De Mossoul à Damas, une route pavée de propagande

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La guerre de l'information roule à plein régime

Plutôt que dénoncer, pour la énième fois, une manipulation scandaleuse, je me propose de vous donner quelques outils qui devraient permettre à chacun de reconnaître la propagande, quand il en voit, et ainsi préserver sa capacité d’analyse et son esprit critique, parce que la propagande la plus perverse est celle qu’on n’identifie pas comme telle.



Information ou propagande ?


Tout d’abord, nous parlons d’un conflit, une guerre civile qui dure maintenant depuis 7 ans en Syrie. Dans une guerre, il y a toujours deux camps qui se font face, la question étant de savoir comment nous nous plaçons au regard des belligérants. Sommes-nous neutres ? Certainement pas, d’ailleurs l’occident, au travers de la coalition de bric et de broc qui n’est rien d’autre qu’une colonne de supplétifs de l’armée étazunienne, prend régulièrement part aux combats, supposément contre l’État Islamique...


Vous l’aurez remarqué au passage, il n’est aucun conflit régional dans le monde dans lequel nos médias ne prendraient pas fait et cause pour l’un ou l’autre camp. Ainsi, en Birmanie, vous avez les gentils Rohingyas qui se font massacrer par les méchants militaires birmans, les gentils Kurdes syriens qui se font massacrer par les méchants voisins turcs, et les méchants terroristes-séparatistes du Donbass qui cherchent à tout prix à faire sécession en Ukraine face aux gentils nationalistes ukrainiens, tellement si peu nazis.


Et nous voyons là le premier signe qui montre infailliblement qu’on a affaire à de la propagande et non plus à de l’information : en effet, c’est la totalité de la presse mainstream, qui, dans un parfait unisson, nous sert la version officielle, nous désigne les gentils et les méchants. Vous n’y trouverez pas la plus petite trace d’analyse critique, d’opinions ne serait-ce que nuancées. Vous êtes prié de manger le brouet qu’on vous sert, point.


Ainsi, pour un aléppin, se trouver à l’Ouest ou à l’Est de la ligne de front faisait automatiquement de lui un suppôt de Bachar ou une victime des bombardements de Bachar. Et on voit là un autre trait caractéristique de la propagande : tout est ramené à la seule responsabilité de celui qu’on a désigné comme étant le méchant, et tous les autres belligérants sont présentés comme étant des victimes.


La situation actuelle dans la Ghouta orientale ne fait pas exception à la règle : les combattants armés sont assimilés à la population civile au sein de laquelle ils s’abritent, et l’ensemble est présenté comme une population victime de la folie meurtrière du « régime ». Un peu facile, non ? Et personne, bien sûr, ne mentionnera que chaque jour, Damas est aveuglément pilonnée par des tirs de mortier extrêmement meurtriers à partir des positions rebelles.


Deux poids, deux mesures


Si belle que soit la narration, si riche que soit la propagande, elle finit inévitablement par s’empêtrer dans ses contradictions, par la force des choses. Ainsi, on pourrait mettre en parallèle la situation actuelle dans la Ghouta orientale avec la situation à Mossoul au moment de l’offensive menée par la coalition et les forces irakiennes au sol.


À Mossoul comme dans la banlieue Est de Damas, nous avions des « rebelles », qui pour le coup, étaient désignés comme ennemis, qui s’abritaient derrière la population civile (660.000 habitants). Les combats ont été extrêmement meurtriers, la ville a été pilonnée jour et nuit par l’artillerie et les bombardements de la coalition, et l’on évoque le chiffre de près de 10.000 victimes, dont des milliers de civils : femmes, enfants, vieillards. Où étaient nos médias pour dénoncer le massacre qui était en cours ?


« Rien ne justifie l’ouverture d’une information judiciaire »


Le 17 mars 2017, plus de deux cents civils étaient tués en une seule frappe réalisée par des F-16 de la force aérienne belge sur Al-Jadidah. Vous aurez noté qu’en pareil cas, on parle toujours de bilan « qui ne peut pas être vérifié de source indépendante ». Une une enquête préliminaire sur deux « incidents potentiels » a bien été ouverte par le parquet fédéral, mais le jour même, nous apprenions par la même source (RTBF), que « Rien ne justifie l’ouverture d’une information judiciaire ». On a eu chaud !



Les Irakiens, jamais en peine quand il s’agit de dédouaner les copains, avaient, quant à eux, conclu « que l’explosion avait en fait été causée par la détonation d’un camion chargé d’explosifs aux mains du groupe djihadiste Daech et non par une frappe directe d’avions de la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis ». Information relayée non pas par « les Irakiens », d’ailleurs, mais bien directement par le Pentagone.



Donc, on vous explique que les F-16 étaient chargés avec des bombes à bisous, et que l’une d’entre elles a malencontreusement tapé dans un camion bourré d’explosifs : salauds de terroristes ! Je me demande si le petit crabe qui a liquidé une cinquantaine de familles au grand complet d’une simple pression du pouce dort encore bien la nuit, et qu’est-ce que ça lui fait quand il se regarde dans la glace, le matin ?



Donc, quand c’est la coalition qui pilonne une ville majoritairement occupée par des civils innocents, c’est un combat juste pour les libérer de l’oppression, et les victimes sont forcément toutes du fait des méchants rebelles, quand ce ne sont pas des « victimes collatérales » dont le nombre « ne peut pas être vérifié de source indépendante » (comprenez : OSEF).



Et en bonne logique, quand c’est l’armée arabe syrienne qui combat ces mêmes terroristes dans la banlieue de Damas, ceux-ci deviennent automatiquement des victimes du régime, et les habitants, une « population martyr ». C’est quand même étrange lorsqu’on sait que ces mêmes rebelles pourraient parfaitement déposer les armes ou tout simplement s’en aller avec, comme ç’avait été le cas à Alep ? C’est d’ailleurs comme ça que cela se terminera une fois de plus, au grand dam des Étazuniens qui voient leur zone d’influence grignotée de toutes parts.