Des arguments à réfuter plutôt qu'à censurer

Laïcité — débat québécois

J'aimerais bien qu'on bannisse par des lois tous les symboles de l'oppression. Et pas seulement les symboles, mais aussi toutes les manifestations de l'oppression elles-mêmes. Mais il y a encore loin de la coupe aux lèvres. Le processus de discrimination positive, par exemple, est parfaitement légal mais il est encore décrié, par certains hommes peu solidaires, comme une injustice à leur égard. Il est maintenu dans son application parce que cette «discrimination» a été validée par des juges. Comme le droit à la liberté de conscience.
Dans certains villages et villes du Québec, on interdit de mendier pour fermer les yeux sur la pauvreté. Elle serait indigne de publicité, de manifestation publique et elle autoriserait le harcèlement des honnêtes citoyens. Pour ce qui est du harcèlement, c'est plutôt la police qui s'en prend aux pauvres... grâce à la loi.
Faut-il vraiment bannir le voile et limiter ainsi l'embauche dans la fonction publique aux femmes blanches et occidentales, parce qu'y voir des femmes avec des convictions religieuses, des femmes voilées surtout, équivaudrait à nier la laïcité de l'État? Cela me fait douter de la capacité des défenseurs de la laïcité de voir des fonctionnaires seulement évoquer leurs croyances... pendant la pause, par exemple. Je trouve que cette façon d'encadrer et de défendre le devoir de réserve est une atteinte au droit à la liberté de conscience. Et à l'intégration librement consentie. On fait encore de loi vertu. [...]
Et comment résoudre le conflit entre une charte de la laïcité et une authentique, et sans doute première, charte des droits? La résolution de ce conflit aboutira-t-elle à un appel aux chartes de 1948 devant l'ONU? Les risques seraient grands de voir prévaloir la liberté de conscience.
Rythme à respecter
Dans le passé, on a invoqué bien des absurdités pour nier le droit des femmes au travail parce qu'elles y trouvaient le moyen d'une libératrice indépendance de leur pourvoyeur de mari quand elles en venaient au divorce. Et encore, dans ce monde du travail, elles n'arrivaient prétendument qu'avec les compétences vouées à l'entretien ménager, et on croyait que leur rôle de reproductrice allait y être perverti. Il a fallu, ô scandale, les instruire, leur donner accès à l'université, aux métiers non traditionnels comme au salariat en général. Le pouvoir patriarcal ne s'en est jamais remis. Il n'en est d'ailleurs pas sorti indemne aux yeux des masculinistes.
Ont été mis en place une foule de moyens pour l'autonomie des femmes, comme les garderies ou les moyens de contrôler les naissances. Ce qui a heurté bien des convictions antilaïques chez les religieux, qui y voyaient un dévoiement de leur fonction de mère.
Pourquoi donc nier aux femmes voilées (puisqu'elles s'y exposeraient avec les moyens matériels de le réaliser jusqu'au bout) un processus d'émancipation aux côtés de leurs autres soeurs salariées? Une laïcité forcée les y introduirait sans doute, mais pourquoi ne pas respecter le rythme avec lequel elles voudront bien y adhérer?
Je saisis mal la relation de sororité, dans cette exigence de la coercition légale, qui jusqu'à ce jour en appelait à la liberté de choix sur bien d'autres pistes de libération, comme celle de la contraception et son ultime moyen, l'avortement.
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Guy Roy - Lévis


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