Mon ami Pierre Demers, 1914 - 2017
10 février 2017
(en référence, en lien avec mon précédent message rendant hommage à M. Pierre Demers)
10 février 2017
(en référence, en lien avec mon précédent message rendant hommage à M. Pierre Demers)
10 février 2017
HOMMAGE À M. PIERRE DEMERS
J'ai eu l'occasion de connaître Pierre Demers, à la suite d'un texte d'opinion que j'avais rédigé et qui est paru le 4 avril 2002 dans Le Devoir: « Le français scientifique au Canada, un château qui s'écroule. » J'y résumais l'expérience vécue comme étudiant-chercheur inscrit à la première Conférence canadienne de Biologie du Développement au regard de la langue promue à l'occasion de cet événement. Je dénonçais le fait que sous des apparences de bilinguisme officiel se cachait une forme sournoise de « canadian bilinguism ». C'est à dire que l'anglais primait dans les communications, même si l'événement se déroulait au Québec, au Mont-Tremblant et qu'il était financé par un organisme subventionnaire fédéral. « Dès lors qu’on doit remplir un formulaire en anglais, on ne doit pas s’étonner que cette conférence canadienne se déroule pratiquement uniquement en anglais. En effet, toutes les conférences et les présentations orales sont en anglais. Seuls, les résumés et les affiches peuvent être rédigés en français. Ainsi, au Canada scientifique, on peut écrire en français mais on ne peut pas parler français! » J'y exprimais toutefois ma fierté de présenter mon affiche dans notre langue nationale, le français. J'y concluais que nous n'avions rien à attendre du Canada en matière de protection et de promotion du français et que le développement du Québec passe en français.
Ayant lu mon texte, M. Demers réussit à communiquer avec moi pour me féliciter et m'informer de l'existence de la Ligue internationale des Scientifiques pour l'usage de langue française (LISULF). Il résumait la préoccupation de la LISULF ainsi: « Un peuple qui permet à ses scientifiques de communiquer leurs résultats en primeur dans une langue étrangère est voué à la servitude. » La note qu'il m'avait transmise fut publiée dans Le Devoir le 10 avril 2002. Il rappelait que « Pasteur, Becquerel, Pierre et Marie Curie, Joliot ont annoncé leurs découvertes en français et ont apporté gloire et prospérité au peuple français. » C'est donc avec beaucoup d'intérêt que j'ai joint les rangs de la LISULF et que j'ai commencé à entretenir une correspondance régulière par courriel avec M. Demers.
J'ai eu le privilège de le rencontrer à quelques occasions, lors d'assemblées générales de la LISULF et de visites à son domicile. Je lui ai même présenté mon neveu de 15 ans le 21 octobre 2006 à la suite d'une assemblée (voir photos en pièces jointes). Il appréciait et affectionnait ces rencontres avec les jeunes. Il affirmait: « Je ne rencontre pas souvent des jeunes et cela me manque. Les vieux sont "supposés" vivre entre vieux. Vous savez la théorie du Dr Davignon sur les 3i qui font le malheur des vieillards : indifférent, infantile, inutile. Ce sont les jeunes, à cause de leur âge plus aptes physiquement à se déplacer et plus entreprenants, qui doivent réclamer, pour leur propre profit, de communiquer avec les "aînés" sans crainte de les importuner ou de les fatiguer. Communiquer avec eux est un moyen de les garder en vie. Les aînés - les survivants sont là pour l'instruction de l'humanité montante..» Cela me parle encore, alors qu'il vient de nous quitter.
Il m'a offert son plus beau cadeau, son amitié, qui me rapprochait de lui, malgré la distance qui nous séparait entre Montréal et les Îles-de-la-Madeleine. Alors jeune enseignant de sciences, il a toujours cherché à favoriser ma participation aux assemblées de la LISULF, en les faisant par exemple coïncider à la même période que mes déplacements en ville pour des congrès et en me proposant que la LISULF rembourse mes frais de déplacement (ce que j'ai toujours refusé). Ces assemblées nous permettaient entre autres de partager une réflexion profonde sur les enjeux et défis entourant l'avenir de la science en français et son enseignement.
Homme de génie, il était d'une grande humilité et humanité. Ce grand savant et chercheur attentif, accueillant, bienveillant, authentique et engagé, a su partager son savoir et sa curiosité, avec constance, rigueur et originalité. À travers l'ensemble de sa carrière, les activités et publications de la LISULF et toutes ses réalisations, il a exprimé avec constance sa fierté et son amour envers sa patrie dont il souhaitait ardemment l'indépendance. Le système du Québécium qu'il propose en est une manifestation tangible.
Son appel aux générations montantes à poursuivre inlassablement et fermement la promotion du français en science doit continuer d'être entendu, non seulement au Québec, mais dans toute la francophonie. Si au Québec nous pouvons expérimenter en français, nous pouvons aussi découvrir en français et communiquer ces découvertes en français à notre peuple et au monde entier.
Pour rendre un hommage national à cet homme d'exception, je propose que le gouvernement du Québec suive l'une de ses principales propositions: « que les Prix du Québec, dont les prix scientifiques soient décernés désormais sur présentation de publications en français uniquement. »
M. Demers rappelait à ce propos que « la compétence spécialisée est essentielle et je l'admire, mais la compétence et l'exemple linguistiques sont aussi bien requis d'un individu pour qu'il soit primé par le Québec. Au Québec, la langue d'usage est le français. C'est vrai pour quiconque vit au Québec. C'est vrai pour nos scientifiques [...] Vous, les lauréats avez, fort heureusement, la vedette. Les scientifiques du Québec, qui sont légion, vous regardent avec fierté et y trouvent leur inspiration, comme ils en ont l'habitude consacrée depuis des années. Les compatriotes et le monde entier vous regardent, les immigrants regardent et comprendront que le français est la première ressource pour vivre ici, que le français est la clé indispensable du succès, de survie, modeste ou éclatant, dans toutes les sphères d'activité, qu'il s'agisse de science abstraite dans l'Université ou ailleurs, ou de science appliquée ou de toutes autres sortes de choses du domaine public.»
Que vive la science du Québec, en français!
À M. Pierre Demers, la patrie reconnaissante!
27 octobre 2010
Cet événement que je ne peux oublier avait mobilisé plusieurs exécutifs du Parti québécois à l'époque qui dénonçaient avec force cette motion de l'Assemblée nationale. Dans les conseils nationaux qui ont suivi, des propositions avaient été adoptées à l'effet de modifier les règlements de l'Assemblée nationale pour empêcher qu'une telle situation ne se reproduise. Après la démission de Lucien Bouchard, Bernard Landry s'était fait un honneur de réhabiliter le citoyen Michaud. Au pouvoir jusqu'en 2003, le PQ a failli à la tâche de réparer cette erreur et d'agir pour qu'une telle situation ne se reproduise. Le PQ souhaitait l'unanimité des partis pour modifier les règlements de l'Assemblée nationale. Les libéraux n'étant pas d'accord, les règlements n'ont jamais été modifiés.
Alors que Pauline Marois ne cesse d'accuser Jean Charest de miner la confiance envers nos institutions publiques, est-ce que Pauline Marois est prête à poser un geste qui pourrait contribuer à redonner confiance en notre démocratie? Le 14 décembre 2010, 10 ans après l'infamie, Pauline Marois devrait se lever en chambre, et présenter une motion qui pourrait se lire ainsi: «L'Assemblée nationale présente ses excuses à l'endroit du citoyen Yves Michaud qui a été injustement blâmé par notre institution le 14 décembre 2000. L'Assemblée nationale réitère qu'elle se porte entièrement garante de la liberté d'expression telle que le prescrit la charte québécoise des droits et libertés. L'Assemblée nationale s'engage à modifier les règlements de l'Assemblée nationale pour éviter qu'une telle situation ne se reproduise.» Ainsi, si le PQ admet son erreur publiquement, beaucoup de personnes retrouveront confiance au PQ et réintègreront ce parti. Si les libéraux refusent d'adopter une telle motion, ils en porteront l'odieux dans l'Histoire. Pauline Marois pourrait alors s'engager à ce que cette motion soit adoptée aussitôt que le PQ reviendra au pouvoir. Elle en sortirait grandie et se démarquerait ainsi des libéraux
Je transmets à nouveau à M. Michaud tout mon appui et mon amitié. Je suis de tout coeur avec vous et sachez que vous êtes toujours pour les Québécois un témoignage vivant de liberté!
Louis-François Bélanger
Ancien président du PQ-Université Laval (2000-2002)
Personne ne suit Louis-François Bélanger. Soyez le premier!