Formation de la main-d’œuvre - La façon de faire du Québec fonctionne

Un rapport vient contredire Ottawa, qui veut changer les règles

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Comme toujours lorsqu'il s'agit du Québec, Ottawa est encore une fois « dans le champ »

Ottawa — Un rapport du ministère de l’Emploi du Québec indique que les fonds de formation versés aux provinces créent bel et bien de l’emploi et font épargner de surcroît des centaines de millions de dollars en assurance-emploi, contrairement à ce que prétend Ottawa.
Ottawa martèle, pour justifier les nouveaux paramètres imposés dans son budget de la semaine dernière, que les ententes sur le marché du travail conclues avec les provinces - qui venaient à échéance en 2014 - ne produisent pas les résultats souhaités, car les pénuries de main-d’oeuvre spécialisée perdurent au pays.
Mais Québec rétorque que la province rend des comptes chaque année au grand frère fédéral et que ses bilans en matière de création d’emplois ne sont plus à défendre.
Et son dernier rapport annuel pourrait bien donner raison au gouvernement de Pauline Marois de monter aux barricades en réponse aux changements dictés par Ottawa dans son budget.
En vertu de l’entente sur le marché du travail (EMT) que le gouvernement de Stephen Harper vient modifier, Québec reçoit 116 millions - d’une somme totale de 500 millions distribuée au pays - pour offrir de la formation à des chômeurs qui ne touchent pas d’assurance-emploi ou à des travailleurs sous-qualifiés.
Outre l’EMT, les provinces comptent aussi des ententes avec le fédéral sur le développement de la main-d’oeuvre (EDMT) - une enveloppe de 1,95 milliard à l’échelle canadienne, dont 589 millions pour le Québec. Le gouvernement Harper a averti que celle-ci aussi serait revue d’ici deux ans, pour les mêmes raisons que celles alléguées pour modifier l’EMT.
Or, le dernier rapport annuel du ministère de l’Emploi du Québec indique que les fonds de l’EDMT permettent en effet à des travailleurs de trouver un nouvel emploi. En 2011-2012, parmi ceux qui ont eu recours aux services publics d’aide à l’emploi, 49,3 % ont trouvé un travail. Chez les prestataires de l’aide sociale, ils étaient 40,5 % à avoir réussi à obtenir un emploi après avoir eu recours aux formations dispensées par Québec.
Puisqu’il y a eu cette année-là une « amélioration de l’état du marché du travail du Québec […], les services publics d’emploi ont aidé moins de personnes par l’entremise des services spécialisés qu’au cours des deux années précédentes », note le compte rendu annuel.
Reste que 140 006 Québécois ont trouvé un emploi après avoir profité des services de spécialisation, sur 277 795 qui y ont fait appel. De ce nombre de nouveaux salariés, 52 865 étaient prestataires de l’assurance-emploi. Résultat, 219,4 millions ont été épargnés en prestations de chômage qui n’ont pas eu à être versées au Québec cette année-là.
Qui plus est, 11 712 entreprises ont été aidées par les services publics d’emploi.
« De toute évidence, le Parti conservateur a décidé de s’en prendre au modèle québécois, dans le non-respect des compétences du Québec. Il s’improvise des compétences où il n’a aucune expertise », a scandé vendredi dernier le ministre québécois des Affaires intergouvernementales Alexandre Cloutier, dont le gouvernement a promis qu’il refuserait d’adhérer à la nouvelle formule conservatrice. Et l’indignation du gouvernement péquiste est partagée par le Parti libéral et la Coalition avenir Québec.
Mais le ministre fédéral des Finances Jim Flaherty martelait la semaine dernière qu’il faut « jumeler les besoins des employeurs avec la formation que reçoivent les Canadiens ». « C’est beau, la formation, mais il faut que ça aboutisse », avait renchéri son collègue Christian Paradis.

69,6 millions en moins
La réforme conservatrice prévoit que 60 % des sommes versées par Ottawa en vertu de l’entente sur le marché du travail seront à l’avenir remises directement aux travailleurs, sous forme de « subvention canadienne pour l’emploi », laquelle devra être égalée par l’employeur et la province. Dans le cas de Québec, le gouvernement provincial recevrait donc 69,6 millions en moins (des 116 millions que la province touchait annuellement), et devrait de surcroît verser cette même somme pour que ses travailleurs puissent bénéficier d’une bourse de formation.
L’an dernier, 116 000 personnes ont fait appel aux mesures de formation et de préparation à l’emploi financées à 84 % par des fonds de l’EMT versés à Québec, a précisé la ministre de l’Emploi Agnès Maltais vendredi. Le ministère de l’Emploi du Québec n’a cependant pas de statistiques sur le taux de réussite de l’EMT, car « les mesures d’employabilité pour ces clientèles sont financées par l’EMT, mais également par le Fonds québécois ». Mais l’EMT « représente une bonne part de financement pour ces mesures », a-t-on indiqué au bureau de la ministre Maltais.
Dans son budget, Ottawa a en outre prévenu qu’il viendrait modifier aussi l’EDMT d’ici deux ans, pour y imposer une formule semblable à celle imposée aux EMT. Le Québec est, avec l’Ontario, parmi les plus gros bénéficiaires de ces deux accords fédéraux-provinciaux.
« C’est leur approche, tout le temps, d’arriver puis de dire “ça ne fonctionne pas, nous, on sait comment faire. Ottawa knows best, puis on va venir arranger tout ça”», a scandé André Bellavance. Le bloquiste a accusé le gouvernement Harper d’« imposer sa façon de faire, ce qui est totalement inacceptable », car comme ses collègues de l’opposition, il aurait souhaité qu’Ottawa discute avec les provinces avant d’imposer ses changements.
Certaines provinces auraient été consultées par Ottawa, ont indiqué des conservateurs la semaine dernière, mais pas le Québec.


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