L'après-crise

Budget de MJF - mars 2009



Voici le dernier de trois éditoriaux sur l'approche que devrait adopter le gouvernement Charest dans son budget du 19 mars.
Le budget de Monique Jérôme-Forget n'aura aucune commune mesure avec celui de l'équipe Obama, c'est évident. Mais il devrait avoir la même préoccupation: miser sur des secteurs d'avenir qui permettront au Québec de sortir renforcé de la crise.

En ouvrant la porte au déficit, le gouvernement Charest a créé un attroupement monstre. Tourisme, forêt, entrepreneurs, tous font la file pour réclamer une part de ce gâteau acheté à crédit. Leurs besoins sont réels, mais l'État québécois a des moyens limités. Il faut cibler des activités qui, au sortir de la récession, ont le potentiel d'amener notre économie ailleurs.
Les infrastructures publiques forment une catégorie à part. Il ne s'agit pas de stimuler artificiellement la construction, mais de réaliser des travaux qui auraient dû être faits depuis longtemps. La réfection et le rehaussement de structures existantes devraient avoir priorité sur la création de nouvelles structures, qui alourdiront les futurs budgets d'entretien.
Pour le reste, il faut se concentrer sur les secteurs porteurs. Ceux qui créeront des emplois pour lesquels il n'existe pas encore de titres, ceux qui permettront au Québec de se tailler une place dans l'économie de demain. Les biotechnologies, par exemple. Sur la centaine d'entreprises actives dans le domaine, au moins six ont fermé leurs portes l'an dernier. Et il risque d'y en avoir d'autres. Le financement étant devenu presque introuvable, les deux tiers de celles qui restent pourraient manquer d'argent d'ici 12 mois, nous dit-on. Le capital de risque est au coeur du modèle d'affaires de ces PME. Les en priver ne les rendra pas plus fortes, mais risque au contraire de les asphyxier. Il faut intervenir. BIOQuébec, qui représente les trois quarts de l'industrie, a proposé diverses pistes, dont le paiement anticipé des crédits d'impôt. Laissons aux Finances le soin d'évaluer ces suggestions. Une chose est sûre cependant: on ne peut pas laisser tomber ce créneau après avoir mis tant d'efforts à le développer.
Il faut aussi souhaiter que l'innovation, au sens large du terme, figure en bonne place dans le prochain budget. Qu'il s'agisse des technologies de l'information, des énergies vertes ou d'autres secteurs, il est important de donner un signal clair. Les difficultés immédiates ne doivent pas occulter notre vision à long terme. La crise actuelle est-elle un tournant, ou un cauchemar appelé à se répéter? La réponse viendra en grande partie de la façon dont le Québec choisit, aujourd'hui, de placer ses billes.
Et ces billes-là, il faudrait aussi en mettre dans les écoles primaires et secondaires. Pas seulement dans la réduction de la taille des classes, mais dans les services aux jeunes en difficultés d'apprentissage, qui ont très peu profité de l'augmentation des budgets de l'éducation l'an dernier. Lorsque les parents ont les moyens de payer, les enfants peuvent recevoir l'aide d'un orthopédagogue ou d'un orthophoniste au privé. Mais les autres? Ils traînent de la patte, retardent la classe et finissent trop souvent par décrocher. C'est non seulement une injustice, mais un gaspillage de potentiel. Ce n'est pas comme ça qu'on formera la main-d'oeuvre spécialisée dont on aura besoin au cours des prochaines décennies.


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