La décanadianisation du Québec s’accélère

Donc l’identité québécoise est majoritaire dans la totalité de l’opinion québécoise (et pas seulement francophone) depuis maintenant six ans.

Indépendance - le peuple québécois s'approche toujours davantage du but!

Vous avez déjà vu le Courant-Jet ? Vu de vos yeux vu ? Non? Normal. Vous ne voyez que la pluie et le beau temps.

Le Courant-Jet, dont vous parlent les météorologues, est une des variables structurelles du temps qu’il fait.

Il y a un Courant-Jet de la souveraineté du Québec. Un mouvement sous-jacent qui en détermine, de loin, l’évolution. On ne le voit pas dans les évolutions conjoncturelles de l’intention de vote souverainiste. Il travaille en profondeur. Dans l’évolution de l’identité québécoise.

En bref, plus les Québécois se définissent comme “Québécois” plutôt que “Canadiens”, plus ils seront nombreux à appuyer la souveraineté lors d’un référendum. En 1980, moins de 40% des Québécois se disaient “Québécois d’abord” — ils furent 40% à voter Oui. En 1995, on comptait 50% de “Québécois d’abord”. Résultat référendaire: 50%

Or ce mouvement, dont je vous ai déjà parlé ici, s’accélère. Selon des données publiées dans la Gazette le… 28 décembre! — et passées complètement inaperçues dans les médias francophones, l’identité québécoise a atteint, en novembre 2010, un niveau historique de 60% !

Le sondage Léger mise-en-marché (ma traduction) réalisé pour le compte de Jack Jedwab de l’Association des études canadiennes atteste de cette montée et confirme une tendance visible depuis plus de dix ans.

Voici un tableau composé des sondages CROP sur une question quasi-identique de 1998 à avril 2009 et des sondages Léger/Jedwab de janvier 2009, septembre et décembre 2010:


En rouge: les répondants qui se disent seulement Canadiens ou Canadiens d’abord.
_ En jaune, ceux qui se disent également Canadiens et Québécois.
_ En bleu: ceux qui se disent seulement Québécois ou Québécois d’abord.

Ce tableau appelle plusieurs remarques.

D’abord, il indique que la barre des 50% a été franchie en 2004, à la fois dans la série CROP et la série Léger. Donc l’identité québécoise est majoritaire dans la totalité de l’opinion québécoise (et pas seulement francophone) depuis maintenant six ans.

Ensuite, il reste 20% de répondants qui disent avoir les deux identités également. Or la question “égal” n’apparaitra pas dans un référendum sur la souveraineté. Il est donc certain qu’une proportion non-nulle de ces 20% se reportera, lors d’un choix forcé, du côté de l’identité québécoise.

Évidemment, si on se concentre sur les seuls francophones, le tableau est encore plus frappant:


1% Canadiens seulement
_ 7% Canadiens d’abord
_ 20% Également Canadiens et Québécois
_ 40% Québécois d’abord
_ 31% Québécois seulement

“La réalité, a dit Jedwab à la Gazette, est que 31 % des Québécois francophones se considèrent comme Québécois seulement. Pour moi, il s’agit d’une minorité signifiante qui éprouve un très fort sentiment de détachement envers le Canada.”

La situation est également plus nette lorsqu’on décompose par groupe d’âge. Alors, commente Jedwab, “ce qui m’inquiète est que la totalité des groupes de moins de 65 ans se sentent très détachés du Canada”. Jack est, comme chacun le sait, un fédéraliste convaincu. Il a de bonnes raisons d’être inquiet. (Et je le remercie d’avoir partagé ses données avec moi.)

Demain: [les jeunes québécois et l’identité québécoise->34377]

Squared

Jean-François Lisée296 articles

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Ministre des relations internationales, de la francophonie et du commerce extérieur.

Il fut pendant 5 ans conseiller des premiers ministres québécois Jacques Parizeau et Lucien Bouchard et un des architectes de la stratégie référendaire qui mena le Québec à moins de 1% de la souveraineté en 1995. Il a écrit plusieurs livres sur la politique québécoise, dont Le Tricheur, sur Robert Bourassa et Dans l’œil de l’aigle, sur la politique américaine face au mouvement indépendantiste, qui lui valut la plus haute distinction littéraire canadienne. En 2000, il publiait Sortie de secours – comment échapper au déclin du Québec qui provoqua un important débat sur la situation et l’avenir politique du Québec. Pendant près de 20 ans il fut journaliste, correspondant à Paris et à Washington pour des médias québécois et français.





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