La planète de Michael Ignatieff

La nation québécoise vue par les fédéralistes québécois


Naïveté ou assurance tranquille ? Tout semble tellement évident dans le monde politique de Michael Ignatieff qu'on se demande s'il vit sur une autre planète, ou s'il a vraiment une vision articulée de la route à suivre.
M. Ignatieff était de passage à Québec hier, sa cinquième visite depuis le mois d'avril. Bob Rae, n'y est venu que trois fois. Malgré tout, le "personnage" Ignatieff demeure peu connu. Qui donc est cet intellectuel que les libéraux décrivent comme un nouveau Trudeau ?
D'emblée, la ressemblance avec l'ancien premier ministre est étonnante. Il a le geste, le débit lent et monocorde, l'érudition, Mais surtout, il a le sens de la formule, catégorique et lapidaire.
L'Afghanistan ? "Le centre mondial du terrorisme". Les talibans ? "On ne négocie pas avec les gens qui tuent nos soldats". La pendaison pour Saddam Hussein ? "Qu'il crève en prison". Le Canada et l'environnement ? "Nous sommes responsables du système de climatisation de la planète". Le Québec, une nation ? "Je suis en politique pour reconnaître des faits, et c'est un fait. La province de Québec, c'est le foyer d'un grand peuple".
L'intérêt de Michael Ignatieff pour la région de Québec ressemble beaucoup à celui que nous porte Stephen Harper.
C'est ici que M. Harper a remporté la dizaine de circonscriptions qui lui ont permis de former un gouvernement minoritaire en janvier. Et c'est ici que le vent a tourné pour le chef conservateur, à la suite de sa promesse de régler le déséquilibre fiscal, devant la Chambre de commerce. Depuis ces événements, "What does Quebec want ?" ne s'applique plus à la province, mais à sa capitale. Comment séduire cet électorat capricieux ?
Après la promesse sur le déséquilibre fiscal de M. Harper, dont on attend toujours la suite, c'est le concept de nation qui sert maintenant d'appât. Sans en réclamer la paternité, les organisateurs de M. Ignatieff constatent que son appui à la reconnaissance du Québec comme nation lui permet de faire des gains ici. L'enjeu est maintenant de consolider ces gains, sans que la controverse ne lui coûte des appuis ailleurs au pays. Comment plaire au Québec sans déplaire au reste du pays ? Tous les politiciens fédéraux, à l'exception du Bloc québécois, ont dû composer avec cette problématique à un moment ou l'autre de leur carrière. Plusieurs y sont parvenus, mais la recette a toujours été de courte durée. Stephen Harper semble l'avoir perdue, momentanément. Les libéraux pensent l'avoir trouvée. Si c'est M. Ignatieff qui dirige le PLC contre Stephen Harper aux prochaines élections, l'électorat québécois pourrait devoir choisir entre le coeur et la raison. Entre sa reconnaissance comme nation, ou une proposition de règlement du déséquilibre fiscal. La bourse ou la vie ?
C'est le 1er décembre que les libéraux éliront leur nouveau chef. Michael Ignatieff aurait une légère avance à Québec. Environ 34 % des délégués, contre 30 % pour Bob Rae et 29 % pour Stéphane Dion.
À moins d'un mois du congrès de leadership, le moment est venu de faire sortir le vote. Or dans une région comme Québec, il n'en coûte pas très cher d'envoyer des délégués à Montréal, par opposition aux circonscriptions éloignées comme l'Abitibi, la Côte-Nord ou la Gaspésie. Si les appuis de M. Ignatieff à Québec sont aussi solides que le prétendent ses organisateurs, il lui sera facile de s'assurer de la présence au congrès de tous les délégués de la grande région de la capitale. Dans une course serrée, nous pourrions, encore une fois, faire la différence.
Sans compter les frais de transport, d'hébergement et de restauration, il en coûtera 995 $ aux délégués adultes et 495 $ aux jeunes pour participer au congrès de leadership à Montréal. Les organisations des candidats n'ont pas le droit d'assumer les dépenses des délégués. Les associations de comté peuvent toutefois recueillir des fonds à cet effet. Chaque circonscription a droit à 16 délégués. La différence entre la victoire et la défaite dépendra donc beaucoup de l'organisation.
Naïf ou sûr de lui, ce monsieur Ignatieff ? On verra bientôt s'il a su bâtir une équipe solide et efficace. Ce sera le présage d'un grand politicien, ou d'une étoile filante.


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