« Pangea est actuellement en discussion avec des potentiels partenaires de différentes régions, dont [celle] du Bas-Saint-Laurent, pour la création de coentreprises », confirme, dans un envoi courriel, la porte-parole de l’entreprise, Marie-Christine Éthier. « Il n’y a rien de confirmé ou de conclu pour le moment », ajoute-t-elle.
Or, selon nos sources, la firme montréalaise serait sur le point de finaliser l’achat d’une terre avec un producteur « partenaire », à Saint-André de Kamouraska. Une deuxième transaction pourrait bientôt être conclue.
« On est inquiets, très inquiets, laisse tomber une productrice, qui ne souhaite pas être identifiée. On entend toutes sortes de rumeurs qui rapportent que Pangea pourrait acheter jusqu’à 4 000 acres de terres dans notre coin. »
« Le problème, précise-t-elle pour justifier sa demande de rester anonyme, c’est que la présence de Pangea divise les producteurs. Certains voient Charles Sirois et son équipe comme des sauveurs, qui sont prêts à payer le gros prix pour leurs terres. À les entendre, ils veulent redynamiser notre région. »
Mobilisation
Cette productrice croit toutefois que Pangea fera face à une « forte opposition », qui viendra de la part, principalement, des jeunes producteurs. « On ne les laissera pas acheter nos terres et nous priver du droit d’être propriétaires chez nous », tonne-t-elle.
Un vent de mobilisation a commencé à souffler sur la région ciblée par Charles Sirois. À Saint-Germain, Sainte-Hélène, Saint-Alexandre et Saint-André de Kamouraska, un groupe de producteurs tente d’organiser une rencontre pour « discuter des actions à prendre » pour contrer les projets de Pangea. On dénombre 400 producteurs et entreprises agricoles dans la municipalité régionale de comté de Kamouraska.
« On ne veut pas reproduire le modèle de Pangea au Lac-Saint-Jean », fait valoir, de son côté, un observateur qui a décidé de s’impliquer pour « guider » les producteurs locaux dans leur réflexion.
Dans cette région, Pangea a acquis 4 fermes qui comptent chacune entre 2 000 et 5 000 acres. La propriété de ces fermes est partagée entre Pangea et quatre producteurs agricoles locaux. Ces terres acquises sont exploitées par le biais de la Société opérante agricole (SOA). Celle-ci prévoit que 51 % des parts sont détenues par un agriculteur local.
Point de non-retour
De son côté, le président de la Fédération de la relève agricole, Pascal Hudon, 28 ans, lui-même producteur laitier à La Pocatière, croit que « le moment est venu de dénoncer ces acquisitions par des groupes financiers ».
Cette question sera à l’ordre du jour, vers la mi-octobre, lors du congrès régional de la Fédération de l’UPA du Saguenay–Lac-Saint-Jean, à Alma, et du congrès régional de l’UPA dans le Bas-Saint-Laurent, fin octobre.
« C’est une forme de gangrène qui brise les projets d’avenir de la relève, déplore-t-il. Mais il est encore temps de réagir. Moi, je suis prêt à soutenir les producteurs. »
Il constate qu’à Saint-André de Kamouraska, notamment, « il y a beaucoup de terres en location, et ça ouvre la porte à Pangea, qui peut faire des offres plus facilement ».
« Il faut bouger, je le répète, sans quoi on va atteindre un point de non-retour. C’est frustrant, néanmoins. Il nous semble, à la Fédération, que le gouvernement aurait dû intervenir au tout début. Par une SADAQ [Société d’aménagement et de développement agricole du Québec] ou par tout autre moyen. Nous, la SADAQ, on la voulait… »
La Terre a tenté d’obtenir les commentaires de Serge Fortin, bras droit de Charles Sirois chez Pangea, mais il n’était pas disponible, nous a-t-on dit. « C’est la saison des récoltes et c’est une période très occupée », a affirmé sa porte-parole.
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