Des hommes qui ont perdu le nord

Révolution - le retour d'une grande oubliée



Nous avons tous, heureux citoyens, que nous le voulions ou pas, deux premiers ministres, un à Ottawa et l'autre à Québec. Leur rôle, essentiellement, est de veiller à la bonne administration de nos affaires, de veiller sur notre sécurité et de faire en sorte que la vie de la collectivité se déroule sans trop de heurts. Il faut aussi veiller au bon fonctionnement du quotidien, faire des routes, des ponts, des écoles, et s'assurer de ne pas trahir la confiance que le peuple a mise en nous. La confiance est la clé de tout.
Le danger, c'est que le pouvoir transforme les dirigeants. Ils finissent par penser qu'ils sont les seuls à avoir les bonnes réponses à tout et ils n'aiment pas devoir rendre des comptes. Ils voudraient qu'on les suive les yeux fermés, béats d'admiration, en répétant à qui veut l'entendre quelle chance on a de les avoir.
Au nom du Québec et des Québécois que nous sommes, Jean Charest s'apprête à vendre les deux tiers des terres du nord de ce pays à des gens qui vont vider le sous-sol de toutes ses richesses: de l'or, de l'argent, et tout le reste que nous possédons en quantité importante paraît-il. Son Plan Nord nous pend au bout du nez.
Pour en dévoiler quelques détails, il a réuni une vingtaine de privilégiés, sur invitation et à huis clos, plutôt que de convoquer ses propres citoyens, les vrais propriétaires de ces trésors dont il parle, pour leur expliquer où il veut les emmener. Connaissant Jean Charest, on peut se demander s'il ne préfère pas attendre de nous mettre devant un fait accompli, quand il sera trop tard pour que les citoyens puissent intervenir et que les dommages seront probablement irrécupérables.
Je cherche à comprendre comment un homme, un premier ministre qui dispose de seulement 13 % d'appui dans la population, peut se lancer dans une telle entreprise en pensant que ça va passer comme une lettre à la poste. Son fameux Plan Nord n'a jamais reçu l'aval de la population du Québec, il n'en a jamais parlé durant la dernière campagne électorale non plus. Donc, on doit conclure qu'il n'a pas de mandat pour agir dans ce dossier. Comme en plus, on a pu juger de sa formidable incompétence dans l'affaire des gaz de schiste, on peut penser qu'il faudra quelqu'un de plus qualifié pour envisager le développement du Grand Nord, lequel mérite mieux que le projet de forage généralisé qui est sur la table pour le moment.
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À Ottawa, c'est autre chose. Nous sommes en pleine campagne électorale et le premier ministre sortant, qui entend bien se succéder à lui-même, patauge dans le mensonge gros comme une montagne. Son nez allonge chaque fois qu'il ouvre la bouche.
Je ne sais rien de l'enfance de Stephen Harper, mais j'imagine qu'il a dû être un enfant privé de jouets, car comme premier ministre, son gouvernement ressemble terriblement à un Toys R Us. C'est sans doute son vieux fond de cowboy de l'Ouest qui le fait «triper» sur les revolvers et les fusils. Il a un attachement démesuré aux armes à feu. Il veut construire des prisons pour y mettre tous les criminels qu'il va capturer, jeunes et vieux, dans l'intention de leur mettre du plomb dans la tête... Il vient de se commander des avions de guerre pour 30 milliards de dollars, sans appel d'offres. Des avions que nous allons payer, qu'importe le prix, et dont nous avons le droit de nous demander quelle part des 30 milliards ira dans des poches inconnues qui vont collecter de petits profits au passage... Je vous rappelle que ça s'est déjà vu... Souvenez-vous d'un certain Karlheinz Schreiber... 30 milliards, ce n'est pas des pinottes.
Et pendant ce temps-là, le pont Champlain peut bien rendre l'âme. Ce n'est pas la perte de quelques vies québécoises qui va empêcher M. Harper de dormir sur ses deux oreilles.
La folie du pouvoir, c'est ça. Quand des hommes élus par leurs concitoyens pour veiller au grain s'emballent comme de vieux moteurs et font dérailler toute une société en oubliant le rôle de «bon père de famille» qu'ils se sont engagés à respecter. C'est un comportement qu'on découvre la plupart du temps chez des politiciens qui sont au bout du rouleau et qui refusent de céder la place. Ils finissent par se convaincre qu'ils sont les seuls à savoir ce qui est bon pour ces peuples qu'ils écrasent en prétendant vouloir leur bien. Ça devient alors évident qu'ils ont perdu le nord.


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