Des anglos aux Inuits, l'onde de choc

La promulgation de la loi 101 ne s'est pas faite sans heurts.

Loi 101 - 30e anniversaire - Adoption de la loi 101


Louise Leduc - Les Inuits ont menacé de faire sécession. La compagnie d'assurances Sun Life a déménagé son siège social en 1978. Dans un reportage, le réseau anglais de Radio-Canada observait que, désormais, le simple fait de commander une tasse de café dans un restaurant devenait un geste politique. Et a-t-on idée d'exiger du delicatessen Chez Schwartz's qu'il se prive de son «s»?



La promulgation de la loi 101 ne s'est pas faite sans heurts. «Pour la communauté anglophone, ç'a été tout un choc, évoque l'avocat Brent Tyler. Ç'a été l'un des facteurs qui ont provoqué le départ de plusieurs.»
Les anglophones en ont été très remués, les Inuits aussi. Quelques jours après la promulgation de la loi, Camille Laurin a dépêché un représentant personnel à Fort Chimo afin de faire savoir que la Charte de la langue française ne menaçait en rien la langue inuite. «Un leader des Inuits, Charlie Watt, a dit qu'il n'en croyait rien et il a de nouveau exigé le départ de Fort Chimo de tous les fonctionnaires et policiers québécois qui s'y trouvent», pouvait-on lire dans La Presse du 29 août 1977.
Prenant aussi le bâton de pèlerin, René Lévesque - qui n'a jamais caché combien il regrettait de devoir légiférer sur le français - s'est employé à convaincre la communauté d'affaires que la loi 101 n'entraînerait pas le Québec dans une déroute économique.
Il n'a pas convaincu pas tout le monde.
«Il est évident que l'économie québécoise prendra un certain retard par rapport au reste du Canada aussi longtemps que l'environnement restera hostile au monde des affaires», a déclaré en mars 1978 Kenneth White, alors président du conseil du Royal Trust.
«La langue de travail au CP sera toujours l'anglais, a dit pour sa part le 6 mars 1978 Ian St. Clair, président du Canadian Pacific (...). Nous sommes une société transcontinentale et nous ne pouvons pas conduire nos affaires en français.»
La Ligue nationale de hockey, elle, a songé un temps à déménager ses bureaux à l'extérieur du Québec. «Comme toutes les entreprises, nous avons étudié la question. (...) Pour l'instant, nous ne bougerons pas. Mais si les choses venaient à changer, politiquement, nous réétudierions la situation», confiait un gouverneur de la LNH cité sous le couvert de l'anonymat dans The Gazette, en février 1978.
Partisane du libre choix en matière d'éducation et de langue, l'influente Joan Dougherty, qui était présidente de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, déplorait aussi la promulgation de la loi 101. Elle n'en jugeait pas moins que le français devait être «la langue commune au Québec» et plaidait déjà, bien avant la loi 101, pour que les jeunes anglophones l'apprennent. «Je ne sais pas si les enfants ont compris le message, mais ils le saisissent sûrement quand ils se cherchent un job. Rares sont les emplois aujourd'hui qui n'exigent pas la maîtrise du français», disait-elle dans The Gazette, en septembre 1977.


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