NON, je ne voterai pas pour le PQ!

Considérations sur ceux qui font semblant de nous aimer

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Tribune libre

Avez-vous remarqué la phraséologie compliquée à laquelle doivent se livrer ceux qui veulent conjuguer identité nationale et Québécitude? Même notre champion [Mathieu Bock-Côté] le plus articulé doit déployer des trésors d’ingéniosité pour être à la hauteur de la tâche. Voyez un peu:


À l’extérieur de Montréal, on trouve une majorité historique francophone consciente de son érosion et de plus en plus hantée par son impuissance collective. Elle représente pourtant le cœur de la nation. Plus elle s’efface, plus le peuple québécois s’efface aussi.


Non mais, sérieusement, de quoi on parle exactement!? Moi j’appelle ça utiliser le langage pour rendre les gens malades. Est-ce que la phrase ne serait pas plus compréhensible si on parlait de la très fragile majorité de Canadiens Français à l’intérieur du Québec diversitaire? Au moins, on a l’impression d’être quelqu’un. Les mots vaseux flétrissent notre dignité. Quand nous ne pouvons plus nommer les choses par leur nom, notre langue se retourne contre nous parce que ceux qui la manient le mieux s’en servent pour nous mentir.


Il y a beaucoup de problèmes au Québec. Certes, ils ne revêtent pas le caractère extrême de ces terribles épreuves que sont la guerre, la famine, les épidémies… Ils sont d’un autre ordre. Mais cela ne veut pas dire qu’ils ne donnent pas à réfléchir. Ce sont (entre autres) la solitude, l’effroi de se retrouver face à une vie complètement vide, et l’angoisse qui découlent du fait que nous n’avons plus aucunes prises sur les choses parce que nous n’avons plus aucune légitimité existentielle.


Ne pas pouvoir parler en son nom, cela signifie ne pas pouvoir parler au nom de ses proches. Le drame de la majorité silencieuse qui disparait sous le tapis québécois, c’est celui de tous ces gens qui sont sous médication parce qu’ils doivent fonctionner dans un monde qui n’a plus aucun sens. Qui sont morts de peur et morts de honte parce qu’ils ne savent plus ce que c’est que d’exister au sein d’une nation qui leur ressemble. Et cela, non par la faute de ceux qu’on leur désigne comme étant leurs ennemis (le Fédéral, les Libéraux, les partisans de l’immigration de masse), car nos adversaires, en s’attaquant à nous, nous donnent au moins le sentiment d’exister. Non, ceux qui nous détruisent, ce sont ceux qui font semblant de nous aimer.


Alors, non, je ne voterai pas pour le parti qui, pour obtenir le pouvoir, s’est ingénié à exploiter notre besoin de reconnaissance nationale sans jamais rien faire en faveur de celle-ci. À tel point que tout ce qui se rapporte à notre affirmation identitaire nous donne la nausée rien qu’à y penser.


Car pour se poser en défenseur de l’identité nationale, il ne suffisait pas de bidouiller une loi hyper ambigüe censée protéger la langue d’un peuple dont la définition devient de plus en plus ambigüe. Il fallait miser sur l’enseignement de l’histoire, sur la promotion de ce que ce peuple a de plus beau, ce sur quoi se fonde sa fierté et son identité: son passé, ses racines, sa culture; son patrimoine religieux, institutionnel, agricole.


Et surtout, il ne fallait pas passer son temps à le désavouer sans en avoir l’air, en lui faisant comprendre que ces choses-là n’ont pas d’importance, et en usant de locutions embarrassées pour parler de lui sans le nommer.


C’est quoi un Québécois historique? Celui qui est apparu au moment où cette appellation a été adoptée (i.e. en ±1968), ou au contraire, celui qui a vécu avant et qui s’appelait autrement? C’est quoi un Québécois francophone? Un Vietnamien, un Haïtien, un Libanais… Si on ne possède pas le décodeur requis, on ne peut pas le savoir. Je crois que si nous nous appelions Canadiens-Français à nouveau, nous aurions l’avantage de pouvoir rester nous-mêmes, même si nous devenons minoritaires. Et même si nous sommes contraints de devenir anglophones, (c’est-à-dire de parler anglais parce que c’est la langue de l’argent ou parce que la quasi irrépressible immigration de masse nous aurait submergés), nous pourrions continuer de nous distinguer des anglais (un peu comme les Irlandais), en proclamant haut et fort que nous sommes d’ascendance, et donc de culture française.


Et puis, dernière remarque, j’aimerais qu’on arrête de faire intervenir la problématique de l’immigration dans le débat identitaire. Ce que les immigrants veulent partager quand ils viennent chez nous, ce n’est pas notre identité, ce sont nos conditions de vie. Tandis qu’on focalise le débat autour de l’opposition immigration-identité; on donne beaucoup de place au discours idéologique, et on s’évite ainsi fort commodément d’aborder le problème de l’immigration dans son aspect socio-économique. D’ailleurs, les enjeux sociaux n’intéressent pas tellement nos politiciens. Le chômage, la pauvreté, le vieillissement, les soins de santé, la désertification des régions…


Je ne dis pas qu’ils n’en parlent jamais, ou qu’ils ne proposent pas, çà et là une intervention cosmétique… Mais derrière leurs boniments, ça devient trop évident qu’ils ne peuvent, ou ne veulent, rien faire. La réalité sociale change. Les vrais défis ne sont pas ceux qu’on pense. Parmi ceux-ci, le premier est peut-être celui qui consiste à élaborer une pensée commune. Je n’en dis pas plus. J’ai atteint la limite de ce que le lecteur veut entendre. Car, de toute évidence, il y a blocage dès qu’il s’agit de rappeler que l’identité collective ne va pas de soi, qu’il faut la faire exister, et que dans cette optique, ni la parole isolée, ni l’élection d’un parti ne suffisent.



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2 commentaires

  • Catherine Doucet Répondre

    20 septembre 2018

    Il n'y a pas de hargne dans mon texte, M. Morin, seulement la constataion objective des faits. Pour ce qui est de la solitude, je dirais que c'est l'état de celui qui ne trouve personne avec qui parler parce que la culture de la société dans lequel il vit n'offre rien de signifiant à partager avec ses semblables. C'est à cela qu'aboutit l'acculturation orchestrée par tous ceux qui nous ont gouvernés depuis cinquante ans. L'identité québécoise correspond à un vide culturel et existenciel, et avec la meilleure volonté du monde, personne ne peut s'intégrer à un vide. C'est pourquoi, à mon avis, la question de la définition identitaire passe avant celle de l'intégration. Cependant, on ne peut faire face à cette problématique collective que par une réponse collective. C'est pourquoi je ne cesse d'insister sur la nécéssité du dialogue afin d'entreprendre une réflexion commune.


    Puisque vous voulez que je vous dise pour qui je vais voter, je vous répondrai ceci: Afin d'envoyer un message clair aux deux vieux partis schlérosés qui nous prennent pour acquis (puisqu'avec eux nous sommmes prisonniers de la logique binaire: ci ce n'est pas l'un c'est l'autre) et qui n'ont rien à nous offir à part une obsolescence programmée, j'engagerais tous les Canadiens Français à voter pour la CAQ.


  • Jean-Charles Morin Répondre

    18 septembre 2018

    Votre message en est un de détresse mêlé de hargne mais malheureusement il tourne à vide. Le problème est que vous ne proposez aucune piste de solution. Pour quel parti allez-vous voter en fin de compte? Aucun, d'après ce que vous laissez supposer car vous n'en dites rien.


    Vous ne voulez pas, selon vos propres dires, faire intervenir la dynamique de l'immigration dans le débat identitaire sous prétexte que les immigrants veulent partager nos conditions de vie plutôt que notre identité. Pourtant tout le problème est là: à quoi cela sert-il de conserver notre identité propre si nous nous retrouvons de plus en plus minoritaires dans notre propre pays du fait d'une immigration étrangère qui refuse d'adopter notre culture. L'immigration est là pour rester et il faut faire avec. Une nation se doit d’avoir une capacité d’assimilation d’éléments qui lui sont au départ culturellement étrangers sinon elle est destinée à périr.


    Pendant que des gens comme vous se réfugient dans leur solitude impuissante et outrée, les "non-Canadiens-français",eux, votent libéral encore et toujours. Ils vont finir par gagner sans même avoir à livrer bataille.