Quel spectacle ahurissant ! Bien assis sur la liberté d’expression que lui reconnaît la Constitution américaine, un vieux fou délirant d’intolérance religieuse de Floride, à la tête d’une congrégation qui compte à peine cinquante membres, menace de mettre le monde à feu et à sang, littéralement, en maintenant son intention de brûler dimanche, date anniversaire de la destruction des tours du World Trade Center, en protestation contre l’établissement d’une mosquée à quelques pas de Ground Zero.
La menace pour les intérêts américains dans le monde est tellement grande qu’il a reçu hier un appel du secrétaire à la défense des États-Unis le priant de renoncer à son projet. Et si cet appel n’a pas été fait par le président lui-même, c’est que le secrétaire à la défense est blanc et conservateur, comme le pasteur floridien, tandis que le président Obama est noir et libéral. Ce n'était vraiment pas le moment d'aller jeter de l'huile sur le feu.
Voilà où mène la dictature des droits. À la tyrannie d’un vieux fou qui prend le monde entier en otage pour assouvir son besoin de jouer à l'ange exterminateur.

Les Américains étaient loin de s’attendre à un tel « cadeau » d’anniversaire pour le 11 septembre. À lui seul, cet homme, un des leurs, est en train de jeter à terre tout l’édifice moral sur lequel leur système repose. Car il est intolérable de laisser entre les mains d’un seul homme un tel pouvoir. Car le besoin d’un contrepoids s’impose à l’évidence même. Comme il s’impose pour contrôler les armes à feu. Comme il s’impose pour corriger à peu près tous les ravages attribuables à l’exercice débridé des droits et libertés, que ce soit en matière d’environnement, d’économie et de finances, ou de morale personnelle qui finit par avoir une incidence sur la société dans son ensemble.
Dans le système de valeurs hérité de notre civilisation judéo-chrétienne elle-même héritière de la tradition gréco-romaine, ce contrepoids existe. Il s’appelle la responsabilité individuelle (Voir « Plaidoyer pour la responsabilité individuelle » http://www.vigile.net/Plaidoyer-pour-la-responsabilite ). Aucun droit n’est absolu, tous les droits sont assujettis au bien commun. C’est, au sens propre, et noble, la démocratie.
Dans un article mis en ligne par Vigile hier (http://www.vigile.net/Loi-103-demission-du-politique-et ), le professeur José Woehrling mettait les Québécois en garde contre le danger de la fétichisation des droits dans le contexte du débat sur la langue au Québec, et de l'intention avouée du gouvernement Charest de se plier à la tyrannie des chartes et de l'interprétation qu'en font les tribunaux. Il était loin de se douter que l’actualité internationale lui réserverait la surprise d’un exemple qui frappe autant l’imaginaire collectif que celui de ce pasteur de Floride.
Pourtant, c’est exactement la même chose, et la ministre St-Pierre, nettement dépassée par les exigences intellectuelles de ce débat et prise à défendre l'indéfendable sans même en être consciente, serait surprise, voire même insultée, de découvrir que ses positions la jettent dans le même sac que le vieux fou de Floride. « Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu es. »
On dit des proverbes qu’ils sont la sagesse des nations...