Tout est dit dans la préface du livre de Jean-Claude Corbeil*: «la langue française est au centre de l'identité québécoise». Lisez bien: non pas le dépassement de soi, la recherche de la vérité, de la paix, de la justice, ou de la démocratie. Non pas l'avancement de l'humanité, la charité, la non-violence, l'entre-aide, la solidarité, mais «la langue française».
Vous pouvez être un pédophile islamiste, antisémite, fasciste et communiste (si cette combinaison improbable était possible): rassurez-vous, le coeur de votre identité est préservé, vous faites partie intégrante et entière de la famille, des «gens d'ici» que l'on distingue [des gens d'ailleurs même si leurs ancêtres remontent à 1760 ou à 5000 ans avant notre ère->archives/999/khouripeuple.html]. Soyez un prix Nobel anglophone montréalais de 6e génération: peine perdue, on ne vous reconnaitra pas comme étant d'ici.
Imaginez un peu l'insignifiance à laquelle auraient aspiré les États-Unis naissants si, dans la déclaration d'indépendance, l'essence de leur identité avait été reliée non pas à de larges principes inspirant à devenir lumière sur les nations, mais à la langue anglaise! Ou encore l'insignifiance de la révolution française si l'essence identitaire française avait été réduite à la langue!
Il y a confusion identitaire au Québec. Quand bien des Québécois pensent «identité», ils pensent immédiatement à ce qui les distingue de leur voisin. C'est faire fausse route, oublier l'essentiel que de réfléchir ainsi. L'identité réfère à qui l'on est, fondamentalement. Et fondamentalement, nous ressemblons à bien des peuples qui nous voisinent: les peuples américains, français, britanniques, irlandais...
Imaginons que seule l'utilisation de la main gauche pour écrire nous distingue des Américains et des Ontariens. Dès lors, pour de nombreux souverainistes, écrire de la main gauche deviendrait l'essentiel, ou «un élément fondamental» de l'identité québécoise. Voyant une majorité d'immigrants se mettre à utiliser la «dominatrice» main droite, il y aurait sans doute une mesure législative obligeant les immigrants à écrire de la main gauche, afin de préserver l'identité, confuse avec «distinction». Ne serait-il pas merveilleux de découvrir que qui l'on est nous rapproche de nos voisins immédiats au lieu de nous en éloigner?
Si la seule chose qui distingue un Français d'un Allemand était, par hypothèse, manger de la baguette, qui oserait sérieusement dire que l'identité du Français, c'est «fondamentalement» la baguette? Personne, j'espère. Pourtant, c'est essentiellement ce que nous disent les idolâtres de la loi 101.
L'identité québécoise est gréco-latine, judéo-chrétienne, franco-américaine, démocrate et ouverte. Un Québec 100% français et islamiste, musulman, hindou, fasciste ou nazi correspond moins à l'identité québécoise qu'un Québec unilingue anglais, démocrate et de culture occidentale. La langue est le vernis d'une culture: pas son essence, ni son centre.
Ce qui nous distingue du voisin immédiat est parfois ce qu'il y a de plus accessoire. Et ce qui nous en approche, ce qu'il y a de plus essentiel.
*L'embarras des langues. Origine, conception et évolution de la politique linguistique québécoise. Québec-Amérique 2007.
***
Michael Laughrea, PhD
Professeur, Université McGill
et chercheur, Hôpital Général Juif, Montréal.
- Source
LE SOLEIL - ANALYSE
Ce n'est pas la langue française qui fait l'identité québécoise
Comment "un Québec unilingue anglais" serait-il encore "franco-américain" ? - Vigile
Michael Laughrea1 article
Michael Laughrea, PhD Professeur, Université McGill
et chercheur, Hôpital Général Juif, Montréal.
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2 commentaires
Archives de Vigile Répondre
29 octobre 2007Héritier intellectuel de Lord Durham, le Bonhomme Laughréa tente de nous sauver de nous-même en nous révélant que notre salut passe par notre assimilation. Avec seulement 2 ou 3 siècles de retard, il semble se prendre pour un missionnaire des temps passés, habité de compassion pour les pauvres sauvages que nous sommes, et à qui il désire montrer la voie vers la civilisation.
Toujours avec quelques siècles de retard, il adopte aussi les thèses évolutionnistes qui le poussent à ordonner les identités culturelles sur une pyramide de perfectionnement, comme le révèlent plusieurs de ses autres écrits.
Désirerions-nous viser l'excellence, nous abandonnerions dare-dare cette idée idiote de conserver notre langue et notre culture, cette sotte prétention de nous croire un peuple, pour embrasser l'anglais dans l'allégresse. Nous viendrions enfin à réaliser que l'adoption des identités canadienne et américaine nous permettrait de parachever notre ascension vers le haut de la pyramide évolutionniste de la culture et de la civilisation.
L'identité québécoise n'est fondée que sur la langue, nous apprend-t-il cette semaine. Point de conscience historique, point de combat identitaire, point de valeurs partagées, point de désir de vivre ensemble, point de projets de société... Que la langue. Les Québécois feraient de Satan lui-même un citoyen honorifique pourvu qu'il parle français. Quelle caricature !
Pour nous montrer le chemin, pour nous sortir de notre fiction et de notre confusion, il nous offre ailleurs l'exemple d'une autre identité qui, elle, existe naturellement, qui est elle concrète, réelle : l'identité juive. (Qui par un heureux hasard est la sienne.) Une identité dont il prêche la supériorité : ce qui se mesure, comme tout le monde le sait, en prix Nobels.
Dommage que la supériorité culturelle et intellectuelle du Bonhomme ne lui permette pas de voir toutes les contradictions qui le composent.
--Nier que la langue française puisse être un véhicule identitaire légitime et important ici ; alors qu'il prêche la supériorité d'un état qui s'est consolidés entre autres sur la re-création d'une langue disparue.
--Révéler que le « nous » québécois serait exclusif ; alors qu'il se réclame d'une identité fondée sur le folklore religieux du « peuple élu ».
--Dénigrer le combat identitaire québécois, démocratique et pacifique ; alors qu'il excuse la ségrégation raciale et confessionnelle d'Israël et cite ce pays comme modèle.
--Demeurer aveugle au bien fondé de la défense du français, langue de la majorité démocratique au Québec qui est réellement menacée par les visées assimilationnistes canadiennes, et comparer cette défense à du fascisme ; alors que le peuple dont il se réclame aura subi une des plus virulentes campagnes de salissage et d'extermination de l'histoire.
Mais point de cette compréhension chez le bon docteur qui, toujours drapé de son titre professionnel pour se donner prestige et autorité, se proclame expert « ès identités ».
D'ailleurs le bonhomme, très imbu de lui-même et de sa supériorité intellectuelle, ne dialogue jamais partout où il dissémine ses inepties. Pourquoi le ferait-il ? Les Québécois à qui il s'évertue à annoncer leur non-existence sont, après tout, un non-peuple. Ils sont des individus confus qui ne réalisent pas la fiction de leur existence collective.
En guise de dialogue et de démonstration, il préfère se répéter et se copier-coller un peu partout. Ceci car, comme il le dit lui-même sur le site de Michel Vastel : « éduquer consiste à répéter inlassablement l’essentiel afin que les égarés ou les démunis ne se laissent pas attraper et dominer par l’accessoire, un peu comme le poisson se fait attraper par le leurre tiré par le pêcheur ».
Le Bonhomme Laughrea doit bien nous prendre pour des poissons.
Archives de Vigile Répondre
29 octobre 2007Monsieur Laughrea parle-t-il en son nom, au nom de l'Hôpital Juif de Montréal ou au nom de l'Université McGill?
Plusieurs chercheurs, plus ou moins sérieux, ont fait cette bourde d'afficher ainsi leurs opinions politiques et personnelles sur une scène publique à propos de tout et de rien en mentionnant leur Institution publique pour qui ils travaillent comme pour mieux faire crédible, ont eu des rappels à l'ordre de leur unité professionnelle.
Monsieur Laughrea a toujours cette fâcheuse tendance à toujours mettre, sur tous les sites internet, dans une même phrase Québec et les termes "fasciste" et "nazisme", histoire d'accoler, de triste mémoire, les souverainistes Québécois à des Partis d'extrêmes droites.
D'ailleurs, plus d'un universitaire (je pense à 2 professeurs (es) notamment…) pensent que Monsieur Laughrea devrait se taire. Un expert dans un domaine, n'en fait pas un expert dans tous les domaines. Il met à mal cette Institution composée d’un très grand nombre de francophones et de francophiles.