(Québec) Le mythe américain de la nouvelle frontière s'incarne désormais dans Internet, un lieu d'émancipation où la créativité peut s'exprimer sans limites. D'un simple clic de souris, tous peuvent y avoir accès.
S'inspirant de la contre-culture américaine des années 60, nombreux sont les internautes qui veulent faire du cyberespace un monde de liberté et d'autonomie fondé sur l'échange et la créativité.
Dans ce lieu d'émancipation, certains sont plus émancipés que d'autres. Par exemple les hackers. Pour ces bidouilleurs de génie, l'informatique n'est pas un simple outil mais un moyen permettant de révolutionner le monde afin de le rendre meilleur.
Extrait du manifeste du hacker publié par le magazine en ligne Phrack : «Nous explorons et vous nous appelez des criminels. Nous recherchons la connaissance et vous nous appelez des criminels. Nous existons sans couleur de peau, sans nationalité, sans dogme religieux et vous nous appelez des criminels. Vous construisez des bombes atomiques, vous financez des guerres, vous tuez, vous trichez, vous nous mentez et c'est encore nous les criminels. Oui, je suis un criminel. Mon crime est celui de la curiosité.»
Parlant de curiosité, je vous invite à lire Anonymous, un ouvrage de 208 pages publié par FYP Éditions. Il a été écrit par Frédéric Bardeau et Nicolas Danet, deux analystes français de la cyberculture et de l'hacktivisme.
En couverture, le fameux masque de Guy Fawkes tel qu'on le voyait dans V pour Vendetta, le film réalisé par James McTeigue en 2006.
Selon Wikipedia, ce fleuron de la cyberculture, Guy Fawkes était l'architecte de la Conspiration des poudres qui voulait assassiner le roi Jacques 1er et les membres du Parlement britannique en faisant exploser le palais de Westminster le 5 novembre 1605.
Depuis, l'échec de Guy Fawkes est célébré en Angleterre chaque 5 novembre.
Les Anonymous, ça peut être n'importe qui : vous, moi, votre voisin, votre meilleur ami, votre chef de service, le gars qui vous sert au restaurant et qui, mine de rien, écoute les conversations.
S'aventurer à dresser le portrait d'un Anonymous est impossible. Le nombre de ceux qui se revendiquent Anonymous est incalculable. Probablement plusieurs centaines de milliers de personnes.
Les sbires de l'Oncle Sam ont essayé d'établir le portrait psychologique des Anonymous. Résultat, la moitié de l'humanité pourrait être suspectée!
Anonymous, en fait, c'est une idée.
Derrière Anonymous, ce sont des internautes qui se mobilisent un peu partout sur la planète. Selon Frédéric Bardeau et Nicolas Danet, la plateforme idéologique d'Anonymous se résume aux libertés fondamentales. Sans oublier la maîtrise d'une cyberculture populaire de plus en plus répandue.
Les Anonymous ont commencé à faire parler d'eux en janvier 2008 après avoir mis en ligne une vidéo destinée à la propagande interne de l'Église de scientologie. Il s'agissait d'une interview de Tom Cruise dans laquelle il vantait les mérites de la scientologie.
Les Anonymous et l'Église de scientologie se sont alors livrés à tout un bras de fer sur le cyberespace.
Le point culminant de ce bras de fer fut la diffusion d'un tract vidéo dont la voix synthétisée deviendra la marque de reconnaissance des Anonymous : «Nous sommes Anonymous. Vous ne pouvez pas vous cacher, nous sommes partout. Le savoir est libre. Nous sommes Anonymous. Nous sommes Légion. Nous ne pardonnons pas. Nous n'oublions pas. Redoutez-nous.»
Les Anonymous sont-ils des pirates informatiques ou des altermondialistes numériques?
C'est la question à laquelle s'efforce de répondre Anonymous. Un livre rédigé par deux types qui, dans leur domaine, sont des pointures : l'un est un spécialiste en intelligence économique diplômé de Science Po et de Saint-Cyr, l'autre est un analyste de la réputation en ligne diplômé du Centre d'études littéraires et scientifiques appliquées de la Sorbonne.
Dans ce livre qu'il faut lire pour mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons, il est beaucoup question de Julian Assange.
Cet Australien est un génie de l'informatique et il fut l'une des figures du hacking dans les années 80. Étudiant, il s'était fait connaître sous le nom de Mendax et faisait partie d'un groupe de hackers appelé The International Subversives.
Dans la culture du cyberespace, il était un White Hat. C'est-à-dire un bon gars. Il ne cherchait pas à détruire le système, mais à le comprendre.
Sa prétention, c'était qu'il fallait partager l'information. C'est ainsi qu'est né WikiLeaks.
WikiLeaks signera son premier grand coup en 2007 en publiant un rapport secret accusant de corruption l'ancien président du Kenya, Daniel Arap Moi.
L'information sera reprise par The Guardian et contribuera à faire perdre les élections au candidat soutenu par Daniel Arap Moi.
Ce coup d'essai vaudra à WikiLeaks la reconnaissance d'Amnesty International et son entrée dans le jeu médiatique.
La suite, vous la connaissez : WikiLeaks diffusera une vidéo en provenance d'Irak et montrant l'attaque d'un hélicoptère Apache contre des personnes au sol. Parmi les victimes, deux journalistes de l'agence Reuters. Puis WikiLeaks récidivera avec la publication de télégrammes diplomatiques confidentiels qui mettront les États-Unis dans l'embarras.
On peut dire que WikiLeaks et Anonymous ont redéfini les règles du jeu en matière d'information. C'est ça, la nouvelle frontière.
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