La méthode Charest

PLQ — la descente aux enfers

20 octobre 2012 Par définition, la lune de miel est un concept qui s’applique difficilement aux gouvernements minoritaires. Les lendemains de leur élection se caractérisent rarement par une grande popularité, même si les choses peuvent s’améliorer par la suite. À peine deux mois après avoir été réélu de justesse avec 33 % du vote le 26 mars 2007, le PLQ, doublé par l’ADQ et le PQ, avait déjà perdu cinq points et près des deux tiers des Québécois se disaient insatisfaits du gouvernement de Jean Charest. Même chez les libéraux, on conjecturait déjà sur sa succession. Ragaillardi par l’arrivée de Pauline Marois, le « nouveau PQ » semblait renaître de ses cendres. Mario Dumont, qui se voyait déjà premier ministre, menaçait de renverser le gouvernement à la première occasion. Personne n’aurait parié que cinq autres années de pouvoir attendaient le PLQ. Selon le dernier sondage Léger Marketing-QMI, le taux d’insatisfaction à l’endroit du gouvernement Marois est de 56 %, mais les intentions de vote en faveur du PQ se maintiennent à 32 %, soit exactement le même niveau qu’aux dernières élections. On n’a pas apprécié la façon dont le dossier de la taxe santé a été géré, mais 61 % des personnes interrogées ont dit approuver le « compromis » proposé par Nicolas Marceau. En mai 2007, 71 % auraient préféré renoncer à une baisse d’impôt de 950 millions pour les investir plutôt dans la santé et l’éducation. En comparaison, la situation actuelle du PQ n’a donc rien de désastreux. Même avec Philippe Couillard à sa tête, le PLQ progresserait d’à peine deux points par rapport au 4 septembre. C’est sans doute mieux que d’en perdre, comme ce serait le cas avec ses deux principaux rivaux, mais cela demeure très modeste, compte tenu des débuts chaotiques du gouvernement Marois. *** Il va de soi que la nouvelle première ministre devra discipliner son Conseil des ministres, qui a pris des allures de basse-cour. Nettement plus expérimenté, le cabinet Charest de 2007 ne s’était pas abandonné à une telle cacophonie. C’est cependant en montrant patte blanche que M. Charest avait réussi le rarissime exploit de retrouver une majorité parlementaire après l’avoir perdue. Après avoir multiplié les irritants lors de son premier mandat, il les avait systématiquement éliminés durant le deuxième. On avait même découvert un « nouveau Charest », plus détendu, qui savait écouter la population. Sa première initiative significative avait été l’annulation de la vente du mont Orford, prélude à un spectaculaire virage vert. Les parents souhaitaient un retour au bulletin chiffré ? Pas de problème. Du jour au lendemain, l’apôtre de la réingénierie de l’État s’était métamorphosé en défenseur du modèle québécois. Le rapport commandé à Claude Castonguay a été vivement tabletté pour permettre au gouvernement Charest de se faire le champion d’un système de santé à une seule vitesse. Il se permettait même des incursions sur le terrain identitaire. Le moment était venu pour le Québec de se doter d’une constitution, disait Benoit Pelletier. Le premier ministre lui-même promettait de redonner au français sa prééminence dans l’espace public. En six mois, le PLQ avait repris la première place dans les sondages. *** Il ne sert à rien aux ministres péquistes de réfléchir tout haut à ce qu’ils feraient s’ils faisaient partie d’un gouvernement majoritaire, qu’il s’agisse du financement des écoles privées ou encore de l’extension de la loi 101 aux garderies. Pourquoi payer inutilement un prix politique pour des batailles impossibles à gagner ? Vaut-il vraiment la peine de faire un baroud d’honneur sur la question du cégep ? Pour le moment, l’objectif devrait plutôt être de faire en sorte de s’assurer une majorité qui permettra éventuellement d’y revenir dans des conditions gagnantes. Bien entendu, cela exige un minimum de discipline, non seulement au Conseil des ministres, mais également au PQ. Il est sans doute enrageant pour un militant souverainiste de voir Pauline Marois roucouler aux côtés d’un Stephen Harper triomphant au Sommet de la Francophonie, mais s’époumoner à réclamer de nouveaux pouvoirs sans avoir le moindre rapport de force ne pourrait qu’amener la population à conclure qu’on veut simplement la chicane. Prendre exemple sur Jean Charest pourra en gêner certains, mais pragmatisme et compromission ne sont pas nécessairement synonymes, même si l’expérience des dernières années autorise cette confusion. Tout cela suppose évidemment qu’on fasse minimalement confiance à Mme Marois. Il serait dommage qu’elle se sente obligée de prendre des initiatives malheureuses simplement pour démontrer la vigueur de sa foi souverainiste.



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