Ça va jouer dur au Québec...

L'affaire Coulon


Il ne faut pas attacher trop d'importance à une élection complémentaire - même à Outremont! - ni à ses résultats. Mais elle peut parfois prendre des allures de répétition générale comme pour Pierre Trudeau en 1977 - annonciatrice de sa défaite de 1979 -, ou pour Jean Charest en juin 2002 - précurseur de sa victoire de 2003. Si l'élection complémentaire qui s'annonce augure l'avenir, cela va jouer dur au Québec!
La conférence de presse du candidat conservateur, Gilles Duguay, en dit beaucoup. Les dirigeants du parti le présentent eux-mêmes comme un candidat «vedette», il était accompagné du lieutenant politique des 'bleus' du Québec, Lawrence Cannon, et il a fait une longue déclaration qu'il avait pris la peine d'écrire à l'avance. Tout suggère la préméditation.
Dion la cible
Et que dit ce Duguay sur son adversaire libéral? Rien! Il attaque plutôt le chef, Stéphane Dion, en ramenant l'affaire des commandites, affaire que l'on croyait classée par le juge Gomery. Pour nombre d'adversaires Québécois, Stéphane Dion est le père de la Loi sur la clarté référendaire. Mais les Conservateurs seraient bien malvenus de le critiquer pour cela puisque l'idée de soumettre tout référendum québécois à la tutelle de la majorité anglaise de la Chambre des communes est d'abord venue de... Stephen Harper lui-même, alors conseiller du Parti réformiste.
On s'aperçoit que les Conservateurs vont plutôt ramener l'affaire des Commandites pour discréditer le chef libéral. Gilles Duguay pose en effet une question que bien des Québécois se posent aussi et à laquelle Stéphane Dion n'a jamais répondu de façon satisfaisante: l'actuel chef libéral, membre important du cabinet de Jean Chrétien, responsable de la lutte aux «séparatistes du Québec», ignorait-il donc tout de la formidable opération de propagande lancée au Québec par le ministre Alfonso Gagliano et son fonctionnaire, 'Chuck' Guité?
Ignorance
Stéphane Dion peut bien plaider l'ignorance - ce qui correspond bien mal à son personnage d'ailleurs! - mais c'est difficile à croire, tout comme ce l'était dans le cas de Paul Martin, alors ministre des Finances. On n'a pas de mal à admettre que ces ministres ignoraient la fraude et les détournements de fonds des commandos de l'unité canadienne, mais ils ne pouvaient pas ne pas avoir vu l'orgie de publicités achetée par le gouvernement fédéral au Québec. Ces publicités violaient la Loi québécoise sur les consultations populaires.
Le candidat conservateur a aussi vanté l'ouverture de Stephen Harper au Québec. La reconnaissance du fait que «les Québécois forment une Nation» est, pour l'ancien diplomate Gilles Duguay, «une nouvelle route, semblable à celle prise jadis par Brian Mulroney, lorsqu'il avait reconnu la légitimité des rapports directs entre le Québec et la France et accepté que le Québec puisse participer aux Sommets de la francophonie (...) Les prises de position de Stephen Harper (m'ont convaincu) de son leadership, de son courage politique et surtout de sa sincérité...»
Surprises
Si ce discours prend au Québec, attendez-vous à des surprises lors de la prochaine élection générale. Je ne dis pas que cela va marcher dès cette élection complémentaire - on est en répétition générale. Mais si la ligne prend, comme on dit, elle peut déclencher une vague du genre de celle qu'on a connue en 1984 avec Brian Mulroney justement.
Et que s'était-il passé à Outremont en 1984? Pour la première et la seule fois de son existence, la circonscription était passée aux mains des Conservateurs. Et pourquoi un obscur professeur de l'École des HEC, Jean-Pierre Hogue, avait-il battu la députée sortante, Lucien Pépin? L'establishment de la communauté juive avait recommandé de battre Mme Pépin en raison de ses prises de position féministes et jugées subversives pour les femmes de la communauté.
Cela ne vous dit rien ? Le B'naï Brith a peut-être rendu, sans le savoir, un grand service à Stephen Harper et à son candidat dans Outremont en torpillant la candidature de Jocelyn Coulon. On pourrait même dire qu'il l'a bien mérité par son appui inconditionnel à l'État d'Israël...
(...)


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