Gouvernement minoritaire: l'attente a assez duré

L'idée fédérale



Mercredi sera le 2200e jour d'affilée pendant lequel le Canada a vécu sous un gouvernement minoritaire. Cette période surpassera l'ancien record représenté par les trois gouvernements minoritaires consécutifs que nous avions eus de 1962 à 1968.
Cependant, contrairement aux années Diefenbaker et Pearson, les six dernières années se soldent par un bilan plutôt mince. L'absence d'une majorité à Ottawa a bloqué le développement de politiques économiques majeures dont le Canada et le Québec ont grandement besoin en ce moment.
L'attente a assez duré. Il faut passer à l'action. Bien que la récession soit terminée, nous faisons toujours face à une myriade de développements et de défis économiques dans des domaines incontournables tels que le commerce international et interprovincial, l'énergie, la démographie et les finances publiques.
La conjoncture actuelle nécessite des initiatives visant à améliorer notre système fiscal, à augmenter notre productivité et à prendre la place qui nous revient au sein de l'économie mondiale du savoir. Sans compter les nouveaux attraits - et les risques - que représentent les exigences du développement durable.
Il est temps pour le Canada d'établir un véritable plan de match économique à long terme. Pourtant, jusqu'à présent, le gouvernement (et ses partenaires de «danse minoritaire», les partis de l'opposition) ne nous a livré que de la politique à courte vue. Nous méritons mieux que cela.
Les gouvernements minoritaires de Lester B. Pearson avaient livré la marchandise dans les années 60. Cela n'avait pas toujours été facile, mais ils avaient accouché de plusieurs réalisations importantes, comme les régimes de pension du Canada et du Québec, ainsi que le système national d'assurance santé. Au début de l'ère minoritaire, en 2004, plusieurs analystes s'étaient basés sur ces réalisations passées pour prédire que ce gouvernement minoritaire-ci serait lui aussi efficace. Six ans plus tard, ces analystes font probablement leur mea culpa.
Le groupe de députés qui siège présentement à la Chambre des communes fourmille probablement de bonnes idées de politiques économiques, mais toutes ces bonnes intentions demeurent pour l'instant sur la tablette en attendant une majorité parlementaire. D'ici là, nous devons nous contenter d'une sempiternelle gué-guerre politique.
Pendant ce temps, la déprime règne. Certains entrevoient même un scénario cauchemardesque où les parlements minoritaires se succéderaient sans fin. Ce n'est pas demain la veille que nous nous lancerons dans d'excitants projets de société.
Comment se sortir de cette situation? Pas question de lancer des élections: à peine 20 mois nous séparent de la dernière. Quant à la réallocation imminente des sièges à la Chambre des communes, elle pourrait brasser un peu la cage, mais n'aura lieu qu'après le recensement de 2011. Enfin, pour ce qui est d'un changement du mode de scrutin, cela prendrait encore plus de temps à aboutir à quelque chose. Aucune de ces options n'est la bonne, car c'est dès maintenant qu'il faut agir.
Il n'y a qu'une seule voie de sortie, et c'est la plus difficile?: il faut que nos politiciens mettent leurs intérêts politiques de côté et trouvent en eux-mêmes le courage de faire véritablement fonctionner ce parlement minoritaire, tout comme l'avaient fait leurs prédécesseurs des années 60.
Il est grand temps de faire redémarrer la machine à politiques économiques. Nous vivons des moments cruciaux et difficiles. Si nous demeurons en mode «pause» pendant que le reste de la planète est en mode «avance rapide», nous le regretterons certainement. La récession qui vient de se conclure aura, rétrospectivement, l'air d'un jeu d'enfant quand la suivante se pointera.
* L'auteur est économiste senior à la Canada West Foundation, un centre de recherche en politique publique situé à Calgary.

Squared

Jacques Marcil1 article

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économiste senior à la Canada West Foundation, un centre de recherche en politique publique situé à Calgary.





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