Lieu d’un des chapitres les plus dramatiques

Fort Sainte-Marie des Hurons

De l’histoire du peuple Wendat/Huron.

F4b55f0ab92cdad04431935978f58277

Chronique de Marie-Hélène Morot-Sir

Le « Huronic historical Parks » géré par un organisme anglophone de la province de l’Ontario, demeure un joyau du patrimoine français de la Nouvelle France.

En 1965 cette province décidant que le fort Sainte Marie pourrait devenir sa huitième attraction touristique, lance une reconstruction qui sera inaugurée en 1967, y compris toute une savante reconstitution à l’intérieur des bâtiments comprenant des récits historiques présentés succinctement, ainsi qu’un musée.

Les touristes affluent immédiatement, aidant largement, comme prévu initialement, à son économie. Un astrolabe, ayant peut-être appartenu à Samuel de Champlain avait été découvert en 1867, a été déposé dans ce musée. S’il était bien à Champlain, l’aurait-il perdu en descendant la rivière Outaouais en 1613 ?

Malgré cette reconstitution au but des plus touristiques ce site occupe une place importante dans la mémoire des francophones de l’Ontario et des descendants amérindiens.

Du 31 juillet au 2 août 2015 a eu lieu un festival à Penetanguishene, en Ontario, appelé « Rendez-vous Champlain » au cours duquel a eu lieu la commémoration du quatre centième anniversaire de la rencontre de Samuel de Champlain le 1er Août 1615 à Toanché, aujourd’hui Penetanguishene, avec le chef Wendat/Huron Aenon, une plaque commémorative a été dévoilée. De même dans le parc Rotary au centre de la ville une statue de quatre mètres de haut a été érigée pour illustrer cette éminente rencontre, entre Samuel de Champlain et le chef Wendat, une rencontre d’égal à égal, où le lieutenant du Roi en Nouvelle France, a salué le représentant d’un peuple autochtone, tel un véritable ambassadeur.

Des centaines de participants ont fait entendre la voix de la langue française lors de cette commémoration, revêtus des habits du temps de la Nouvelle France, des représentants amérindiens et du gouvernement français étaient présents au milieu des dignitaires de la Province.

« La culture française et son influence ont laissé une trace indélébile parmi les francophones de l’Ontario, la fierté et la résilience rehaussent la vie de tous les Ontariens en nous rattachant à notre essence canadienne originelle » cf. La Presse

L’histoire du Fort Sainte Marie des Hurons, haut lieu des missionnaires de la Nouvelle France :

En 1639, cela fait déjà plus de vingt ans que les missionnaires jésuites envoyés par leur supérieur œuvrent par leur apostolat au milieu des nombreuses tribus amérindiennes de la Nouvelle France, mais également chez les Wendat/Huron. Ils ont trouvé chez ce peuple un désir si important de connaître cette religion des Français, qu’ils y ont construit plusieurs missions dans leurs différents villages.

Au cours des années les Odinossonis (Iroquois) continuent malheureusement à agresser les Wendat, et on pourrait même dire que leur guerre s’amplifie, les cinq tribus Iroquoises font depuis des siècles, et cela bien avant l’arrivée des Français, une guerre sans merci à ce peuple.

Les Wendat étaient à l’origine apparentés aux Odinossonis, mais dans le passé, un différend les avait séparés à jamais, et cela a été d’autant plus irrémédiable lorsque les Cinq Cantons avaient créé une Constitution, la Gayanashogova, la grande loi qui lie, au 12ème siècle. Ils avaient alors tenté à cette occasion de faire revenir vers eux cette partie de leur famille dissidente, en leur envoyant des ambassadeurs, mais ces derniers avaient été jetés pour toute réponse, sans délicatesse aucune, eux et leurs canots, dans les rapides!

Certes les Odinossonis l’avaient très mal pris et depuis lors ils poursuivaient d’une haine implacable tout ce qui portait le nom de Wendat, les tuaient ou les faisaient prisonniers, brûlaient leurs villages les torturaient avec leur ignoble et savante cuisine. Depuis l’arrivée des Français ils ne cessaient d’essayer habilement de détacher ces derniers des Hurons comme cela a été observé de nombreuses fois.

Pour exemple cette proposition faite à Monsieur de Chamflour, successeur de M. de l’Isle, à Trois Rivières, à qui ils offraient de s’entendre avec eux, par l’intermédiaire d’un de leur prisonnier Français, François Marguerie.

Les pères missionnaires jésuites installés en Huronnie assistaient impuissants à ces attaques incessantes dont eux-mêmes étaient également victimes, torturés, mangés ou brûlés, dès qu’ils étaient également faits prisonniers !

C’est ainsi qu’à bout de forces et de fatigues, en 1639 les jésuites décident de construire un poste central, non seulement pour se protéger des attaques de plus en plus incessantes des Odinossonis contre les Hurons, mais en même temps pour avoir une mission bien implantée en plein centre du pays Wendat (Huron).

Le fort Sainte Marie va être construit, il sera fondé par le père Jérôme Lalemant et Jean de Brébeuf.

Ce sera aussi un endroit où les Pères se trouveront en réelle sécurité, un lieu où ils pourront se réconforter et récupérer un peu de forces et de santé, entre deux périodes d’évangélisation difficiles et plus que dangereuses, au milieu de certaines tribus hostiles …

L’emplacement choisi est situé dans une échancrure Sud-Est de la Baie Géorgienne, sur les rives du lac Huron, à l’embouchure de la petite rivière Isiaragui, juste à la sortie des marécages, la baie y offre un site majestueux, tout à fait magnifique, propice à la détente morale ou physique.

C’est une large bande de terre qui se trouve entre le lac Huron et la baie Georgienne, à plus de 1200 kilomètres de Québec !

Les jésuites commencent donc avec une grande diligence, les premières fondations du Fort Sainte Marie des Hurons. De nombreuses personnes travaillent à la construction de ce fort ainsi que certains « donnés » des Jésuites comme Médard Chouard des Groseilliers, ou Guillaume Couture. Lorsqu’ils ne sont pas occupés à être guides pour les pères, ils travaillent également comme charpentier à cette construction importante, pendant pratiquement tout l’hiver, peu importe le froid glacial, le givre et la neige de ce pays au climat si rude, la construction avance.

A l’automne 1639, les missionnaires ayant beaucoup moins de voyages à faire, du fait de la saison hivernale qui rendait plus difficiles et hasardeux les déplacements, les travaux de construction du fort Sainte Marie des Hurons, se poursuivent à un très bon rythme.

Une grande palissade de bois entoure quatre bastions de pierres, cela ressemble presque à un château fort, il y a même un pont levis permettant de se replier en toute urgence, en cas d’attaques des Odinossonis (Iroquoises). Petit à petit s’élèvent divers édifices, des logements, un local pour les soins hospitaliers, des ateliers ainsi qu’une petite chapelle pour le service religieux.

Cette petite chapelle, même aussi simple et succincte qu’elle était, apparaissait aux yeux des Wendats (Hurons) comme une vraie merveille propice au recueillement, et à l’expression de leur foi naissante. Peu à peu le fort Sainte Marie des Hurons se perfectionnera, un canal sera même creusé de main d’homme, puis une entrée secrète permettra discrètement le passage des embarcations, facilitant l’arrivée des canots jusqu’au centre même de l’habitation.

Ce lieu devint au cours des ans réellement agréable et très sécurisé, réunissant aussi le plus de services possibles afin que les personnes vivant là, puissent avoir tout ce dont elles avaient besoin. Ainsi un aqueduc de bois amenait l’eau potable, un potager avait été planté ainsi que des arbres fruitiers, ou encore une basse-cour permettait de nourrir les occupants qui se trouvaient assez souvent en nombre élevé, selon les différents passages, bien souvent entre trente et soixante personnes.

Les Pères Ragueneau, Le Mercier ainsi que Chastellain étaient affectés au fort en permanence, pour en organiser l’accueil, et en superviser toute la bonne marche, tandis que tous les autres Pères Jésuites allaient rejoindre leurs lieux d’apostolat.

Ces prêtres revenaient à intervalles réguliers afin de refaire leurs forces, autant d’ailleurs physiques que spirituelles dans ce lieu propice.

De nombreux Wendats (Hurons) y résideront également, tandis que d’autres encore y seront accueillis, soignés et aidés avec le plus grand dévouement et la plus grande abnégation durant dix ans.

La Nouvelle France en 1649 ne compte guère plus de quatre cents Français.

Les Odinossonis étant restés presque dix mois tranquilles, les Hurons oublient encore une fois qu’ils avaient à faire à un ennemi contre lequel ils ne devaient cesser de se méfier, mais c’était leur tempérament de s’endormir de la sorte, et de ne jamais rester sur leurs gardes.

Un jour, un parti de plus de mille Iroquois déboula avant le jour sur la bourgade de Saint Ignace le 16 mars 1649, il s’y trouvait à grand peine quatre cents personnes principalement des femmes et des enfants, mais comme il n’y avait pas de surveillance il leur fut facile de mettre le feu à la palissade, et d’égorger ceux qui étaient encore dans leur sommeil.

Trois hommes réussirent à s’échapper, ils allèrent en courant jusqu’à la mission la plus proche qui était Saint Louis, afin de donner l’alarme.

Par deux fois, ils arrivèrent à repousser vaillamment l’ennemi, mais croulant sous le nombre ce fut alors un carnage. Le Père Jean de Brébeuf et le Père Gabriel Lalemant, ce dernier était le jeune neveu du Père Jérôme Lalemant, baptisaient les mourants au milieu de ce massacre affreux et encourageaient autant qu’ils le pouvaient les combattants. Malheureusement, tous les Hurons de ce village furent soit tués soit faits prisonniers et les deux missionnaires furent pris les derniers.

Après avoir mis le feu aux cabanes et s’être emparés de toutes les provisions et de toutes les choses importantes qu’ils pouvaient s’approprier, les Odinossonis reprirent avec leurs prisonniers le chemin de leur pays.

Sainte Marie des Hurons était toujours peuplée de quelques Français qui y demeuraient avec un missionnaire, et on y avait toujours fait assez bonne garde. Le lendemain du drame de Saint Ignace, le 17 mars on vit s’approcher plus de deux cents Iroquois qui s’étant un peu trop avancés, étant un peu trop sûrs d’eux, tombèrent dans une embuscade, mais ensuite après l’attaque qui en laissa un grand nombre à terre, les Wendats (Hurons) poursuivirent le reste jusqu’à Saint Louis, où le gros du parti s’était cantonné avec plus de sept cents hommes. Ce grand nombre surprit les Hurons qui ne s’y attendaient pas, mais sans se décourager ils se battirent tout le jour, sans aucun moyen d’échapper à cause de l’inégalité du nombre. Pourtant longtemps l’avantage resta du côté des Hurons, mais accablés de fatigue, réduits à une poignée d’hommes, ils furent en définitive tous faits prisonniers !

La consternation envahit Sainte Marie en apprenant la défaite, tous ces Hurons étaient tout ce qu’il y avait « de plus braves dans la Nation. »

Le Père Jean de Brébeuf et le très jeune Gabriel Lalemant qui avaient été faits prisonniers précédemment vont subir les plus terribles tortures, tortures affreuses, et raffinées comme seuls ces Amérindiens-là savaient les pratiquer. Ces deux pères les supportèrent avec un courage et une foi tels qu’ils méritent tout notre respect et notre plus grande considération, mais néanmoins si nous passons rapidement sur les détails particulièrement odieux, il ne faut pas oublier, lorsque ces horreurs prendront fin, que cela ne se terminera que par leur trop sinistre mort...

Le 21 mars suivant le Père Ragueneau retrouvera leurs pauvres restes et présidera aux tristes funérailles. Il fait déposer leurs corps sous la chapelle du fort Sainte Marie et il place dans la tombe du Père Jean de Brébeuf une plaque de plomb, où sont inscrits le nom du missionnaire et la date de sa mort, de la main des Iroquois.

Cette plaque a été retrouvée lors des travaux de reconstruction de Sainte Marie entrepris en 1965.

Après ce douloureux et bien accablant devoir accompli, le Père Ragueneau qui est à cette époque le supérieur des Missions de la Huronnie, accédant au désir des Wendat (Hurons), va alors devoir prendre une importante décision.

Après tous ces difficiles évènements il est certain que les Hurons commencèrent à se désespérer, ils ne voulurent plus rester dans des lieux si dangereux, ce qui fait qu’en moins de huit jours toutes les bourgades des environs de Sainte Marie se vidèrent, les habitants mettant même le feu à leurs propres habitations avant de s’en aller. Ils se réfugièrent soit au plus profond des forêts, soit encore chez des peuples voisins compréhensifs et accueillants. Cette exode massive avait terriblement attristé les missionnaires, alors ils prirent la décision de rassembler les restes éparpillés de cette pauvre Nation, en un endroit en effet aussi éloigné que possible des Odinossonis (Iroquois), pour qu’ils puissent vivre enfin en paix, sans avoir à craindre d’être à nouveau inquiétés par leurs ennemis, qui ne voulaient et ne visaient réellement que leur extermination la plus totale, et cela d’autant plus facilement, que les Wendat (Hurons) n’étaient plus en état de résister à quoique ce soit, après la mort et la capture de tant et tant de leurs plus valeureux guerriers…

En effet il ne restait plus environ qu’une centaine de Hurons qui avaient par miracle échappé soit à la mort, soit à la capture ou à la fuite. Cette situation paraissait intenable autant pour les Français qui se trouvaient en Huronnie, que pour les Hurons eux-mêmes, les plus vindicatifs des Odinossonis/Iroquois étant plus que jamais sur le chemin de la guerre.

Les missionnaires leur proposent d’aller s’installer sur l’île de Manitoualin située dans la partie septentrionale du lac Huron, mais leur préférence se porte plutôt sur l’île Saint Joseph où ils installent aussitôt une centaine de cabanes, les unes de huit, les autres de dix feux. Certains se rendent sur la côte pour la chasse et la pêche, ce qui fit que l’été se passa malgré tout tranquillement jusqu’à l’automne, permettant à ce peuple traumatisé de reprendre un peu confiance.

La décision de quitter le fort de Sainte Marie des Hurons fut également prise. Pourtant une décision plus cruelle encore cette fois s’imposa à tous, il fallait avant de partir de Sainte Marie ne rien laisser derrière soi, il fallait donc détruire ce que l’on avait mis dix ans de durs labeurs à construire, ce fort Sainte Marie, ce havre de paix si bien agencé, par tant et tant de personnes qui y avaient tellement travaillé, tant de gens qui s’étaient donné corps et âmes pour ce beau projet, tant et tant d’efforts réduits à néant :
« Il fallut abandonner cet endroit, que je puis appeler notre seconde patrie, de crainte que nos ennemis trop impies, profanassent ce lieu de sainteté et n’en prissent leur avantage, nous y mîmes nous-mêmes le feu, et en moins d’une heure nous vîmes brûler nos dix ans de travaux. » cf. la Relation du père Ragueneau.

C’était le 14 juin 1649.

Cependant les premiers mois de 1650 seront à nouveau bien funestes pour cette pauvre Nation déjà si affectée, pourtant ce pauvre peuple était presque à terre, après ce qu’il avait déjà subi les mois précédents, de la part de leurs terribles ennemis, qui l’avaient pratiquement entièrement anéanti ! En effet un an après la destruction du fort Sainte Marie des Hurons et le déménagement des rescapés sur l’île Saint Joseph, le petit groupe est à nouveau mal en point, malgré tous leurs efforts la nourriture est de plus en plus rare, les maladies font rage parmi les plus faibles, le dénuement est total, certains périssent de froid, ils se trouvent dans la détresse la plus extrême.

Pour ajouter encore à leur épouvantable situation ils apprennent que ceux d’entre eux qui avaient réussi à trouver un abri, soit au plus profond des forêts soit au milieu de tribus voisines accueillantes, où ils avaient pensé être en sécurité, des partis enragés Odinossonis les avaient retrouvés et un nouveau carnage insensé avait eu à nouveau lieu !

Ils ne doutèrent plus que les Odinossonis les retrouveraient sous peu et leur feraient sans aucun doute subir le même sort. Ils réunirent plusieurs Conseils, puis ils envoyèrent les plus considérables d’entre eux auprès du Père Ragueneau.

Le seul moyen d’empêcher la ruine totale et la disparition de leur peuple était que les missionnaires parviennent à réunir tout ce qu’il était encore possible des Wendat pour qu’ils se joignent à eux afin qu’ils les emmènent tous jusqu’à Québec, pour qu’ils y soient définitivement à l’abri du fort des Français, sous la protection de leur père Onontio, le gouverneur de la Nouvelle France..

Le père Ragueneau n’eut pas d’hésitation, ainsi le 10 juin 1650, après avoir rassemblé ceux qui désiraient se joindre à eux, ils partirent en direction de Québec, cela fut une longue et épuisante expédition à travers les lacs et les rivières comportant tant de rapides obligeant aux lourds et difficiles portages, avec plus de trois cents personnes, femmes, enfants et vieillards, sans oublier la crainte perpétuelle de rencontrer un parti Odinossonis agressif, qui pourrait surgir à n’importe quel endroit de ce long trajet, de plus de 1200 kms jusqu’à Québec.

Ils y parviendront enfin le 28 juillet 1650.

Les restes de cette pauvre Nation huronne seront accueillis par le gouverneur d’Ailleboust qui les installa sur l’île d’Orléans. De nombreuses personnes émues de leurs épreuves leur vinrent également en aide, même si les Français étaient peu aisés, cela leur permit de reprendre confiance et grâce à eux, ils subsistèrent et leur peuple survécu.

Plus tard les jésuites leur donneront des terres, soutenus par le père Chaumonot c’est à Lorette qu’ils replanteront solidement et définitivement pour les siècles à venir, les racines de leur Nation Wendat/Huronne.

Featured 9f80857c4f8cb8374a10579d275de8ea

Marie-Hélène Morot-Sir151 articles

  • 303 864

Auteur de livres historiques : 1608-2008 Quatre cents hivers, autant d’étés ; Le lys, la rose et la feuille d’érable ; Au cœur de la Nouvelle France - tome I - De Champlain à la grand paix de Montréal ; Au cœur de la Nouvelle France - tome II - Des bords du Saint Laurent au golfe du Mexique ; Au cœur de la Nouvelle France - tome III - Les Amérindiens, ce peuple libre autrefois, qu'est-il devenu? ; Le Canada de A à Z au temps de la Nouvelle France ; De lettres en lettres, année 1912 ; De lettres en lettres, année 1925 ; Un vent étranger souffla sur le Nistakinan août 2018. "Les Femmes à l'ombre del'Histoire" janvier 2020   lien vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=evnVbdtlyYA

 

 

 





Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé