Grippe A : la France n'a toujours pas réglé ses factures

L'Empire - la fabrication de la PEUR


Un nouveau rapport parlementaire sur la gestion de la pandémie de grippe A souligne les faiblesses de la politique du ministère de la santé face aux laboratoires pharmaceutiques. GlaxoSmithKline (GSK) n'a toujours pas reconnu la résiliation de 369,25 millions d'euros de vaccins par l'Etat ; le laboratoire pourrait saisir la justice.
La commission d'enquête du Sénat, dont le rapporteur est l'UMP Alain Milon, juge "anormal" que le gouvernement ait été "contraint" d'acheter deux fois plus de vaccins que nécessaire pour "s'empêtrer dans des contrats déséquilibrés". Présidée par François Autain (Parti de gauche), la commission souligne de nombreuses et coûteuses erreurs et dénonce "un déni de réalité dans la politique du ministère de la santé". "Les scénarios les plus pessimistes ont été privilégiés sans qu'aucun fait ne vienne les étayer et que toutes les informations rassurantes disponibles ont été écartées ou ignorées", peut-on encore lire dans le rapport.
DOCILITÉ DE L'ÉTAT
Concernant l'achat de vaccins, les sénateurs s'étonnent que les laboratoires américains GSK et Baxter aient refusé d'inclure dans les contrats de préréservation la clause d'annulation. Une clause qui permet de résilier à son gré les commandes excédant ses besoins et que les Britanniques n'ont pas omis d'intégrer dans leur contrat. Un oubli qui coûte des millions d'euros à la France. En janvier, l'Etat a annulé ses commandes auprès des trois laboratoires. Le gouvernement a négocié avec Sanofi-Pasteur et Novartis le paiement d'une indemnisation équivalente à 16 % des commandes, soit 2 millions d'euros pour Sanofi-Pasteur et 10,46 millions pour Novartis. L'américain GSK n'a à ce jour pas accepté les 59,08 millions d'euros (16 % de 369,25 millions d'euros de commandes) proposés par l'Etat français. Le laboratoire pourrait saisir le tribunal administratif, reconnaît-on au ministère de la santé, qui n'est toujours pas en mesure d'estimer le coût de ses achats de vaccins.
Le rapport souligne également la docilité de l'Etat face aux laboratoires. "L'étude des contrats passés entre les autorités sanitaires et les industriels (...) peut conduire à se demander si les autorités publiques se sont montrées assez soucieuses de garder la maîtrise de la gestion des crises qui doit être la leur", explique le rapporteur. Les travaux des sénateurs confortent celui de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, présenté le 7 juin, qui dénonçait un "gaspillage des fonds publics" et "des peurs injustifiées".
Un autre point a particulièrement retenu l'attention des parlementaires : les liens d'intérêt qui auraient pu conduire des personnalités proches des instances gouvernementales et internationales à organiser un lobbying actif favorable aux industries pharmaceutiques. La commission regrette "l'anonymat des membres du comité d'urgence et la non-publicité des déclarations d'intérêt font apparaître un manque de transparence de l'OMS qui renforce les critiques portant sur l'influence des laboratoires." Concernant les instances françaises, "bien qu'aucun élément dont elle dispose ne permette à la commission d'enquête de conclure que des préconisations aient été faites en raison des liens d'intérêt de certains experts, elle ne peut que constater que la pandémie de grippe liée au virus A (H1N1) a été l'occasion d'une remise en cause sévère de l'expertise publique dans l'opinion en raison des liens d'intérêt de la majorité des experts avec l'industrie pharmaceutique."
Eric Nunès


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