(Québec) Des patrons unilingues anglophones à la Caisse de dépôt et placement du Québec... À force de défendre mollement l'usage de la langue française, le Québec en arrive à un tel retour en arrière. Difficile de blâmer le gouvernement Harper parce qu'il nomme des unilingues anglophones à la Cour suprême du Canada et au poste de vérificateur général, quand nous faisons preuve d'un tel laxisme dans notre propre cour.
Espérons que la nouvelle publiée hier dans La Presse réveillera le gouvernement Charest et bon nombre de Québécois pour qui le français n'est pas menacé au Québec et n'exige pas une défense soutenue et vigilante. Une prise de conscience s'impose.
La symbolique est forte. Malgré les rendements décevants des dernières années, la Caisse de dépôt est néanmoins un objet de fierté pour les Québécois. La Caisse est l'institution qui a notamment permis aux francophones de prendre leurs affaires en main, de ne plus dépendre uniquement de l'argent, de l'expertise et du bon vouloir des Anglais.
Et qu'arrive-t-il 46 ans après la création de la Caisse et 34 ans après l'adoption de la loi 101? Des employés d'Ivanhoé Cambridge, filiale immobilière de la Caisse, doivent porter plainte à l'Office québécois de la langue française parce que des cadres supérieurs sont unilingues anglophones. Si bien que le français, qui devrait être la langue de travail au Québec, y compris dans les bureaux de la Caisse à Montréal, est détrôné au profit de l'anglais.
Une telle situation est intolérable. Il est aussi aberrant que des dirigeants francophones de la Caisse utilisent les mêmes arguments que ceux servis par Ottawa pour justifier l'embauche d'unilingues anglophones. La compétence et la volonté de la personne d'apprendre le français (et ce, même si elle vit depuis 11 ans à Montréal) devraient excuser l'entorse. Même si on sait pertinemment que de telles explications seraient irrecevables pour défendre un unilingue francophone ultracompétent.
Hier, le premier ministre a jugé la situation inacceptable. Pour Jean Charest, il va de soi que la Caisse doit fonctionner en français. Très bien. Mais, son gouvernement doit pousser plus loin la réflexion et se demander si la tiédeur avec laquelle il se porte à la défense de la langue française n'envoie pas le message que la connaissance et l'usage du français ne sont pas si importants que cela au Québec.
Les libéraux ont combattu avec peu de vigueur les écoles-passerelles qui permettent à certains parents d'acheter un droit à l'école anglophone publique pour leurs enfants qui normalement devraient fréquenter un établissement francophone.
Récemment, un relevé effectué dans la circonscription de l'Acadie indiquait que plus de 70 commerces contrevenaient à la loi sur l'affichage. Un portrait inquiétant puisqu'il s'agit de la circonscription de la ministre de la Culture et responsable de la Charte de la langue française, Christine St-Pierre.
La méthode douce prônée par celle-ci et par l'Office québécois de la langue française sème aussi le doute sur la volonté réelle du gouvernement de donner au français la place qui lui revient. Constatant une recrudescence du non-respect de l'affichage des marques de commerce en français, l'Office vient d'amorcer une campagne de sensibilisation de 600 000 $. Qui plus est, il aidera financièrement - jusqu'à concurrence de 50 000 $ - les entreprises qui accepteront de s'afficher en français. Cette approche serait plus gagnante que la répression. Dans combien de temps? La démonstration reste à faire.
En attendant, merci et bravo aux employés, sûrement bilingues, qui ont osé dénoncer l'unilinguisme de leurs patrons et l'anglicisation de la Caisse de dépôt et placement du Québec.
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