Récession en Europe

La pagaille

L’Europe est rythmée par un mouvement migratoire unique dans son histoire récente, et donc socialement violent

C’est officiel. La zone euro est en récession. Elle a sombré dans la mer de l’adversité économique en présentant un revers qui la distingue des crises antérieures : le taux de chômage est d’ores et déjà très élevé. Il frôle en effet les 12 %. Soit un niveau ayant convaincu des milliers et des milliers d’ingénieurs et de travailleurs qualifiés de quitter les nations du Sud pour celles du Nord. Bref, l’Europe est rythmée par un mouvement migratoire unique dans son histoire récente et donc socialement violent.
Pour la deuxième fois depuis 2009, la zone euro est confrontée à la peste économique qui, cette fois-ci, a hissé à 18,5 millions l’inventaire de chômeurs, dont pas moins de 2,2 millions cette année seulement. Comme chacun le sait, ils sont beaucoup plus nombreux dans les pays dits du Club Med - Portugal, Espagne, Italie et Grèce - que dans les pays du Nord. Ce que l’on sait moins, passablement moins, c’est que, dans la foulée du chapelet de plans d’austérité conçus à l’aune du chien qui essaye de se mordre la queue, la durée des prestations ainsi que les montants accordés aux sans-travail ont été raccourcis.
Depuis l’éclatement de la crise de la dette en Grèce d’abord, au Portugal, en Espagne et en Italie ensuite, la forte inclination d’Angela Merkel pour l’austérité et seulement elle a fait la une des journaux avec une régularité métronomique. Résultat ? En Grèce, par exemple, la contraction du PIB au cours des trois dernières années a dépassé les 17 % ! Ce faisant, le poids de la dette que les commandes de Berlin devaient réduire a augmenté. Bref, la batterie de chiffres publiés ces jours-ci par des organismes européens, dont Eurostat, sont autant de preuves que le calque de la déesse austérité sur le profil économique des pays du Sud s’est avéré un échec total.
Ce dossier a ceci de vicié que le fiasco découlant des diktats exigés en grande partie par Berlin profite énormément à… l’Allemagne. Oui, trois fois oui. Les entreprises situées à l’est du Rhin font le plein d’une main-d’oeuvre bien diplômée, bien entraînée. Tenez-vous bien, pour le premier semestre de l’année en cours, et seulement lui, 182 000 Espagnols, Grecs et Portugais ont pris la direction de l’Allemagne, soit une hausse de 35 % par rapport à la période correspondante l’an dernier. Dit autrement, les Espagnols et les Portugais ont été deux fois plus nombreux qu’en 2011. Les Grecs ? 78 %. Il y a peu, le New York Times a consacré un long reportage à l’émergence d’un quartier grec à Munich. C’est dire.
Ce dossier a ceci de troublant que les entreprises et organisations allemandes n’ont aucune… comment dire ? Ni timidité, ni gêne, ni retenue. En effet, les uns et les autres n’ont pas hésité à organiser des foires pour débaucher, et notamment les ingénieurs. Des mandarins de la santé allemande sont allés jusqu’à se déplacer à Athènes pour faire le plein de médecins. Bref, après avoir taillé des croupières, en partie il est vrai mais en bonne partie, à l’activité économique par l’intermédiaire des surplus commerciaux, voilà qu’en Allemagne on est en train, consciemment ou non, de régler le défi du vieillissement de la population.
Cela étant, il faut bien constater que le rabotage de la sphère politique au profit de son pendant économique, au cours des vingt dernières années, a eu un effet quelque peu délétère : aucun élu, aucun dirigeant politique n’ose dire tout haut ce que tout le monde sait tout bas. À savoir que le commandement allemand des trois dernières années a eu des échos ayant rendu la vie de millions et de millions de gens quelque peu pénible.
Il serait temps, grandement temps, qu’à la lumière des analyses d’Eurostat quelqu’un signifie à Berlin que ses excès économiques ont eu une conséquence totalement contraire à celle brandie, à celle prétendue. Trop, c’est trop !


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