Conférence des présidents du PQ: sans complexe

Mme Marois veut que le PQ se réapproprie le thème de l’identité. « Cette fois, nous ne nous laisserons pas doubler », a-t-elle lancé.

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Citoyenneté québécoise - Conjoncture de crise en vue

(Photothèque Le Soleil)

Martin Pelchat - Pauline Marois a donné le ton, hier, à son premier discours devant les instances de son parti : le PQ fera « sans complexe » de l’identité un thème central de sa prochaine campagne, pour en arracher le flambeau des mains de Mario Dumont.



« Cette fois, nous ne nous laisserons pas doubler, cette fois-ci, nous allons reprendre l’initiative », a martelé Mme Marois d’entrée de jeu. C’était après avoir appelé les 250 militants réunis à Terrebonne à entreprendre la préparation de la prochaine plateforme, et avant de se lancer dans une longue défense du projet de loi péquiste sur l’identité, que les libéraux accusent de créer deux classes de citoyens et qui, aux yeux de Québec solidaire, constitue même un « dérapage » inspiré de l’ère Duplessis.
« Dites-moi en vertu de quelle rhétorique le nous canadien serait inclusif et le nous québécois exclusif? » a lancé la chef du PQ en récoltant les applaudissements nourris des présidents d’associations, députés et ex-candidats. À ceux qui reprochent à son projet de loi de pénaliser les immigrants qui n’apprennent pas le français dans un délai de trois ans, Pauline Marois réplique que c’est aussi normal, pour le Canada, d’exiger des nouveaux arrivants qu’ils connaissent une des deux langues officielles. « Je ne peux pas croire que 30 ans après la loi 101, on se questionne encore sur le bien-fondé de protéger la langue française », dit-elle.
À Philippe Couillard, que Pauline Marois décrit comme un « prétendant au trône » et selon qui la citoyenneté conditionnelle du PQ créera deux classes de citoyens, la chef répond que c’est le gouvernement Charest qui a créé une discrimination en n’affectant pas des budgets suffisants à l’intégration. Elle compte pour sa part faire une obligation à l’État de fournir aux immigrants l’accompagnement nécessaire.
La chef du PQ a rappelé que si elle a tenu à rompre avec « l’obsession référendaire », c’est parce que « la conjoncture ne nous permettra pas de réaliser immédiatement la souveraineté » et que le Parti doit « retrouver les raisons profondes pour lesquelles nous voulons faire du Québec un pays ». Le projet a trop été présenté « de manière un peu comptable, un peu technique », a-t-elle noté.
« Cela signifie-t-il que d’ici à ce que les Québécois soient disposés à se donner un État souverain, il n’y aurait rien à proposer? Les Québécois attendent beaucoup plus de nous et ils ont raison. Ils veulent nous voir nous porter à la défense de l’identité québécoise. Ils veulent nous entendre affirmer, sans complexe, l’existence d’une majorité qui aspire légitimement à former le cœur de la nation.
« Je veux dire à tous ceux qui arrivent : prenez le train de l’histoire en marche, poursuit-elle. Associez-vous au destin de cette nation en marche dont la majorité francophone forme le cœur. » Et après avoir réitéré sa conviction que la présence des immigrants est nécessaire et souhaitable, elle insiste : « Mais devons-nous, pour mieux les recevoir, nous effacer de notre propre histoire? »
Ce premier rendez-vous de Pauline Marois avec ses militants s’est poursuivi à huis clos, mais à la fin de la rencontre, même l’aile plus radicale du PQ affichait un enthousiasme qui s’est rarement manifesté sous le règne d’André Boisclair. « Sur la question identitaire et la question nationale, le chef a donné une nouvelle impulsion au Parti, se réjouissait le président du SPQ Libre, Marc Laviolette. Enfin, on n’est plus drabes sur cette question! »
Un président de circonscription de la région de Québec, Jean-François Jacob (Jean-Lesage), n’a pas caché pour sa part sa satisfaction de voir s’enclencher une démarche de consultation des militants dans la confection de la plateforme électorale. « Ça laisse vraiment la porte ouverte pour parler des gestes de souveraineté qu’on veut avoir, a-t-il dit. Comparativement à Boisclair, qui apportait des idées et disait “Vous avez à choisir là-dedans”, elle pose des questions. C’est à nous d’apporter des formulations. Je trouve ça vraiment intéressant. »
Prêts à voter contre le gouvernement
« Dès demain matin, s’il y avait un vote de confiance qui était suscité par une politique budgétaire quelconque, nous serions prêts à voter contre le gouvernement. »
Pauline Marois n’a pas hésité à rouler des mécaniques hier, au terme de la conférence nationale des présidents du PQ, à Terrebonne. « Le temps de grâce (du gouvernement Charest) est passé », a-t-elle dit, en notant que son parti avait lancé les préparatifs pour la rédaction de la nouvelle plateforme électorale.
Elle a toutefois précisé que le PQ seul ne pouvait faire tomber le gouvernement. « J’en suis aussi très consciente. »
Dans le document de consultation que le PQ a soumis hier à ses militants dans le contexte de la réflexion sur la plateforme, la présidente du Parti, Monique Richard, ne fait par ailleurs pas de cachette du « contexte financier fragile » actuel « pour chacune des instances ».
Mme Marois y fait quant à elle état du redressement auquel doit encore procéder le PQ dans la foulée de la défaite de mars dernier. « Il faut que notre parti retrouve vigueur, dynamisme, combativité, écrit-elle. Vous devez inciter ceux qui nous ont quittés à revenir et recruter de nouveaux membres. »
Selon le scénario actuel, les instances du PQ débattront de la plateforme dans chaque circonscription et chaque région pour accoucher de propositions qui seront soumises au vote lors d’un conseil général prévu pour la mi-mars 2008.
Tout le monde s’attend à ce que le premier véritable test de survie du gouvernement Charest ne survienne qu’à l’occasion de l’adoption du prochain budget, quelque part en mars 2008. En vertu des règles parlementaires, le PQ et l’ADQ pourraient toutefois s’associer pendant la présente session pour présenter une motion de défiance. Jean Charest multiplie pour sa part les appels pour une trêve en 2008, année du 400e anniversaire de Québec.
Pistes de réflexion électorales
Le PQ doit-il proposer des intrusions dans les champs de compétence fédérale, un ticket modérateur pour les services médicaux, la création d’une agence nationale de la santé, une révision de la mission des ministères? Pauline Marois a livré hier près d’une centaine de « pistes de réflexion » aux militants en vue de l’élaboration de la prochain plateforme électorale.
« C’est un document qui ouvre larges les portes et ce que je leur ai demandé, c’est de l’audace », a commenté Mme Marois, soulignant aussi que c’était la première fois que le Parti associait ses militants à une aussi vaste démarche de réflexion sur le programme électoral.
Le cahier de 17 pages intitulé Un Québec en marche ne propose que quatre pistes sous le thème « souveraineté et culture ». « Est-ce que le PQ devrait concevoir des orientations et propositions sur tous les aspects qui concernent le peuple québécois y compris ceux qui ne relèvent pas de notre compétence? y demande-t-on. Si oui, lesquelles? »
En matière de « famille », les propositions s’inspirent largement du programme de l’ADQ. « Devrait-on soutenir les parents qui restent à la maison avec les enfants? Devrait-on offrir aux parents adoptifs ou ayant recours aux méthodes de procréation assistée un soutien financier? Comment accroître la flexibilité des services de garde? »
En santé, Pauline Marois invite les militants à « développer des collaborations nouvelles et audacieuses entre les secteurs public, privé et communautaire ». Parmi une vingtaine de pistes de réflexion, le document demande s’il faut « introduire une tarification sur certains services ou implanter une contribution des usagers ».
Autres questions qui devraient alimenter bien des débats : « Quels actes supplémentaires pourraient être couverts par l’assurance privée? Doit-on revoir la liste des actes couverts par le système public? Si oui, quels actes devraient être exclus? Faut-il créer une agence nationale de la santé qui assumerait la gestion du réseau? »
La direction du Parti aborde d’autre part la gestion de l’État en insistant sur la nécessité d’« éviter que le Québec, une fois souverain, soit un des États les plus centralisés au monde ». Parmi les idées à explorer, elle demande « comment faire en sorte que les Québécois aient accès à l’évaluation des services gouvernementaux ». « Les ministères doivent-ils dispenser des services ou se consacrer essentiellement aux grandes orientations stratégiques? lit-on encore. Comment l’État doit-il passer de l’interventionnisme à un rôle d’orientation et d’appui dans le développement économique? »
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