L'État Tanguy

Bref, Dion nous dit que pour avoir droit au divorce, il faut avoir été battu auparavant. Et battu beaucoup, souvent et très fort !

DUI - Référendum - Kosovo (17 février 2008), Soudan (janvier 2011)

(Désolée si ce blogue est un peu longuet, mais ce n'est pas un sujet qui se ramasse en deux ou trois paragraphes..)
En regardant le petit Kosovo de 2 millions d'habitants avec son taux de chômage de 45% déclarer unilatéralement son indépendance, une question m'est venue. Le Québec serait-il devenu un État Tanguy, un territoire ayant tout ce qu'il faut pour être indépendant, mais gouverné par des élites incapables de se détacher du confort de la grande maison canadienne ?
Je n'ai pas la réponse. Je pose la question, c'est tout.
Par une drôle de coïncidence, le Kosovo devient le 194e pays de la planète tout juste un mois avant que le PQ procède à l'enterrement de son référendum à son prochain conseil national. En échange, il parlera dorénavant du «projet» de pays. Et comment se fera ce «pays» si le PQ refuse de parler du «moyen» par lequel il voudrait le créer? Qui sait? Peut-être par l'Immaculée conception...
En réaction à la proclamation du Kosovo, le député péquiste Daniel Turp a même déclaré que le PQ allait continuer d'«accompagner ceux et celles qui veulent faire accéder la nation québécoise au statut de pays». ACCOMPAGNER? Est-ce là le peu que le PQ entend faire dorénavant?
Quant à Stéphane Dion, le père de la Loi dite sur la clarté, s'il a le mérite d'encourager le Canada à reconnaître le Kosovo, on a quand même vu poindre sa légendaire mauvaise foi dès qu'il s'agit du Québec.
Le Kosovo et le Québec, nous dit Dion, c'est pas pareil ! Il nous dit qu'il faut reconnaître le Kosovo parce que sa «population a été victime d'exactions graves qui ont nécessité une intervention armée». Ah bon? Si on le comprend bien, le Québec n'aurait pas droit à son indépendance s'il votait OUI - et la question est ici TRÈS hypothétique avec AUCUN référendum en vue - parce qu'aucun Québécois n'a été embroché ou coupé en petits morceaux par un quelconque «ennemi»?
Bref, Dion nous dit que pour avoir droit au divorce, il faut avoir été battu auparavant. Et battu beaucoup, souvent et très fort !
Le Kosovo qui, lui, se contente d'une déclaration d'indépendance unilatérale sans référendum, est tout de même un gargantuesque pied de nez au concept même d'une Loi sur la clarté, voire au concept même de référendum.
En fait, même si le Québec tenait un jour un autre référendum, la Loi de Stéphane Dion ne vaudrait même pas le prix du papier sur lequel elle est imprimée.
Tout juriste vous dira que la Loi sur la clarté, ce n'est que ça : une loi ORDINAIRE du Parlement fédéral. Elle n'est ni au-dessus des autres lois, ni constitutionnalisée. Une loi ORDINAIRE votée par un parlement ne peut contraindre un autre parlement ou, dans ce cas-ci, l'Assemblée nationale.
En d'autres termes, la Loi sur la clarté a beau dire qu'Ottawa déciderait s'il devait ou non reconnaître un référendum gagné par le OUI en jugeant, une fois le vote passé, de la «clarté» de la question et de la majorité, cette loi n'aurait aucun pouvoir de contraindre l'Assemblée nationale à lui obéir.
La Loi de Stéphane n'est donc rien de plus qu'un tigre de papier, un Bonhomme sept heures destiné à faire croire qu'un OUI mènerait au chaos. Le problème, c'est que Lucien Bouchard - PM du Québec au moment de l'adoption de cette loi et pourtant avocat - ne l'a jamais expliqué «clairement» aux Québécois.
Plutôt que d'expliquer calmement aux Québécois pourquoi ils n'avaient aucune raison d'avoir peur du Bonhomme sept heures, il a préféré jouer à la victime. Comme d'habitude.
Le Kosovo fait par ailleurs la démonstration de quelques points fondamentaux (appelons ça le très classique «gros bon sens»).
Primo : rien, et surtout pas une simple loi, ne peut arrêter l'indépendance d'un peuple le désirant vraiment et dirigé par des élites qui, elles aussi, le veulent vraiment.
Secundo : même si, comme la Serbie l'a fait, l'État dont on se sépare refuse de reconnaître la déclaration d'indépendance d'un de ses territoires constituants, l'important est que cette reconnaissance soit faite par d'autres pays. C'est ce que Jacques Parizeau avait préparé en 1995. Sachant qu'Ottawa tiendrait tête le lendemain d'un OUI, des années de travail diplomatique intense avait assuré que la France et la francophonie seraient les premiers à reconnaître ce nouveau pays.
Tertio : un référendum, c'est bien. Mais il existe aussi d'autres moyens démocratiques d'obtenir son indépendance.
Mais ce n'est pas au PQ qu'on débattra du «moyen», ses dirigeants refusant maintenant de parler de ce genre de choses. C'est vrai qu'il y a toujours l'Immaculée conception...
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