De la complaisance et de la censure des médias face à l’islam (deuxième partie)

Pour éloigner l'épée de Damoclès


Gérard Biard, rédacteur en chef de «Charlie... by liberation
C’était donc vrai alors, les journalistes de Charlie Hebdo étaient réellement menacés? Ces grands rêveurs pas naïfs pour un sou, lucides somme si peu d’entre nous savent l’être, vivaient avec cette épée de Damoclès, la mort, au-dessus de leurs têtes.
Tiens, donc.
En réalité, la boucherie de mercredi dernier est l’étape ultime d’un long processus. Parce qu’il faut bien le rappeler, avant le 7 janvier 2015, il y a eu les procès, la destruction des locaux, les accusations d’islamophobie et de racisme et l’appel à l’autodafé de quelques rappeurs. Puis, la mort a frappé en plein cœur de Paris, sur le Boulevard Richard-Lenoir. L’islamo-fascisme est terrifiant, certes. Mais l’antichambre de l’islamo-fascisme l’est tout autant. Du moins, pour ceux qui observent le monde sans voile. Nos amuseurs avaient la couenne dure. Surtout qu’il a fallu, pendant toutes ces années, apprendre à vivre avec le mépris et l’indifférence d’une classe médiatique et d’une élite intellectuelle qui les regardaient un peu de haut et se bouchaient le nez, à chaque parution.
Soyez responsables, les gars!
Ces journalistes et ces intellectuels évoquent souvent la « responsabilité » pour éviter de traiter des sujets qui fâchent. Leur argumentaire est toujours le même et se résume à la dualité entre «l’huile et le feu». Ils voient toujours le problème du côté de l’huile – la liberté -, jamais du côté du feu – les tueurs. Rappelons que c’est au nom de cette soi-disant « responsabilité » que nos médias québécois n’avaient pas jugé bon de publier les caricatures danoises de Mahomet en 2006, à l’exception du Devoir qui avait affiché, à l’époque, une posture un peu différente.
Pourtant tout commence, le 30 septembre 2005, avec cette série de douze caricatures danoises de Mahomet publiées par le quotidien Jyllands Posten, intitulée Les visages de Mahomet. Entre ceux qui sont favorables à leur publication et ceux qui s’y opposent, la grande famille journalistique se fracture. Nos visionnaires de Charlie avaient compris que si l’on commençait à céder des bouts de liberté ici et là, notre édifice démocratique en souffrirait. Alors, ils ont continué à nous faire rire. On riait souvent jaune. Mais on riait pareil. Et on riait aussi du prophète.
Charlie, cassé
Les islamistes épaulés par les communautaristes, les multiculturalistes, avec un sérieux coup de main des islamo-gauchistes, ceux qui, chez nous, ont trouvé une niche confortable à Québec solidaire et dans Les indigènes de République, en France, ont fini par imposer une chape de plomb au débat public à chaque fois qu’il était question de l’islam et des musulmans. Ce beau monde a exécuté Charlie Hébdo sur la place publique. René Char disait : « L’homme est capable de faire ce qu’il est incapable d’imaginer ». Il est même parfois capable de faire pire.
Charb et ses joyeux compagnons étaient de plus en plus seuls et isolés, chaque semaine et en première ligne pour défendre la liberté d’expression. Ils assumaient ce que les autres faisaient de moins en moins. Considérer l’islam comme n’importe quelle autre religion. Ils faisaient ce que les autres avaient renoncé de faire. Exercer leur métier jusqu’à la démesure. Ils étaient devenus par la force des choses la mauvaise conscience de cette presse dominante qui cédait, trop souvent, aux pressions des lobbies islamo-communautaristes et du « religieusement correcte » comme l’a formulé la philosophe Élisabeth Badinter.
Le courage seul ne suffisait plus à déjouer la menace, ni à renflouer les caisses.
La vérité, c’est qu’avec les années, Charlie était au bord du gouffre financier.
En novembre dernier, alors que je participais, à Paris, à une conférence internationale sur la laïcité aux côtés de Gérard Biard, le rédacteur en chef du journal, ce dernier a fait appel à la générosité des participants pour sauver son canard. Les gens ont gratté leur fond de poches mais ce n’était pas assez. Puis, quelqu’un s’est levé dans la salle pour traiter Charlie de raciste et d’islamophobe. Imperturbable, Gérard, répond calmement et rappelle les fondamentaux de son journal. Non, rire de l’islam, ce n’est pas du racisme! A la fin de la table ronde, on a échangé et il m’a répété ce que Charb m’a souvent dit : « Tu sais Djemila, on est habitués à ce type d’accusations. »
Un journaliste québécois victime des intégristes musulmans
Au Québec, Mihai Claudiu Cristea, journaliste d’origine roumaine, à la tête du journal Les immigrants de la Capital, a perdu son procès contre deux intégristes tunisiens sans que cela ne soulève l’indignation de ses confrères. Certes, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) a fini par se réveiller après sa condamnation. Mais il était trop tard. Les dés étaient pipés. Cristea était démoli et son journal brisé. La justice n’a pas voulu accepter de porter la cause en appel.
François Bourque, journaliste au Soleil, analyse les faits:

« Il n’y a rien de commun bien sûr entre ce procès, civilisé, et celui que des terroristes musulmans viennent de faire à Charlie Hebdo. Le procès des Briki ciblait la frontière entre vie privée et intérêt public. L’enjeu à Charlie Hebdo était plus fondamental: la liberté d’expression et, depuis mercredi, le droit à la vie. Le fil entre les deux est ténu. Il y a pourtant quelque chose qui me chicote. L’impression d’y trouver une volonté commune de réduire au silence ceux qui décrivent, commentent ou critiquent l’extrémisme musulman. Les moyens ne sont pas les mêmes, mais les réflexes se ressemblent. Laisser ce réflexe s’installer et grandir est un engrenage dangereux pour la liberté. Ici comme ailleurs. »

Une ère nouvelle vient de s’ouvrir et si l’on ne saisit pas cette occasion pour en finir avec la censure et l’autocensure des médias, j’ai bien peur que le divorce entre les peuples et les élites soit de plus en plus grand.
Nous avons bien vu de quel côté s’est rangé le peuple, dimanche dernier. Nous avons été témoin d’une incroyable mobilisation. Puisse-t-elle se poursuivre. Là, est mon principal souhait.


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