"la souveraineté ou l’économie"

Charest a fait sa dernière campagne en scandant "la souveraineté ou la santé". On peut dire qu’il a ajouté cette fois : "la souveraineté ou l’économie"

Chronique d'André Savard

Le développement du nord, comme on sait, n'est pas une idée propre à Jean Charest. Ce qui a changé c'est le lutrin du premier ministre et les entours tout en écrans de style IMAX qui font entrer la conférence de presse dans le monde de la haute définition.
Charest a lâché à cette occasion une phrase significative quand il a déclaré que le Québec était propriétaire de cette région nordique. Qu'est-ce à dire? Les Québécois ont besoin de confirmer une propriété collective qui a désormais besoin d'être prouvée.
Charest s'exprime comme s'il dirigeait un mouvement nationaliste de revendication territoriale. C'est dans son plan de mise en image. Ces conseillers utilisent pour ce faire des projets connus qui sont dans les cartons des hauts fonctionnaires depuis des années.
En filigranes se profile le concept exploité par le Fédéral sur le Québec divisible et le sol natif des "pure-laine" cernable et délimitable. Charest dit qu'il veut franchir une ligne, ouvrir l'espace.
Bien sûr Charest ne donnera pas de détails sur la question. Charest répond toujours qu'il s'occupe des problèmes les plus importants, l'économie et la santé.
Instruite sur l'enjeu, la population apprend qu'elle va voter pour les problèmes les plus importants. Charest refait sa bonne stratégie qui consiste à inviter la population à se prononcer pour qu'existe enfin une échelle des priorités.
À chaque jour, tout en vantant les réalisations de son gouvernement, il explique que la catastrophe dont il a hérité ne lui a pas permis de résoudre les problèmes prioritaires. Avant lui, le Québec a été gouverné par des idéologues indépendantistes qui ne pensaient qu'à la souveraineté.
Charest a fait sa dernière campagne en scandant "la souveraineté ou la santé". On peut dire qu'il a ajouté cette fois: "la souveraineté ou l'économie".
Charest, politicien qui connaît peu l'économie et entouré d'une équipe que personne n'oserait qualifier de "du tonnerre" a quand même tiré son épingle du jeu. En évoquant la souveraineté comme la coupure, frontière qui sépare le peuple de l'économie et de la santé, il a fait une merveilleuse carrière.
Idéalement, il verrait probablement cette carrière se poursuivre comme premier ministre canadien. C'est étonnant de voir comment des carrières se bâtissent sur un seul leitmotiv. On résumerait la pensée de George Bush par quelques mots: Qui contrôle le pétrole contrôle le monde. Et la pensée motrice de toutes les campagnes électorales de Charest se résumerait ainsi: la souveraineté est une ligne qui exclut toutes les vraies priorités.
Il ne fait qu'utiliser une forme imagée. Et la population en vient à penser qu'elle doit élire un activiste des "premières priorités". Un bon premier ministre aura les coudées franches pour discuter à treize au sujet des normes provinciales et des normes fédérales.
Quand un premier ministre aussi fédéraliste que Jean Charest clame qu'il veut être seul au volant, on peut dire que la thèse rencontre allègrement l'antithèse.
André Savard


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