L'effectif de la fonction publique est-il si imposant qu'on le prétend?

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«L’État obèse est un slogan et voilà tout!»





Le Laboratoire d'études socio-économiques de l'Université du Québec à Montréal, dont je suis le directeur, a publié récemment une étude intitulée La taille de l’effectif de la fonction publique québécois : Est-il aussi imposant qu’on le prétend? 


La légende du monstre étatique


On sait qu'il y a un mythe véhiculé par nos élus ainsi que leurs experts franchisés sur le fait l'État ne cesse de grossir et qu'il serait rendu obèse, voire gargantuesque. Bien sûr, lorsqu'on analyse sérieusement les faits, l'État est loin d'être obèse; au contraire, il a maigri considérablement depuis 30 ans.


On s’entend qu'il est gavé lorsqu'on parle des salaires des médecins, du prix des médicaments, des subventions orgiaques auprès des entreprises, etc. Mais la réduction de l'État ne s’applique pas lorsque c'est le gratin qui en profite. Pourtant, les services publics du monde ordinaire sont au régime et on doit, de plus, se contenter des miettes alors que nos riches profitent allégrement du buffet étatique.


La note en question analyse la taille de l’effectif de la fonction publique du Québec de 2003 à 2012, qui est souvent la proie d'attaques injustifiées, à partir des statistiques se trouvant dans le rapport réalisé chaque année du Conseil du trésor du Québec intitulé L’Effectif de la fonction publique du Québec.
 
Le nombre d'employés versus l'Équivalent en temps complet
On aurait pu regarder le nombre d'employés, mais l’équivalent en temps complet (ETC) mesure plus justement de la taille d'une organisation étatique ou non. On mentionne dans l’étude que : «À titre informatif, l’ETC se mesure par heure travaillée équivalente à temps plein. Donc, un employé qui travaillerait à temps plein pendant un an serait égal à 1 unité d’ETC. En revanche, un employé ayant travaillé 6 mois serait considéré comme une demie unité d’ETC. Ainsi, nous avons pu observer la quantité réelle de travail puisque le nombre d'employés ne nous dit rien sur le nombre réel d'heures travaillées des employés de l’État. Par exemple, si un effectif de 1000 employés est théoriquement plus grand qu'un effectif de 500 employés, mais si les 500 employés travaillent deux fois plus, les deux effectifs devraient être évalués comme des effectifs égaux. Par ce raisonnement, l’ETC dresse un portrait plus réaliste puisqu'il mesure plus justement le nombre d'heures».


Les résultats
En somme, nos analyses démontrent une baisse d’ETC par 10 000 habitants, qui était à plus de 94 en 2002-2003 pour s'approcher de 86 en 2010-2011. Bref, par 10 000 habitants, on a réduit l'effectif équivalant à 8 employés à temps plein entre 2002 et 2011.  De plus, les dépenses de l’effectif du fonctionnariat du Québec sont passées, en dollar constant de 2011, de 3,7 milliards de dollars en 2003-2004 à 3,6 milliards de dollars en 2010-2011. Tiens, tiens, on économise un gros 100 millions de dollars et ils ne sont pas encore satisfaits. À les entendre, les dépenses auraient multiplié plusieurs fois. Méchant État providence qui dépense toujours allégrement et sans compter. On relaxe svp. En passant, ça représente des dépenses de 501$ par habitant en 2003-2004  contre 459$ par habitant en 2010-2011, soit plus de 40$ de moins par habitant, ce qui équivaut une réduction de 9%. Je sais, on aurait préféré 90%, voire 99%, pis pourquoi pas 100%. 100% est peut-être trop, il faut continuer à gaver les riches quand même.  En outre, notre étude, avec chiffres à l’appui, montre que la tendance est à la baisse de la taille de l’effectif de la fonction publique du Québec.


La santé et l'éducation
Certains pourraient critiquer cette note en disant qu'on analyse que le fonctionnariat et non l’effectif de la santé et l'éducation. D'accord, mes amis, faisons donc l'analyse de la santé et de l'éducation. La note reprend les chiffres publiés par des articles et des études. En fait, j'en ai fait mention lors de mes derniers textes, mais bon, on dirait bien que j'aime me répéter. Allez Léo, t'es capable, recommence. 


D'abord, deux économistes de la Centrale des syndicats du Québec, Pierre-Antoine Harvey et Erik Bouchard-Boulianne, économistes, ont calculé que, pour l'année 2009, les dépenses en éducation par habitant étaient de 2542$ au Québec contre 2806$ par habitant pour le reste du Canada. Quant à l'Ontario, l'Alberta et la  Colombie-Britannique, on y dépensait en éducation respectivement en moyenne de 2705$ par habitant, 3128$ par habitant et 2687$ par habitant (La Presse, 31 octobre 2014 : «Dépenses en santé. Une facture de plus de 6000$ par Canadien»).
Enfin, pour la santé, il suffit de lire cet article : «Les dépenses en santé, les plus faibles au Canada» (Le Devoir, 29 octobre 2010 et La Presse, 31 octobre 2014). Ajoutons que selon l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS), le Québec est la province qui dépense le moins par habitant soit 5616$ par habitant en santé.  La moyenne canadienne est à 6045$ par habitant. Le laboratoire d'études socio-économiques avait publié en avril 2014 une note socio-économique intitulée La légende du système de santé supposément socialisé du Québec démontrant que le Québec était la province la plus dépensière en santé dans les années 70, mais que de nos jours, il est le moins dépensier. Trouvez l’erreur mes amis.


Où est le monstre étatique au juste et pour qui il travaille
L'État obèse est un slogan et voilà tout. La taille supposément énorme est une fabulation qui ne tient pas la route. Il est temps de se demander quel est le véritable problème étatique. Robert Reich, professeur de politique publique à l'Université de Californie à Berkeley et ancien secrétaire du Travail du président démocrate Bill Clinton, mentionnait que le problème de l'État n'est pas sa taille, mais pour qui il travaille. Question : pour qui il travaille selon vous?


Pour consulter la note : http://www.lese.uqam.ca/pdf/note_15_fonction_publique.pdf 
 


Texte écrit en collaboration avec Frédéric Rogenmoser





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