Rappelons-nous qu’au printemps dernier, tous se demandaient si Jean Charest déclencherait des élections, mais le carré rouge étudiant et le printemps des casseroles ont retardé sa décision. Comme l’automne approchait et par le fait même les travaux de la Commission Charbonneau, il lui fallait créer une fenêtre lui permettant d’aller en élection avant l’automne avec une possibilité de se faire réélire pour un quatrième mandat.
L’adoption de la loi 78 allait lui donner cette opportunité. Selon les sondages, plus des deux tiers de la population appuyait ou était favorable avec les visées de la loi 78. Jean Charest sachant très bien que la venue de la CAQ sur l’échiquier politique affaiblirait encore plus le vote souverainiste déjà divisé, il était donc confiant que ses membres et sympathisants libéraux ne le déserteraient pas pour ce parti de droite. Une fenêtre se précisait alors… Une question se pose par contre à ce moment-ci : Monsieur Charest aurait-il pris la même décision s’il avait su que monsieur Duchesneau serait un candidat de la CAQ? Monsieur Duchesneau représente celui par qui la Commission Charbonneau est arrivée donc pouvant nuire à la stratégie d’abord élaborée et surtout à la crédibilité de Jean Charest. Il faut aussi se rappeler que monsieur Duchesneau jouissait d’un haut taux de notoriété (plus de 80%) dans l’opinion publique. D’ailleurs je soupçonne que les points de sondages à la hausse de la CAQ au début de la campagne le furent que par l’arrivée de monsieur Duchesneau. Les stratèges du Parti Libéral en sont probablement arrivés au même constat.
L’élection devait se jouer sur le conflit étudiant et le PLQ comptait sur les perturbations à la rentrée scolaire pour imposer à la population de trancher par son vote au règlement du conflit. Cela n’a pas fonctionné. Il s’est alors rabattu sur son Plan Nord et ses 250,000 emplois. Mais comme le hypothétique Plan Nord manquait de crédibilité aux yeux de plusieurs, les derniers jours de la campagne électorale portait essentiellement sur la tenue possible et pourtant non prévu avant quelques années d’un référendum sur la souveraineté du Québec.
Le PLQ étant toujours très populaire auprès des 65 ans et plus et comme une très grande majorité de ceux-ci lui sont fidèles, il suffisait de dire à cet électorat que le feu est pris dans la cabane pour les soulever et les faire voter en très grand nombre. Le terrorisme de la peur est toujours fort efficace auprès de cette clientèle. De plus, le PLQ pouvait compter sur des bureaux de votation dans les résidences de personnes âgées pour lesquelles il n’avait plus à recourir à un système d’autobus pour sortir le vote. Ce créneau d’électeurs étant de plus en plus nombreux (voir les statistiques démographiques), cela permet au PLQ d’augmenter constamment son pourcentage de sympathisants.
Le vote anglophone et allophone lui assure une base sur laquelle il peut toujours compter.
Je pense que malgré un taux d’insatisfaction de 70% contre lui, si le conflit étudiant avait perduré, Jean Charest aurait encore dirigé le gouvernement probablement lui aussi minoritaire. La trêve étudiante durant la campagne électorale lui aura fait perdre le pouvoir. La stratégie libérale a presque fonctionné.
Roger Kemp, Trois-Rivières, 11-09-2012