Explosion de plaintes sur la qualité du français à l'Office

L’Office québécois de la langue française n’a jamais reçu autant de griefs en 10 ans

De nombreuses plaintes, mais peu d’amendes

Le nombre de plaintes pour le non-respect de la langue française a battu un record des 10 dernières années, dépassant les 5000.

«En 10 ans, jamais les citoyens et les citoyennes n’avaient manifesté autant d’inquiétudes quant au respect de leurs droits linguistiques», lit-on dans un document de l’Office québécois de la langue française obtenu par Le Journal.

Ce sont des données préliminaires d’un rapport qui sera publié après l’exercice 2021-2022, qui se termine en mars.

Un record avait été atteint l’an passé, où 4326 Québécois s’étaient plaints à l’organisme qui s’occupe de faire respecter la Charte de la langue française. En date du 30 janvier, c’est 5432 personnes qui ont déposé un grief, un bond de plus de 1000 qui va encore augmenter d’ici deux mois.

«C’est assez impressionnant, le saut de plaintes qu’il y a eu», remarque Frédéric Lacroix, essayiste qui a écrit deux ouvrages sur le français au Québec.

La proportion des griefs pour avoir été incapable d’être servi en français est passée de 25 % à 31 % en un an. C’est encore dans la région de Montréal que la plupart des récriminations (79 %) sont soumises.

Exprimer son ras-le-bol

Le peintre Maxime Courval, qui soumet des plaintes à l’OQLF depuis des décennies, affirme être à l’origine d’une quinzaine de plaintes cette année, principalement pour des entorses à la loi 101 sur des sites web.

«[Faire des plaintes à propos du français], c’est pour diminuer mon sentiment de révolte», fait savoir cet artiste retraité de 80 ans de Saint-Léonard.

Il déplore que personne ne soit impressionné par une plainte à l’OQLF. En 2021, seulement six amendes ont été données.

De son côté, Ginette Raymond, de Lachine, observe un recul de l’utilisation du français dans sa ville. Elle s’est plainte trois fois l’an dernier. Elle partage le même sentiment que M. Courval sur l’efficacité de l’organisme.

«lls donnent trop de chances aux commerces et ceux-ci le savent», croit-elle.

«Le déclin du français se remarque partout et il est urgent d’agir, après plusieurs décennies d’attente», a réagi le cabinet du ministre responsable de la Langue française, Simon Jolin-Barrette.

Le projet de loi 96 du gouvernement, qui doit être adopté ce printemps, prévoit entre autres de donner à l’OQLF un pouvoir d’ordonnance qui fait exiger qu’une entreprise se conforme à la loi.

Pour Frédéric Lacroix, la hausse constante du nombre de plaintes montre que la population «n’a pas capitulé» devant le recul du français.

Il voit une corrélation entre le nombre de récriminations et d’autres dynamiques, dont la baisse du poids démographique des francophones à Montréal et la hausse du nombre d’étudiants internationaux dont la majorité ne parle pas français.