Le Québec est aussi la seule province qui applique le bilinguisme partout dans l'espace publique. Je ne parle pas ici du bilinguisme officiel ou administratif; je parle de ce qui ce passe dans la vie de tous les jours. Cette façon d'agir est partout présente au Québec mais elle l'est surtout dans la grande région de Montréal et en Outaouais. Or ces deux régions ensemble comptent pour 55% de la population du Québec.
En conséquence, au Québec on n'impose pas sa langue sur son propre territoire. Et si on ne l'impose pas chez soi, on ne l'impose nulle part,et si on ne l'impose nulle part on s'en va nulle part.
Au Québec on affirme haut et fort que le français est la langue officielle, la langue commune mais... du même souffle on nous affirme que la langue française doit être prédominante ou avoir la primauté. Or, prédominance ou primauté signifie qu'au Québec il y a deux langues officielles mais que l'une d'elles est sensée avoir plus d'importance que l'autre.
Pourquoi en est-il ainsi au Québec et seulement au Québec? Parce qu'au Québec il y a environ 8% d'anglophones et comme ils font partie d'un des deux peuples fondateurs ils ont le droit absolu de ne jamais s'intégrer à la majorité francophone. En conséquence ils ont le droit d'être partout servis dans leur langue. Et comme il est impossible , en pratique, de savoir si le client que tu sers est anglophone, allophone ou francophone, pour ne pas offusquer un anglophone tu te dois de répondre en anglais à tout client qui s'adresse à toi en anglais.
Le résultat c'est que la majorité francophone se doit d'être bilingue pour travailler chez soi. La majorité se met au service de la minorité. En anglais il y a une expression pour qualifier ce genre de situation anormale. Normalement en anglais on dit : « The dog wags its tail», ce qui en français se traduit par : « Le chien branle sa queue ». Mais pour exprimer qu'une situation est anormale on dit : »The tail wags the dog ». Ce qui se traduit par : »La queue branle le chien ».
Alors une question se pose : pourquoi le Québec est-il la seule province à se comporter de cette façon anormale? La réponse c'est que les québécois (es) sont colonisés. Lorsque n'importe quelle nation se fait déposséder par la violence il en résulte un traumatisme terrible. Au lendemain de la défaite la vie continue mais le nouveau maître impose sa langue. Alors pour survivre, par instinct de survie on se doit d'ajouter la langue du conquérant à la sienne. Et lorsque cette situation dure très longtemps comme au Québec, elle imprègne le subconscient collectif à une profondeur telle que même longtemps après qu'il ne soit plus nécessaire que les choses soient ainsi, on continue encore.
Ainsi au Québec le français ne tient pas tout seul. On sent toujours le besoin de mettre de l'anglais partout. Bien sûr on l'écrit plus petit , mais cela n'y change strictement rien. Si cette situation perdure trop longtemps elle nous mènera à la ruine. En psychologie il y a un principe de base qui dit que l'on ne peut changer ce que l'on ne reconnaît pas. S'il y a des politiciens qui aiment vraiment leur nation ils doivent travailler à décoloniser le Québec. Il faut que les québécois (ses) apprennent à dire : « Je regrette mais je ne parle pas l'anglais »et ce même s'ils le parlent très bien. Ce ne sera pas un mensonge mais tout simplement une façon aimable de rappeler qu'ici au Québec c'est en français que ça se passe.
Je comprend que pour beaucoup de gens agir ainsi peut paraître un manque d'amabilité dans les rapports humains, mais l'amour commence d'abord par l'amour de soi et des siens. Je ne dis pas qu'il faut devenir bête et méchant. Je dis simplement qu'il faut s'aimer soi-même, se respecter soi-même assez pour prendre la place qui est légitimement la nôtre. Les québécois(se) doivent de toute urgence apprendre à imposer leur langue officielle sur leur territoire. Cela n'a rien de choquant ni d'arbitraire mais au contraire cela est la façon la plus normale de se comporter. Toutes les nations se comportent ainsi et les autres canadiens aussi. Si les québécois (se) veulent survivre et s'épanouir comme nation ils doivent apprendre à se comporter comme les autres canadiens.
Le Québec est une nation qui a le statut politique d'une province; alors comment se surprendre que:
1- Le Québec est la seule province où il y a des régions entières où l'on ne peut que très difficilement se faire servir dans la langue dite officielle.
2- Le Québec est la seule province où les gens croient au mythe des deux peuples fondateurs.
3- Le Québec est la seule province où les citoyens n'imposent pas leur langue officielle sur leur territoire.
4- Le Québec est la seule province où l'on accepte le mythe qu'il faut être bilingue pour travailler chez soi.
5- Le Québec est la seule province où l'on accepte que certains commerçants refusent de parler le français, la langue officielle et majoritaire.
6- Le Québec est la seule province où plusieurs de nos hommes et femmes d'affaires embauchent des personnes unilingues anglaises pour travailler dans leur commerce.
7- Le Québec est la seule province où la minorité mène la majorité. (la queue branle le chien)
8- Finalement et en conséquence de tout cela , le Québec est la seule province où la majorité au lieu d'augmenter comme dans toutes les autres provinces, fond comme neige au soleil.
Les autres canadiens ne sont jamais obligés d'être bilingues pour gagner leur vie sauf dans certains emplois administratifs et quelquefois en politique fédérale. Personne ne veut ni ne peut les forcer à être bilingues pour gagner leur vie. Ils (elles) ne l'accepteraient jamais. Le Québec est la province la plus bilingue dans tout le Canada et le Québec meurt parce que les québécois (ses) acceptent l'obligation du bilinguisme pour travailler.
Le bilinguisme a sa place au Québec . Il est très utile pour son épanouissement personnel et aussi dans les échelons supérieurs des grandes entreprises pour faire le lien avec l'étranger. Mais il n'a de place légitime nulle part ailleurs. Si nous ne parvenons pas à nous décoloniser nous disparaîtrons.
Selon Bryan Lee Cowley , président de L'Attlantic Institute For Market Studies, d'ici 2031 , le Québec ne représentera plus que le cinquième de la population canadienne tandis qu'à Ottawa les députés québécois ne seront que 75 sur 378 députés fédéraux. Dans son ouvrage intitulé «  Fearfull Symmetry », Cowley démontre que le Québec ne pourra plus alors faire valoir aucune revendication. Le temps nous est donc compté. Il y a péril en la demeure. Ce péril n'est pas un mythe il est très très réel. Nous devons de toute urgence nous réveiller car demain il sera trop tard . Nous devons nous libérer du système canadien , système qui nous condamne à l'assimilation. Il ne nous reste qu'un sursis de 15 ans tout au plus d'une vingtaine d'années.
Pendant longtemps les québécois (ses) ont cru pouvoir choisir entre deux voies valables, soit le fédéralisme ou l'indépendance. Tous les indices nous montrent très clairement que désormais le choix n'est plus entre le fédéralisme et l'indépendance. Il est entre l'indépendance et l'assimilation totale, entre la vie et la mort , entre être ou ne pas être.


P.S. Pour éclairer les électeurs : La nation québécoise est comme un navire qui prend l'eau et qui prend l'eau de plus en plus. Que sa propre nation vive ou meure ne semble pas préoccuper du tout Jean Charest et ses libéraux. On le sait bien, pour eux c'est l'économie. François Legault et la CAQ , quant à eux disent : Laissons le navire prendre l'eau pour encore dix ou quinze ans et après on VERRA...
J'invite tous les électeurs à lire un petit livre bleu intitulé : Le génocide culturel des francophones au Canada; publié par les éditions du québécois.


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    28 octobre 2013

    Commentaire très juste. La non-violence est la seule bonne façon d'arriver à nos fins. Merci

  • Archives de Vigile Répondre

    27 octobre 2013

    Si l'un d'entre vous à l'âme d'un Gandhi, tout est encore possible !

  • Archives de Vigile Répondre

    15 octobre 2013

    Félicitations! C'est un texte à diffuser amplement. Souhaitons qu'il soit lu et qu'on sache en tenir compte.

  • Archives de Vigile Répondre

    15 octobre 2013

    Bonjour M. Audet, j'apprécie beaucoup votre texte qui nous éclaire sur notre situation. C'est dommage que nous n'avons plus les statistiques nécessaires du Canada, depuis Harper.
    On devrait trouver un moyen de savoir. C'est tellement important.
    Merci pour ce long texte très éclairant.