Bombardier: le vrai responsable

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La goinfrerie de Pierre Beaudoin devient le symbole de l'échec de Bombardier





« Une nouvelle positive », dit Philippe Couillard. « La meilleure solution », dit Dominique Anglade.


« On a donné la maison pour payer les meubles », dit Jean-François Lisée. « Un jour triste », dit François Legault.


Ils parlent tous de la prise de contrôle par Airbus de la C Series de Bombardier, qui n’avait pas vendu un seul de ces appareils depuis un an.


Nos politiciens se contredisent, mais ils ont tous un peu raison. Question de perspective.


Inévitable


Je connais quelqu’un qui a une très longue feuille de route dans l’industrie de l’aviation.


Depuis des années, il me dit être persuadé que les appareils vendus par Bombardier l’ont été au rabais, au prix coûtant, en compensant les coûts de développement, que l’entreprise avale, par les subventions gouvernementales.


Il s’est avéré prophétique : Washington a imposé ses droits compensatoires de 300 % après avoir établi que Bombardier avait vendu ses appareils à Delta à un prix « dérisoire ».


Cette décision américaine fait en sorte que Bombardier ne vendra plus un appareil aux États-Unis.


Cela survient au moment, ajoute mon contact, où les Chinois et les Russes lancent leurs équivalents de la C Series.


Les Chinois, m’explique-t-il, ont les moyens de vendre leurs avions à des prix de Dollarama. Les marchés où ils pénétreront deviendront des marchés fermés pour Bombardier.


Bref, quand ça va mal...


Dans ces circonstances, le rachat par Airbus a quatre avantages : ce nouvel acheteur est mieux équipé pour affronter la concurrence, les 2000 emplois et le siège social chez nous sont protégés, et nos gouvernements cesseront de jeter notre argent dans ce trou sans fond.


De ce point de vue, M. Couillard et Mme Anglade n’ont pas tort.


Si on élargit la perspective, MM. Lisée et Legault ont aussi raison : la tentative de sauvetage par le gouvernement Couillard a échoué, et le projet d’un avion québécois dans ce créneau stratégique s’écrase au sol.


On perd aussi la propriété intellectuelle largement subventionnée par vous et moi depuis longtemps.


Faute


Qui blâmer ? L’actuel chef des opérations chez Bombardier, Alain Bellemare, n’est là que depuis 2015.


Le patriarche Laurent Beaudoin, celui qui a pris un fabricant de motoneiges de Valcourt et l’a introduit dans le transport sur rail et dans l’aviation, est en retrait depuis des années.


L’idée de la C Series est dans les cartons de Bombardier depuis le début des années 2000.


C’est en 2008 qu’on annonce qu’elle deviendra réalité. C’est en 2013 que le premier appareil voit le jour.


Qui est alors chef de la direction ? Pierre Beaudoin, auparavant chef de la division des avions d’affaires.


Quand cet homme, au milieu des pires difficultés, s’octroya une scandaleuse hausse de salaire, les actionnaires décidèrent qu’assez, c’était assez.


Dans un échec aussi colossal, il n’y a jamais un seul responsable, mais disons qu’il y en a de plus responsables que d’autres.