La Hongrie veut stopper Bruxelles et Soros

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Pouvoir politique c. pouvoir de l'argent

Ces derniers jours, tous les Hongrois ont commencé à recevoir dans leur boîte aux lettres des questionnaires officiels intitulés "Stoppons Bruxelles" où les autorités demandent aux citoyens "quelle attitude adopter envers la politique de l'UE, qui menace selon elles l'indépendance du pays", rapporte Radio Pologne.
Ce sondage, qui s'inscrit dans le cadre de la campagne publique "Consultations populaires 2017", contient six questions concernant la politique migratoire et économique de Bruxelles — notamment les quotas de l'UE pour l'accueil de réfugiés du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord dans les pays européens, les impôts et le travail des organisations non gouvernementales.
Le début de la campagne a coïncidé avec les manifestations organisées dimanche dernier à Budapest, pendant lesquelles plusieurs milliers de personnes ont défilé dans le centre de la capitale hongroise pour soutenir l'Université d'Europe centrale appartenant à la fondation de George Soros. Cet établissement scolaire pourrait fermer ses portes si le parlement adoptait les nouveaux amendements prévus à la loi sur l'éducation.
Les migrants ne sont pas les bienvenus
Radio Pologne rappelle que la Hongrie avait déjà organisé un tel sondage en 2015 quand les autorités souhaitaient connaître l'avis des citoyens sur la vague migratoire et le danger du terrorisme après la publication, par Bruxelles, d'un plan de répartition de 120 000 réfugiés du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord entre les pays de l'UE. L'Onu avait critiqué ce sondage et mis en garde contre la montée de la xénophobie dans le pays.
Puis, en octobre 2016, la Hongrie avait procédé à un référendum où il était proposé aux citoyens de répondre "oui" ou "non" à la question de savoir s'ils étaient prêts à autoriser l'UE à prendre une décision sur le déplacement d'étrangers en Hongrie sans l'accord de l'Assemblée nationale (parlement). Le référendum avait échoué car moins de 50% des électeurs étaient venus aux urnes. Dans le même temps, sur les 40% de votants plus de 98% avaient répondu "non". Le premier ministre hongrois Viktor Orban avait alors qualifié ce résultat de "révélateur" et déclaré que les politiciens européens devaient en tenir compte au lieu d'"imposer leur volonté à la Hongrie".
Aujourd'hui, le pays compte parmi les principaux opposants à la politique migratoire de Bruxelles initiée par l'Allemagne et la France. Avec d'autres États d'Europe de l'Est — la République tchèque, la Slovaquie et la Pologne — la Hongrie fait partie du groupe de Visegrad qui s'oppose aux quotas migratoires. Ces pays ont ensuite été rejoints par la Roumanie ainsi que, de facto, par l'Autriche. Ils ont fermé leurs frontières extérieures pour bloquer la vague de réfugiés. En particulier, la Hongrie continue de renforcer ses frontières avec la Serbie et la Croatie.
Le premier ministre Viktor Orban est connu pour sa critique intransigeante de la politique de Bruxelles. Selon lui, les migrants sont une "armée hostile" qui menace la stabilité de l'État hongrois où les attentats ne se produisent pas justement parce que les autorités mènent une politique migratoire ferme en expulsant 99% des "visiteurs indésirables" du pays.
Après l'échec du référendum en octobre dernier, le gouvernement d'Orban a tenté d'adopter des amendements à la Constitution du pays afin d'interdire les quotas migratoires pour la répartition de migrants sur le territoire hongrois mais le projet de loi a été bloqué au parlement. Seulement deux voix ont manqué à la coalition au pouvoir.
En organisant cette nouvelle campagne de sondage auprès des citoyens, Viktor Orban et son parti conservateur Fidesz-Union civique hongroise espèrent s'assurer le soutien de l'opinion publique dans leur lutte contre les initiatives migratoires de l'Europe occidentale.
Fermer Open Society
Le questionnaire "Stoppons Bruxelles" demande également aux Hongrois s'ils approuvent l'activité d'ONG étrangères qui s'ingèrent dans la politique intérieure de la Hongrie — mais quasiment tout le monde comprend qu'il est avant tout question d'ONG financées par la fondation Open Society du milliardaire américain George Soros, d'origine hongroise.
A la fin des années 1980 le parti Fidesz, à l'époque dans l'opposition, recevait un soutien de la fondation Soros et Viktor Orban bénéficiait personnellement d'une bourse d'Open Society. Cependant, au cours de ses sept dernières années au pouvoir, le chef du gouvernement hongrois a radicalement changé son attitude envers l'activité du milliardaire qu'il qualifie aujourd'hui de "menace pour l'indépendance de la Hongrie, au même titre que la politique de l'UE".
La Hongrie abrite actuellement plus de 60 ONG financées par Soros, que les forces de l'ordre accusent pour la plupart d'aider les migrants clandestins à pénétrer en Hongrie et à y obtenir le statut de réfugié. En janvier, les autorités hongroises ont annoncé leur intention d'expulser du pays toutes les ONG chapeautées par George Soros.
Dans son allocution annuelle du 10 février, le premier ministre Orban a déclaré que Soros et l'UE avaient "attaqué" la Hongrie avec l'intention de "l'inonder de migrants". De plus, les structures financées par la fondation Open Society, selon lui, "cherchent secrètement à influencer la politique du pays". Durant ce même discours, Viktor Orban a annoncé que la Hongrie était prête à accueillir les habitants d'Europe occidentale fuyant la "pression des migrants".
L'une des meilleures universités d'Europe centrale et de l'Est, l'Université d'Europe centrale de Budapest, risque également de fermer. Fondée par George Soros il y a 26 ans, elle pourrait aujourd'hui être victime de la confrontation entre le premier ministre hongrois et le milliardaire américain.
Pour des "notions de sécurité nationale", le gouvernement hongrois a suggéré d'adopter plusieurs amendements à la loi sur l'éducation: il est question de durcir les exigences envers les universités ayant une accréditation au-delà de l'UE. En particulier, si ce projet de loi était adopté, un établissement scolaire doté d'une double accréditation devrait recevoir une autorisation internationale signée au niveau intergouvernemental pour exercer une activité pédagogique en Hongrie.
Cela concerne justement l'Université d'Europe centrale accréditée en Hongrie et aux États-Unis, dont les diplômés reçoivent un double-diplôme — hongrois et américain. A l'heure actuelle, elle accueille 1 800 étudiants de 117 pays et aucun accord intergouvernemental entre ces deux pays n'est nécessaire.
L'Assemblée nationale de la Hongrie devait étudier le projet de loi soumis par le cabinet d'Orban lundi 3 avril. La veille, une manifestation s'est déroulée en soutien à l'université, soutenue par l'ambassade des USA en Hongrie, le département d'État américain et l'Académie des sciences de Hongrie. 15 lauréats du prix Nobel et plus de 100 chercheurs américains ont écrit au gouvernement hongrois pour lui demander de retirer le projet de loi.


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