La fin de la mondialisation, ou pas

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Le monde prend soudainement conscience que la démondialisation est engagée

Le commerce mondial traverse une mauvaise passe, contrairement au discours protectionniste. De là à conclure que la mondialisation recule, ce serait aller trop vite en affaires.

La nouvelle n’avait rien de réjouissant dans un pays où le commerce international occupe une place aussi importante dans l’économie. Au lieu d’augmenter de 7 % comme on le pensait, les exportations canadiennes ne croîtront vraisemblablement que de 2 % cette année, a prédit Exportation et développement Canada cette semaine. Ce résultat décevant, a expliqué EDC, sera le résultat de hausses des ventes de voitures, d’avions et autre bois d’oeuvre trop modestes pour compenser la chute de la valeur des exportations de ressources naturelles, dont le pétrole.

Le Canada n’est pas le seul à avoir mal à son commerce international, a noté le lendemain le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz. Habitué pendant vingt ans à croître deux fois plus vite que l’économie de la planète, le commerce mondial s’est effondré de 12 % avec la Grande Récession et remonte depuis avec plus de difficulté encore que l’économie mondiale pourtant poussive.

La moitié de cette baisse marquée de régime est attribuable à des facteurs cycliques comme la faiblesse de la reprise et de l’investissement dans les pays développés, de même que le ralentissement de la croissance en Chine, a expliqué le gouverneur. Mais l’autre moitié vient de facteurs plus structuraux et donc plus permanents.

La libéralisation effrénée des échanges durant les années 1990 et 2000 a lancé une vague d’intégration des chaînes mondiales de productions largement complétée aujourd’hui, dit-il. Et puis, « la Chine ne peut intégrer l’OMC qu’une seule fois ». Il faut peut-être admettre que la période de fièvre qui a précédé la crise était « l’exception et non la règle ».

D’autres voix observent que de plus en plus de grandes entreprises tendent à reconcentrer leurs activités dans leurs plus gros marchés, estimant avoir plus à gagner du raccourcissement de leurs chaînes de production et des synergies que de la seule recherche du plus bas prix.

Le Brexit, Trump, Sanders et les autres

Le monde des affaires n’est pas le seul à remettre en cause la mondialisation joyeuse d’avant la crise. Rarement a-t-on vu autant de politiciens faire campagne avec succès contre elle. Les dernières élections au Parlement européen en ont amené tout un contingent à Strasbourg, de droite comme de gauche. Le Royaume-Uni est tout occupé aujourd’hui à sa campagne sur une possible sortie de l’Union européenne. Principal moteur de l’intégration économique mondiale depuis au moins 70 ans, les États-Unis sont aux prises avec deux courses à l’investiture présidentielle dont les candidats s’opposent tous — de Trump à Sanders, en passant par Clinton et Cruz — aux derniers traités de libre-échange signés par le pays.

Quoi qu’on en dise, le poids du commerce dans l’économie mondiale est tout près aujourd’hui de son sommet historique, soit à plus de deux fois ce qu’il était encore dans les années 1970, observaient récemment les économistes Giovanni Federico et Antonio Tena-Junguito.

Quant au fait qu’on ne puisse pas refaire le coup de l’entrée de la Chine dans le commerce mondial, on pourrait rétorquer qu’il reste encore largement à faire de la place à plusieurs pays d’Asie et d’Amérique latine, mais surtout à l’Afrique.

Une autre sorte de mondialisation

Une récente étude du McKinsey Global Institute attirait l’attention sur le développement rapide d’une mondialisation numérique. Alors que les échanges de biens plafonnent et que les investissements dégringolent entre les pays depuis 2007, les échanges transfrontaliers de données se sont multipliés par 45. Presque inexistants au tournant du millénaire, ces échanges de données auraient compté pour plus du tiers de la croissance économique apportée par l’ensemble des échanges de biens, de services, d’investissements, de personnes et de données entre 2005 et 2014, soit 2800 milliards $US sur un total de 7800.

Quant aux électeurs de plus en plus nombreux qui remettent en cause les bienfaits de l’ouverture des échanges économiques entre les pays, ce ne sont pas tous des ignorants ou des racistes, écrivait le mois dernier, dans le Financial Times, l’ancien secrétaire américain au Trésor, Larry Summers. Ils appartiennent souvent à ces groupes de travailleurs qui ont fait les frais des transformations économiques induites par le commerce, les nouvelles technologies et la libéralisation et dont on ne s’est pas assez soucié jusqu’à présent.

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