Le chef du Parti québécois, Pierre Karl Péladeau, ne s’en cache pas : le mariage qui l’unira à Julie Snyder samedi à Québec est « the talk of the town ». « Je ne suis pas complètement naïf, Julie et moi sommes des personnalités », lance-t-il, sourire en coin. Et toute cette attention médiatique, « je n’en suis pas responsable », insiste-t-il.
« Doit-on voir votre mariage comme un événement politique ? » lui lance un journaliste lors d’un impromptu de presse jeudi en marge de l’École d’été de l’Institut du Nouveau Monde (INM). « Certains veulent en faire un événement politique… peut-être “ oui ”, peut-être “ non ” », répond PKP du tac au tac.
Le chef péquiste profitera à tout le moins de la présence de cameramans et de photographes agglutinés devant l’entrée du Musée de l’Amérique francophone samedi après-midi pour « passer des messages ». Par exemple, il gagnera le Vieux-Québec monté sur un tandem — « un beau vélo Louis-Garneau » — en compagnie de son fils Thomas pour témoigner, dit-il, de son soutien à l’achat local, à l’activité physique et à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre (GES).
Après 15 ans de vie amoureuse, M. Péladeau épousera l’animatrice et productrice Julie Snyder samedi en fin d’après-midi, devant un parterre de quelque 400 personnes triées sur le volet. « On essaie de garder ça simple », a fait valoir Mme Snyder sur les ondes de Radio-Canada plus tôt cette semaine.
Pourtant, tous les membres du caucus du Parti québécois sauf deux assisteront aux festivités. Les anciens premiers ministres péquistes Pauline Marois et Bernard Landry seront également présents, de même que le chef bloquiste, Gilles Duceppe, le maire de Montréal, Denis Coderre, et le grand chef de Wendake, Konrad Sioui.
Les journalistes seront quant à eux tenus à l’écart de la chapelle du Musée de l’Amérique francophone. Il n’y aura pas de couverture de la cérémonie présidée par le maire de Québec, Régis Labeaume, en direct sur les réseaux d’information continue. Il n’y aura pas non plus de photographes du magazine 7 Jours, La Semaine, ou autre admis à l’intérieur du bâtiment historique. À peine quelques clichés seront distribués aux médias après la célébration.
« Polir son image »
Le mariage Péladeau-Snyder revêt un « intérêt politique certain », selon le professeur à l’ENAP Robert Bernier. Cette brève incursion dans la vie privée de la famille Péladeau-Snyder contribuera à coup sûr à « polir son image d’homme politique ». Celle-ci permettra de voir PKP comme « un bon père de famille » et non comme un « homme d’affaires intraitable, dur », indique le spécialiste en marketing politique.
S’il « peut contribuer à renforcer sa base électorale », son union conjugale avec l’animatrice aux 270 000 amis Facebook ne se traduira toutefois pas par un bond dans les intentions de vote du PQ, est persuadé M. Bernier.
Le politologue Christian Dufour est du même avis. La publication d’images du mariage risque de gonfler le capital de « sympathie », mais également le capital d’« aversion » à l’égard du célèbre couple, estime-t-il.
Le dévoilement de moments de la vie privée est « une arme à double tranchant » pour un homme ou une femme politique, avertit M. Dufour. « La politique, ce n’est pas juste des débats d’idées. » Selon lui, la présidence française « a perdu beaucoup de lustre » à la suite de la publication de nouvelles sur la vie sentimentale du locataire de l’Élysée, François Hollande, et de son prédécesseur Nicolas Sarkozy — celui-là même qui a officié le mariage de Pierre Karl Péladeau et Isabelle Hervet.
Les sondeurs pourraient assister à une « remontée » d’un ou deux points de M. Péladeau dans les intentions de vote, estime le professeur au Département de philosophie de l’Université de Montréal Michel Seymour. Cet événement « cosmétique de la politique » où le « caractère » et le « look » d’une personnalité politique sont mis à l’avant-scène, « ça a toujours joué, ça va toujours jouer », indique-t-il.
Cela dit, des « enjeux tellement plus grands » risquent d’« accaparer » l’attention de l’électorat québécois, comme celui du projet de pipeline Énergie Est de TransCanada. Par ailleurs, « on peut s’attendre à ce que dans trois ans, la question de la souveraineté soit un peu au centre des débats », souligne M. Seymour.
Snyder en avant-plan
Aux yeux de MM. Bernier, Dufour et Seymour, la « démone » Julie Snyder rompt avec le rôle traditionnellement dévolu aux conjoints de chef de parti politique au Québec. « Traditionnellement, les conjointes étaient à l’arrière-plan »,reléguées à des rôles de « potiche » ou de « tapisserie », note M. Dufour. Cela dit, les prises de position de Mme Snyder risquent désormais de « brouiller le message » du PQ, dirigé par son mari, voire de le plonger dans l’« embarras », poursuit l’observateur politique.
Julie Snyder ne se cantonne pas à un « rôle de femme effacée derrière l’homme », se réjouit le prof Seymour. « Elle est militante. Elle a du bagou. Elle a de l’audace. Elle a du chien. » Cette « figure ultramédiatique » constitue une force pour le PQ et plus largement le mouvement indépendantiste québécois, est-il convaincu. Elle peut mettre à profit sa popularité pour « convaincre bien des gens » de se joindre par exemple au mouvement indépendantiste.
« Bon, ce mariage-là m’indiffère royalement », conclut M. Seymour.
D’amour et de base électorale
Le mariage Péladeau-Snyder revêt un «intérêt politique certain», selon le professeur à l’ENAP Robert Bernier
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