CHUM : crise de foi

CHUM


La plus fervente partisane d'un partenariat public-privé (PPP) pour la construction du nouveau CHUM à Montréal, Monique Jérôme-Forget, venait tout juste de raccrocher sa sacoche, mercredi dernier, que des collègues ministres clamaient déjà que cette option pourrait être abandonnée. Profitons-en pour revenir aux questions de base: un nouveau CHUM est-il le bon choix et est-il indispensable?
De profondes remises en question de ce type sont de loin préférables à des désastres financiers irrécupérables.
La décision d'aller de l'avant avec le projet d'un mégacentre hospitalier universitaire à Montréal a été annoncée en 1999 par le premier ministre d'alors, Lucien Bouchard, et sa ministre de la Santé, Pauline Marois.
Le gouvernement a simultanément autorisé un projet du même type pour la communauté anglophone. Le nouveau CHUM avait été présenté comme un «projet de société ». Rien de moins. Et ce qui était bon pour Montréal allait être bon pour tout le Québec.
Les débats qui ont suivi ont porté seulement sur le choix du site et le modèle de réalisation, soit conventionnel ou en PPP. Depuis dix ans, les projections de coûts ont toutefois explosé, passant de 800 millions à 2,5 milliards, avant les habituels dépassements de coûts, l'équipement du super hôpital, etc.
UN SEUL RÉSEAU
Revenons à la case départ. Sur le plan médical et de la recherche, les mégahôpitaux sont-ils obligatoires pour une société ou la formule de petites unités d'excellence ne présente-t-elle pas plus d'avantages?
Sur le plan de la gestion, ces immenses institutions engendrent une lourdeur administrative incontrôlable. Des milliers de personnes deviennent nécessaires juste pour faire tourner l'appareil, 24 heures par jour, sept jours par semaine, 365 jours par année, avant même d'offrir des services directs à la population.
Par ailleurs, historiquement, les communautés francophones et anglophones ont eu droit à leurs institutions propres, en santé et en éducation. Le Québec de 2009 est multi-ethnique et multiculturel. Montréal plus que tout le reste du Québec. La construction de deux mégahôpitaux se justifie-t-elle ou la fonte des deux projets en un seul ne suffirait-elle pas pour répondre aux besoins cernés?
Les nouveaux mégahôpitaux draineront d'énormes budgets annuels. Quel sera l'impact sur le financement du réseau dans le reste du Québec? Il est légitime de craindre que le fonctionnement de ces institutions asséchera le reste du Québec, qui sera aussi invité à diriger de plus en plus de patients vers Montréal. Les obsédés de la médecine à deux vitesses, public-privé, devraient s'intéresser à un autre type de système à deux vitesses, celle de Montréal et celle des régions. La théorie du «ce qui est bon pour Montréal est bon pour le Québec» ne s'est jamais vérifiée. Ce sont des sophismes utilisés par ceux qui veulent protéger leurs privilèges.
UNE PAUSE
Les Québécois ne peuvent même pas compter sur l'opposition du Parti québécois pour forcer des réponses claires à toutes ces questions. Pauline Marois a elle-même donné naissance à ces éléphants blancs de la santé, en 1999, et les libéraux de Jean Charest ont repris les projets à leur compte. Rien ne se passera au cours de la prochaine année pendant que les entreprises intéressées préparent leurs propositions de PPP. Profitons-en pour réexaminer une dernière fois le choix du concept, la décision ensuite de construire deux mégahôpitaux plutôt qu'un seul et l'impact des coûts annuels de fonctionnement sur l'ensemble du réseau.
Il serait de loin préférable de faire un X sur les dizaines de millions déjà dépensés que de construire des machines à avaler des milliards insatiables.


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