L'immigration plus que jamais favorable au fait français (version longue)

Tribune libre

Voici la version plus longue du texte réduit que j'avais publié il y a quelque temps. Pour éviter tout malentendu, je précise que je suis, comme vous, un fervent défenseur de la langue française au Québec et que je suis depuis fort longtemps toute l'actualité sur ce sujet. Maintenant, nous pouvons avoir des points de vue divergents et des analyses différentes, mais il faut savoir tout de même, parfois, regarder certains données en face et ne pas nier certaines réalités sous peine de risquer de faire prendre à nos politiques de mauvaises décisions /
L’immigration semble devenir de plus en plus matière à polémique au Québec, considérée par certains comme une menace à l’identité francophone de la province. L’analyse des données sur l’immigration récente, au cours de la décennie 2000-2010, démontre pourtant bien le contraire.
Mais avant d’entrer dans le détail, il convient de rappeler que l’importance de mener une politique d’immigration ambitieuse s’explique par l’effondrement du taux de fécondité québécois et par un déficit chronique en immigration par rapport aux autres provinces, tous deux ayant entrainé un véritable décrochage québécois au sein de la confédération canadienne.
Depuis 1971, le taux de fécondité est inférieur au seuil de renouvellement des générations (2,1 enfants par femme) et se situe aujourd’hui à environ 1,71. La société québécoise ne se renouvelle donc pas et doit sa stagnation actuelle au seul fait de l’allongement de l’espérance de vie, qui rend possible la cohabitation de 4 générations au lieu de 3 auparavant. Effet provisoire, prélude à une diminution effective de la population, à l’instar de l’Allemagne qui perd chaque année près de 200 000 habitants, hors immigration, ou encore de l’Italie qui suit le même chemin depuis 20091.
Si le taux de fécondité très bas reste toutefois comparable à celui des autres provinces anglophones, l’immigration s’est quant à elle située à un niveau globalement deux fois inférieur à celui des provinces dynamiques de l’Ouest ou de l’Ontario. Dans cette dernière, il s’est toujours située à un niveau annuel à peu près égal à 1% de la population (entre 110 et 140 mille arrivants) contre par exemple 0,4% au Québec en l’an 2000, au début de cette décennie qui a connu une profonde évolution de la nature de l’immigration vers le Québec.
Taux de fécondité effondré combiné à une immigration très faible ont conduit à une baisse du poids du Québec qui est passé de 29% en 1951 à seulement 23,4% début 2011. Ce déclin est encore plus frappant par rapport à l’Ontario, province historiquement « rivale », dont la population est aujourd’hui 66% supérieure à celle du Québec contre +13% seulement en 1951. Il va sans dire que cette évolution n’est pas sans conséquences sur le poids politique du Québec au sein de la confédération.
Pour répondre à une pénurie croissante de main d’œuvre, et probablement suite à la prise de conscience du décrochage québécois, il a donc été décidé d’augmenter l’immigration internationale qui est ainsi passée de 32 000 nouveaux arrivants en 2000 à 54 000 en 2010, en hausse de 66%. Ceci a permis au Québec de croître enfin à un rythme comparable au reste du canada (le ROC) avec une croissance démographique de 0, 96% en 2010 contre 1,1 au niveau fédéral, mettent ainsi pour la première fois de son histoire un terme à son déclin au sein du Canada.
Pourtant, et bien que se situant à un niveau encore inférieur à celui en vigueur dans certaines provinces du ROC, qui impliquerait, par exemple, que le Québec doive recevoir 71 000 immigrants par an afin d’être proportionnellement au même niveau que l’Ontario (118 milles immigrants en 2010 pour une population de 13,2 millions d’habitants), cette augmentation non moins significative et rapide de l’immigration reste cependant un sujet polémique.
Les statistiques sur l’immigration récente au Québec sur la période 2000-2010, sont pourtant sans appel et indiquent clairement une hausse très importante, en nombre et en pourcentage, de l’immigration en provenance des pays francophones, des immigrants connaissant la langue française et de l’immigration non francophone disposant de facilités d’intégration à la majorité francophone.
Ainsi, bien que le nombre d’arrivants soit en forte hausse, le pourcentage des personnes ayant une connaissance du français est passé sur la même période de 40% à 65%. Il n’a donc ni stagné, ni baissé mais très fortement augmenté.
Pour ce faire, cela a nécessité une très forte hausse de l’immigration en provenance de nombreux pays francophones: + 154% pour le Maroc, + Sénégal : +554%, + Liban : + 121%... Suite à une augmentation de 151% en moyenne, bien supérieure à celle du niveau global de l’immigration, l’Afrique représente en 2010 36,8% de l’immigration totale contre seulement 24,3% dix an plus tôt, et la part des pays composant « le noyau dur francophone » (Afrique hors Egypte, Haïti, pays européens ayant le français comme langue officielle, Liban, Roumanie et Moldavie) représente désormais 51% du total des nouveaux arrivants, niveau jamais atteint auparavant.
D’autre part, les ressortissants d’Amérique latine, non francophones, peuvent être considérés comme francophiles car ils s’intègrent en général rapidement et très majoritairement à la société francophone. Les statistiques relatives aux communautés culturelles2, basées sur le recensement de 2006, indiquent, par exemple, que 90% des péruviens vivant au Québec connaissent le français et qu’ils sont 30,2% à l’utiliser le plus souvent à la maison contre 5,8% pour l’anglais. Pour les colombiens, nous avons respectivement les taux suivants : 86%, 21%, 4,9%. L’immigration provenant de ce bassin francophile a elle aussi connu une forte augmentation : +238% pour la Colombie, + 120% pour le Pérou…et représente aujourd’hui 12,4% de l’immigration totale contre 8,4 en l’an 2000.
L’accroissement considérable des effectifs en provenance des bassins francophones et francophiles s’est donc faite au détriment d’autres bassins et particulièrement du bassin asiatique, certainement le plus anglophone ou anglophile de tous et qui a vu sa part, hors Liban, chuter de 33,8% à 22,2% suite à une augmentation de seulement 9% du niveau des arrivées annuelles.
Si les différentes communautés asiatiques ne sont pas toutes identiques et qu’un certain nombre d’entre elles s’intègre plus facilement à la majorité francophone, comme les chinois et les iraniens d’après les statistiques en la matière, ou que certaines nationalités très anglophiles et minoritaires du Moyen-Orient peuvent éventuellement être francisées au contact des fortes communautés maghrébines et libanaise, on peut considérer, sans conteste, que les communautés en provenance d’Asie méridionale (sous-continent indien) et d’Asie du sud-est (philippines…) constituent le noyau dure anglophone, généralement peu enclin à apprendre le français. Les statistiques indiquent, par exemple, que 3,6% seulement des philippins parlent le plus souvent français à la maison contre 51,4% pour l’anglais et, respectivement, 9,6% et 38,8% pour les indiens.
Or, la part de de ces 2 sous-bassins asiatiques est passée sur la même période de 14,4% à 7,7% tout en accusant une baisse de 9% des nouveaux arrivants.
Par conséquent, si l’on considère, pour simplifier, que les communautés latino-américaines, et les faibles communautés européennes provenant de pays non francophones (mais qui connaissent souvent le français) finissent par rejoindre en totalité la majorité francophone, dès la 1ère ou à la 2ème génération, et qu’à l’inverse l’intégralité des communautés d’Asie méridionale et du sud-est s’intègrent à la minorité anglophone (ce qui n’est pas toujours comme nous l’avons vu pour les ressortissants indiens, plus-haut) et que l’on considère enfin que la moitié des autres ressortissants asiatiques finissent par devenir francophones, on aboutit ainsi au taux de 15% pour le pourcentage des nouveaux arrivants qui devraient rejoindre la minorité anglophone et qui peuvent donc être considérés comme anglophones.
En d’autres termes, ce sont 85% des nouveaux arrivants, en 2010, qui sont à considérer comme francophones. Jamais le Québec n’avait accueilli une part aussi élevée d’immigrants francophones. Pour la première fois de son histoire l’immigration internationale n’est plus anglicisante mais renforce désormais le fait français au Québec. Les faits sont les faits, on ne peut le nier.
Mais si les québécois ont parfois l’impression qu’une partie importante des immigrés est constituée d’anglophones, c’est qu’une partie encore non négligeable d’entre eux provient des anciennes vagues d’immigration, à une époque rappelons-le, où la quasi-totalité des immigrés rejoignait la minorité anglophone. Ce qui explique que ce sont encore 33,7% des immigrés allophones qui ont l’anglais pour première langue officielle parlée, selon le recensement de 20063, et qui sont donc considérés comme anglophones, chiffre en baisse constante sous l’influence des immigrations récentes.

Cette évolution positive est consolidée par l’obligation faite aux enfants des nouveaux arrivants d’être inscrits à l’école française. Ce système continue de très bien fonctionner puisque 88,8% de l’ensemble des élèves québécois fréquentaient l’école française à la rentrée 2008/2009 contre 11,1% pour l’école anglaise4, sachant que la communauté de langue maternelle anglaise représentait 8,2% de la population québécoise en 2006.
Il est à noter à ce sujet que le pourcentage des élèves inscrits à l’école anglaise est inférieur au taux de 13,4% qui représente le poids réel de la minorité anglophone selon le critère fédéral de la première langue officielle parlée (PLOP)5. Donnée assez peu reprise.
En effet, il convient de rappeler que le seul critère de la langue maternelle n’a aucune signification et que seul compte le critère PLOP, c.-à-d. la langue officielle que les immigrés utilisent le plus dans leur vie quotidienne et qui sera donc celle de leurs enfants nés au Québec. A partir de ce critère, la société québécoise n’est donc pas à 79,6% francophone mais à 86,6% francophone chiffre qui devrait être plus que jamais consolidé par la nouvelle structure de l’immigration internationale, voire même augmenter si la tendance récente à la hausse de l’immigration intégrable à la majorité francophone se poursuit. Sans pour autant rechercher à écarter toute immigration anglophone, puisque la minorité anglaise a, elle aussi, pleinement le droit de recevoir sa quote-part d’immigrés (autour des 10%, donc) tout comme les francophones du Manitoba ou comme cela pourrait bientôt être le cas des acadiens du Nouveau-Brunswick.
Mais la persistance des craintes autour de l’immigration, outre le fait que l’on ne peut changer en seulement cinq ou dix ans la perception et les idées reçues, forgées génération après génération, d’une société toute entière sur un sujet particulier, quel qu’il soit, s’explique en bonne partie par la concentration sur l’Ile de Montréal de l’immigration anglophone minoritaire.
Là encore, le seul critère de la langue maternelle n’a aucun fondement logique car il mène à considérer que l’Ile de Montréal n’est plus qu’à 49,8% francophone (et à 17,6% anglophone, et 32,6% « allophone »). Appliqué à une ville comme Paris, ce raisonnement conduirait probablement à considérer également que la ville lumière n’est plus qu’à 50% francophone. Ceci serait une totale absurdité, car seule compte l’utilisation privilégiée de la langue officielle par les immigrants et qui deviendra par la suite la langue maternelle de leurs descendants. Ne pas intégrer les maghrébins ou les haïtiens (parlant créole) à ce pourcentage de francophones en les mettant à part dans une catégorie désignée par le terme barbare d’« allophones » est une aberration et constitue un véritable manque de considération, pour ne pas employer d’autres termes, à l’égard de ces personnes qui maîtrisent parfaitement le français et qui sont venus au Québec pour vivre en français, et rien d’autre.
Le pourcentage des francophones sur l’Ile de Montréal est donc en réalité bien supérieur. Si les statistiques selon le critère PLOP devraient faire l’objet d’une publication ultérieure, celles relatives aux substitutions linguistiques de la population immigrée jusqu’en 2006, qui viennent d’être publiées par l’Office québécois de la langue française, démontrent que 53,5% des personnes concernées ont opté pour le français, contre 45,3% en 1996, chiffre qui représente la moyenne des taux bien plus bas des anciennes vagues d’immigration (24,5% avant 1976) et de des taux bien plus élevés des immigration récentes (71,8 sur la période 1996-2006)6. Jamais ce taux n’avait été aussi élevé, et dépasse pour la première fois la barre des 50%.
Rien de plus normal, car si plus des trois quarts des immigrés anglophones optent pour l’Ile de Montréal, cette tendance concerne également la grande majorité des immigrés francophones.
Comme le reste du Québec, l’Ile de Montréal n’avait donc jamais accueilli autant de francophones et connait donc désormais une immigration francisante, et non plus anglicisante. Ceci est également un tournant historique, qui s’est accéléré au cours des cinq dernières années.
Ainsi, mathématiquement, la prédilection des immigrants anglophones pour l’Ile de Montréal nous donnerait un taux d’environ 83% pour la part de l’immigration potentiellement francophone dans l’immigration totale à s’installer sur l’Ile, contre 85% pour la moyenne provinciale. Si l’on abaisse ce taux de quelques points pour tenir compte de la capacité de quelques rares quartiers à majorité anglophone à assimiler, outre les immigrants potentiellement anglophones qui s’y établissent majoritairement, la faible part des immigrants potentiellement francophones qui s’y installent, on peut donc considérer que la part de l’immigration potentiellement francophone sur l’Ile de Montréal se situe à près de 80%. Vu que la croissance démographique de l’Ile provient essentiellement de l’immigration, cela signifie que l’Ile de Montréal deviendrait francophone à près 80% sur le long terme.
Les migrations interprovinciales vont également dans ce sens puisque 70,8% des immigrés qui ont quitté le Québec pour le reste du canada, sur la période 2001-2006, étaient anglophones3. Ceci en tenant compte de fait que le taux de rétention global a connu une forte amélioration et se situe à 80,3% de l’immigration reçue entre 1999 et 2008, taux désormais comparable à celui en vigueur aux Etats-Unis ou en Australie7.
L’immigration est donc plus que jamais favorable au Québec puisqu’elle répond désormais au double objectif de stopper net son déclin démographique multi-décennal par rapport à l’Ontario et au reste du canada d’une part, tout en renforçant son identité francophone, d’autre part.
Afin de retrouver plus de l’influence au sein du Canada, le Québec devrait même viser le niveau des 79 000 immigrants, niveau maximal que lui permet l’entente Québec-Canada de 1991 (une part de l’immigration totale vers le Canada cinq points supérieure à son poids démographique).
D’autant plus que ce ne sont pas les possibilités d’accueil qui manquent avec un territoire aussi grand. Lorsqu’on pense que le Bangladesh compte 150 millions d’habitants pour un territoire représentant moins de 10% du Québec ! Quel bel exemple pour les québécois.
Mais les québécois doivent prendre davantage confiance en eux-mêmes, à différents niveaux : ils ne doivent pas sous-estimer la capacité de leur société à intégrer ses immigrés à la majorité francophone (n’oublions pas le cas des irlandais venus au début du 19ème siècle et qui se sont parfaitement assimilés malgré un contexte extrêmement défavorable au français à l’époque) et ne doivent pas non plus, dans un autre registre, se sentir obligés d’aller loin dans ce que l’on appelle les accommodements raisonnables. Sur ce dernier point, le Québec ne doit pas craindre d’entrer en confrontation avec le fédéral sur des sujets qui peuvent être d’une grande gravité à long terme et le plus souvent provoqués par une poignée d’individus.

Il faut bien comprendre que tout abaissement du niveau de l’immigration, tant qu’il ne sera pas compensé par un redressement significatif du taux de fécondité québécois, conduira inéluctablement à la poursuite du déclin du Québec par rapport au ROC, à son effacement politique progressif et au déclin de la langue française en Amérique du nord. Il est vrai qu’une baisse encore plus prononcée du poids du Québec est de nature à entrainer à long terme, au sein de l’opinion québécoise, le sentiment accru de faire partie d’une nation distincte d’un reste du Canada qui lui paraîtrait de plus en plus étranger, d’où une attitude de moins en moins favorable à son égard et in fine une volonté accrue d’aller vers l’indépendance. Ceci est peut-être le véritable but poursuivi par certains, avec le risque d’avoir en fin de compte un Québec toujours canadien mais extrêmement marginalisé.
A cet égard, je pense, à titre personnel, qu’il ne faudrait surtout pas sous-estimer ce que l’on pourrait appeler le « patriotisme francophone » d’une partie des immigrants, et particulièrement ceux de plus en plus nombreux en provenance d’Afrique du nord et d’Afrique sub-saharienne ( voire peut-être même de certains latino-américains, dont le « patriotisme latin » est plus marqué que chez les italiens des anciennes vagues d’immigration), et qui pourraient dans une large proportion, au terme d’une campagne convaincante, être plutôt favorables au « oui ».
Pour finir, il est cependant nécessaire d’être extrêmement vigilant sur certains points afin de tirer pleinement avantage de ce nouveau contexte favorable, renforcé au cours des cinq dernières années. Pour cela, il convient de s’assurer :
- du maintien et du renforcement des cours de francisation en direction des ressortissants de pays non francophones qui doit être une priorité absolue.
- d’une remobilisation de la société québécoise pour la défense de la langue française. Nul ne peut se satisfaire, et particulièrement à Montréal, d’entendre certains allophones, même bien attentionnés, dire « mais pourquoi devrait-on parler français puisque les québécois eux-mêmes nous parlent en anglais ! »
- du renforcement des contrôles pour l'application des lois sur l'affichage.
- de la prépondérance des pays du « noyau dur francophone » au sein des futures vagues d’immigration.
- de tirer davantage profit du potentiel migratoire, encore trop marginalement exploité, des pays francophones ayant le français pour langue maternelle, comme la France. Il est regrettable de constater que l’immigration permanente française ne concerne que 4000 personnes par an (soit 1 personne sur 15000 !) et même surprenant de voir certains québécois considérer que cela est déjà une excellente performance !
N’oublions pas que si les britanniques avaient le Québec pour seul débouché migratoire, ils y enverraient probablement bien plus de monde.
Pour ce faire, il est indispensable d’assurer au Québec une promotion efficace et continue qui ne peut passer que par une présence audiovisuelle accrue, à travers la retransmission d’une chaîne de télévision québécoise, généraliste ou d’information, qui s’ajouterait aux dizaines de chaînes étrangères déjà disponibles gratuitement sur nos écrans de télévision. Une chaîne québécoise serait, seule, capable d’éliminer tous ces clichés négatifs qui portent tant préjudice à la belle province (beaucoup découvriront qu’il y a aussi un véritable été au Québec, et même encore plus chaud qu’à Paris...) en pénétrant chacun des foyers français et en étant ainsi bien plus efficace et moins coûteuse que des centaines de réunions d’informations, qui n’ont donné que très peu de résultats jusqu’à présent.
***
Ilyes Zouari
_ Membre de l’association Paris-Québec
1. http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=STAT/11/110&format=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=en
2. Portait statistique des groupes ethnoculturels, recensement 2006 : http://www.quebecinterculturel.gouv.qc.ca/fr/diversite-ethnoculturelle/stats-groupes-ethno/recensement-2006.html
3. http://www.pch.gc.ca/pgm/lo-ol/pubs/npc/c-g/c-g616-fra.cfm
4. http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/education/200903/12/01-835644-moins-de-francos-et-danglos-plus-deleves-nes-a-letranger.php
5. http://www.statcan.gc.ca/pub/89-642-x/2010002/article/section2-fra.htm
6. http://www.oqlf.gouv.qc.ca/etudes2011/20110909_MPaille.pdf page 109, tableau 3.6
7. http://www.micc.gouv.qc.ca/publications/fr/recherches-statistiques/FICHE_syn_an2010.pdf p.2


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10 commentaires

  • Yves Rancourt Répondre

    11 décembre 2011

    Monsieur Zouari,
    Merci pour votre réponse. Vous me permettrez toutefois de revenir sur un autre point soulevé dans mon précédent commentaire, où je vous demandais ce qu'on entend par "connaissance du français" chez les nouveaux arrivants. Une vérification faite au ministère de l'Immigration m'a permis de savoir que c'est sur la base d'une simple "autodéclaration de la personne immigrante" que l'on détermine que cette personne a une bonne "connaissance du français".
    Alors, monsieur Zouari, avec tout le respect que je vous dois, vous me permettrez de vous faire part de mon plus grand scepticisme sur les données sur lesquelles vous vous êtes appuyées pour nous dire que l'immigration est plus que jamais favorable au français au Québec. L'immigrant voulant vivre au Québec a tout intérêt à dire qu'il connaît le français même s'il le connaît peu ou pas; de son côté, le ministère a, pour des raisons politiques, aussi intérêt à nous endormir avec des statistiques basées sur des "autodéclarations" qui ne font l'objet d'aucune vérification crédible.
    Mes salutations.

  • Archives de Vigile Répondre

    11 décembre 2011

    Mr Rancourt,
    simplement pour dire que la langue de travail est effectivement un élément important. Si beaucoup a été fait en la matière, ce certain relâchement que l'on observe depuis quelque temps (les multiples révélations de la presse ces derniers jours) est inacceptable et doit combattu.
    Le maximum doit être fait en la matière (entre parenthèses : j'ai lu il y a peu qu'une sté de sherbrook avait reçu une correspondance en anglais d'une sté de Montréal ! )
    Mais puisque nous ne pourrons jamais faire respecter ce principe dans toutes les entreprises, pour la simple raison que le québec est entouré de 300 millions d'anglophones, il convient impérativement de :

    - fournir des cours de francisation à tous les immigrants non francophones.
    - s'assurer de l'inscription de la totalité ou presque des enfants d'immigrants à l'ecole française,
    - faire appliquer à la lettre la loi sur l'affichage en français.
    Ces 3 éléments réunis permettront à ceux parmi les immigrants non francophones qui travaillent en anglais et qui pourraient devenir anglophones (une petite partie, donc, du total) de vivre tout de même dans un environnement francophone et de bien comprendre qu'ils se marginaliseraient en devenant anglophones. Enfin, les statistiques démontrent bien qu'une partie non négligeable des allophones anglophones ont tendance, plus tard, à aller en Ontario ou dans l'ouest.

  • Archives de Vigile Répondre

    6 décembre 2011


    à Mr Noël,
    je voudrais d'abord rappeler que j'ai le plus grand respect pour vous, tout comme pour tous les "vrais" défenseurs de la langue française.
    Mais pour revenir au Bangladesh, je dois vous dire, franchement, que c'est peut-être le paragraphe que je préfère dans le texte... En effet, il est très important pour moi que les québécois prennent conscience du "désert québécois", pour reprendre l'expression du "désert français" qu'avait utilisé le général De Gaulle en son temps.
    Pour aller plus loin dans ce raisonnement, cela implique qu'il n'y a aucune raison de se priver d'une véritable politique nataliste. Car après tout, même si l'immigation est désormais clairement favorable au fait français (reste maintenant à la charge des québécois de ne pas "perdre" ces immigrés et de bien faire appliquer certaines lois), le meilleur moyen de consolider et renforcer la nation québécoise reste et restera toujours la croissance naturelle. Même, moins certes, dans le cadre d'un Québec souverain.
    Vous aviez comparé dans un de vos messages le taux de fécondité québécois avec celui de l'Iran, qui sont similaires à 1,7. Sauf que vous avez oublié un (gros) détail : c'est que l'Iran, à superficie comparable (et avec beaucoup de zones inhabitables aussi), compte plus de 77 millions d'habitants. Lorsque le Québec en comptera autant, il pourra alors se permettre de faire moins d'enfants. Mais ce n'est pas encore le moment.

  • Archives de Vigile Répondre

    6 décembre 2011

    Tant mieux si votre titre dit la vérité.
    Mais je me méfie HAUTEMENT de ce genre de démonstration verbeuse noyée de chiffres.
    "La quantité d'arguments nécessaire pour démontrer la vérité d'une affirmation est INVERSEMENT proportionnelle à la quantité de vérité contenue dans cette affirmation." (Extrait du livre d'Urantia)

  • Yves Rancourt Répondre

    6 décembre 2011

    Monsieur Zouari,
    Je voudrais bien vous croire mais ce que j'observe sur le terrain me démontre que le français est en net recul à Montréal et que les immigrés sont très nombreux à opter pour l'anglais. Mais je vous pose une question: vous dites que " le pourcentage des personnes ayant une connaissance du français est passé sur la même période( 2000-2010) de 40% à 65%". Pouvez-vous me dire ce qu'on entend par "connaissance du français"? Est-ce vérifié par des tests objectifs? Est-ce que l'on considère que les personnes qui baragouinent quelques mots( merci, bonjour, etc) ont une "connaissance du français"? Aurait-on assoupli les critères ces dernières années( les organismes de stats font ça parfois)? En cette matière, la langue utilisée au travail n'est-elle pas le plus important critère pour déterminer l'attrait du français chez les immigrés au Québec? Et à ce sujet, où en sommes-nous? J'apprécierais des éclaircissements si possible.
    Merci et mes salutations.

  • Archives de Vigile Répondre

    6 décembre 2011

    Très intéressante démonstration. Dommage que la progression tous azimuts de l'anglais démontre justement le contraire sur le terrain, qu'il s'agisse de la Caisse de dépôt ou de la Banque nationale, de la fonction publique québécoise, des écoles, des organismes sociaux et même de l'église, du petit et grand commerce, etc. Si le français se parle davantage, c'est derrière les portes closes des chaumières, mais certes pas dans l'espace public.

  • Pablo Lugo Herrera Répondre

    5 décembre 2011

    Personnellement, je ne le crois pas. C'est vrai l'augmentation démographique, mais au détriment de notre culture, plus précisément la langue. Il y a une réalité... Il y a des immigrés pour continuer avec le génocide culturel de notre Nation. Point à la ligne!

  • Archives de Vigile Répondre

    5 décembre 2011

    Point de vue solide, intéressant et convaincant M. Zouari. Merci.

  • Archives de Vigile Répondre

    5 décembre 2011

    Je suis la question linguistique de près. Vous avez produit un des meilleurs textes que je ai lu depuis longtemps sur la question.
    Vous avez raison: C'est la PLOP qui est la vraie mesure. Dans les considérations actuelles que vous lisons un peu partout, on semble condamner les allophones à être allophones de génération en génération oubliant que les enfants d'immigrants ne sont pas des immigrants.

  • Archives de Vigile Répondre

    5 décembre 2011

    «Lorsqu’on pense que le Bangladesh compte 150 millions d’habitants pour un territoire représentant moins de 10% du Québec ! Quel bel exemple pour les québécois.»
    Le Bengladesh! Je ne l'avais pas encore entendu celle-là.
    Vous connaissez beaucoup de pays qui copient le modèle du Bengladesh? Vous connaissez le Bengladesh?
    J'ai visité en 1993. J'en avais même fait un texte dans La Presse. Je ris encore en le relisant..
    DACCA, ALLAH BIERE
    Vous venez d'arriver à Dacca. C'est votre première virée au Bangladesh. Le voyage a été pénible. Les douaniers, plus chiants que la moyenne de vos expériences frontalières.
    Le soleil est couché depuis une heure, mais il fait encore 36 degrés. Vous vous dites: faudrait arroser ça. S'en envoyer une bien froide derrière le gaminet.
    Mais vous savez que vous êtes en territoire mahométan à 85% et que le Prophète, même dans sa plus folle jeunesse, avait une sainte horreur de la dive bouteille. Comble de malheur, c'est vendredi. Les dimanches secs de votre enfance, exposant dix.
    Vous regardez votre montre et vous vous dites: on est quand même à moins de sept ans du troisième millénaire! Dans un pays de 118 millions d'habitants, qui compte autant de non-musulmans que le Canada!! Dans une ville deux fois plus peuplée que Montréal!!!
    Alors vous commencez haut, histoire d'aller droit au but, le plus rapidement possible, éponger le gosier. Vous spotez sur la carte le symbole même du grand Satan en terre musulmane: le Sheraton.
    "C'est fermé aujourd'hui" dit le barman, en levant les yeux de son journal, tout en hiéroglyphes. Ca commence mal.
    TAXI
    A Montréal, dans les circonstances, le meilleur ami du journaliste (son seul!), c'est le chauffeur de taxi. Mais dans le tiers-monde, c'est une autre problématique.

    Depuis des années que je voyage dans le Sud, j'entretiens avec cette "profession" une relation douloureuse. Un lourd contentieux, parsemé d'esclandres mémorables, d'échanges viriles et de prises au collet. Le tout couronné par de violents claquements de porte, de coups de pied dans l'aile et des premiers mots d'apprentissage en langue étrangère. Ou de basic english universel.
    Un jour, j'écrirai un livre retentissant, trempé dans le vitriol, sur les chauffeurs de taxi à travers le monde.
    Sur leur propension à tripler, quadrupler les tarifs à la vue d'un étranger. Sur leur refus systématique à utiliser le compteur, lorsqu'il y a en un ("Broken, sir!"). Sur leurs manies d'emmener le client à un hôtel de leur choix -où ils retireront une commission- plutôt qu'à celui demandé; de klaxonner, de harceler "taxiuellement" après, comme si les deux jambes d'un Blanc ne servaient pas aussi à marcher.
    Sur leur façon de conduire en fou, pour montrer leur dextérité ou leur machisme. Sur leur bolide, qui tombe en ruines, lorsqu'il ne tombe pas en panne. Sur leurs mensonges ("No bus here", "No bus today"). Sur leur attente harassante à la porte des hôtels. Sur leur absence continuelle de monnaie. Sur leur obstination à vouloir être payé en devises, plutôt qu'en monnaie du pays. Sur leur habitude à prendre des passagers en voyage, pour doubler la commission. A ne jamais toucher aux bagages... Bref, à prendre le touriste pour un gros teton.
    Je dirai tout sur les dessous de cette mafia internationale. Les liens étroits avec le syndicat des malappris, les implications jusqu'au coup dans le trafic des devises, les relations incestueuses avec l'internationale des prostituées, les ramifications avec le syndicat des curieux, les tentacules avec l' office des mémères. Du vitriol.
    L'ennemi du touriste. L'ennemi à abattre.
    GOLDEN DRAGON
    En désespoir de cause, je me rabats sur un resto chinois à côté, plein de monde. Le serveur rougit lorsque je lui parle houblon.
    Les Chinois sont les Juifs d'Asie. Industrieux, besogneux, débrouillards, repliés sur eux-mêmes. On en trouve partout. Plus ou moins aimés, plus ou moins acceptés. Ils font généralement dans le commerce. Et parfois dans des combines pas trop bouddhiques. Il me parle à voix basse d'un autre chinois, le Golden Dragon, deux rues plus bas.
    La rue est passante mais l'enseigne éteinte. Je me glisse à l'intérieur de la cour. Pas un chat. Pas un Chinois. Au fond, un gardien sort de nulle part et me salue. "Come on, come on!"
    On franchit une autre barrière, contourne une grosse bagnole américaine toute blanche que je distingue mal (Chrysler?), pour se retrouver dans la gueule du Dragon. Le gardien ouvre: c'est noir.
    Ailleurs, j'aurai pris la poudre d'escampette au plus sacrant, avant de me retrouver avec un couteau dans le dos ou un gun sous le museau. Mais en pays musulman, contrairement à tout ce que l'on peut charrier comme préjugés, je me suis toujours senti en parfaite sécurité.
    Je rentre. Une lampe de poche me dévisage. Derrière: "Hello, my friend. How do you do?" I do dark mon doudou. Je trébuche sur une marche, me pète un genou sur une table, renverse un verre vide, avant de recentrer derrière le guide. Allah que c'est noir!
    Mes lentilles se réajustent lentement. Il y a des ombres humaines. Deux à quatre par table. Des maho-mi-temps? Une dizaine de tables peut-être, mais plus en fait parce qu'il y a d'autres pièces derrière.
    Sur le mur, un petit luminaire rouge donne un peu de relief à une pudique pin-up des sixties, blonde plantine et fortement nichonnée, en accord avec la doctrine Monroe de l'époque.
    Ali, un Bangladeshis (on peut pas tous être Trifluvien ou Louperivois), le maître à bord après Allah et Bouddha, s'amène et me sert la pince. Il ne connaît pas encore le Québec, qu'il confond d'ailleurs avec le Tibet, mais le Canada est son pays préféré. Il a d'ailleurs essayé d'y immigrer. A été refusé.
    Comme c'est le 128e que je rencontre depuis mon arrivée en Asie, et qu'on doit faire sa part pour soulager la misère dans le tiers-monde, je lui refile les tuyaux connus sur la filière réfugiée. Le faux passeport, sa destruction dans l'avion, le mot de passe à Mirabel, l'avocat qui donne le show, les larmes devant la caméra et les pique-assiettes qui mordent à l'appât et sermonent le ministre inhumain.
    Ali tique lorsque je lui parle de soins de santé gratuit! D'école gratuite pour les enfants!! Et de chèques de 600$, 800$, 1000$ par mois à ne rien faire!!! "Je le savais, le Canada, c'est vraiment le paradis."
    Impressionné par l'apparition d'un fils du paradis, il m'emmène derrière le comptoir et m'ouvre sa réserve d'Ali... Baba, bien refroidie à l'eau du Gange. Dans le fond de la glacière de styrofoam, pas de piquettes locales. Que des grands crus, élevés à la gloire, à la sueur prolétarienne.
    Foster's Lager des cowboys australiens, Guinness noires des pêcheurs irlandais, Stella d'Artois des mineurs belges, Becks des débardeurs de Hambourg, Bass rouge des métallos de Manchester. Jacques au Pays des Merveilles.
    Et là, sous la glace, qu'est-ce que je vois dans le noir? C'est toi Gigi? Oh Diiiiio Miiiiio! Gi...raf! Giraf blonde des marins danois. Ma vision s'embrouille. Ma gorge salive. J'hallucine, je tremble à la Gainsbar. Autant de merveilles dans un endroit aussi sinistre. Pas de c... de bons sens. Pas de c... de bons sens.
    Sans la bière, la vie serait une erreur. Les vacances surtout. A 36 degrés.
    Je fixe mon choix sur l'australienne. Une canette bleue qui soudain me rappelle Denise, les deux frangins et le putain de publiciste, qui après avoir fait sortir le génie de la bouteille, avait pressé le citron-secret un peu fort par la suite. Cinq ans!
    J'ouvre. Le bruit claque dans mes oreilles comme un Cordon rouge à Pigalle. Sans les filles évidemment. Cent fois moins chère aussi.
    Amine achète ses merveilles au Complexe diplomatique, pousse quelques takkas (les roupies du coin) à gauche au gérant, à droite à la police, et le tour est joué: dans le brun Mohamed. Il revend le tout, deux fois son prix d'achat. Kif-kif, deux fois.
    Je la bois rapidement. Pas envie de m'attarder dans un endroit aussi sinistre.
    "Tu veux une fille avec ça?" me demande Amine. Non merci, pour à soir ça va aller.
    Je cale ma Bleue down under et je rentre par les rues désertes. Heureux comme un pape, d'avoir trompé le Prophète.
    LA PRESSE, 19 avril 1994