Assurance-emploi - Une position démagogique

Réforme de l'assurance-emploi

Le chef du Parti libéral du Canada, M. Michael Ignatieff, le Bloc québécois et le NPD menacent de renverser le gouvernement dès ce printemps si ce dernier refuse de réduire à 360 heures le plancher à partir du duquel un nouveau chômeur aurait droit à des prestations d'assurance-emploi. Or, les libéraux eux-mêmes ne tiendraient pas une promesse aussi peu responsable s'ils étaient élus avec une majorité de sièges.
Plusieurs ont souligné le paradoxe: le chef libéral propose de ramener de 420 à 360 le nombre d'heures minimum donnant accès à des prestations de chômage, alors que c'est un autre libéral, Jean Chrétien, qui avait réformé le programme dans les années 1990. Ainsi, il suffirait d'avoir travaillé 45 jours dans une année pour devenir admissible aux prestations, et ce, quelle que soit la région. Si les libéraux eux-mêmes ont mis fin à une règle semblable baptisée ironiquement «la 10-42» (10 semaines de travail, 42 semaines de prestations), c'est qu'elle entretenait un niveau de chômage structurel élevé dans plusieurs coins du pays. Pourtant, la règle ne s'appliquait que là où le taux de chômage était très élevé, alors que M. Ignatieff veut l'étendre partout.
Depuis la réforme, il faut avoir travaillé au moins 420 heures (12 semaines) pour être admissible à 37 semaines de prestations là où le taux de chômage est de 16 % ou plus, mais à au moins 630 heures (18 semaines) pour seulement 22 semaines de prestations là où le taux n'est que de 7 %. Avec ce changement, l'assurance-emploi a retrouvé sa fonction originale de remplacement temporaire du revenu et d'incitation à revoir ses choix personnels même dans les provinces où le travail saisonnier est le lot d'une portion importante de la main-d'oeuvre.
Depuis une dizaine d'années, de moins en moins de personnes retirent des prestations. Parce que le régime est plus restrictif, c'est vrai, mais surtout parce que le taux de chômage est descendu très bas. Or, plus le taux de chômage baisse dans une région, moins le programme est généreux. C'est d'ailleurs ce qui fait que les travailleurs de l'Ontario et de l'Alberta sont si mécontents.
Des centaines de milliers de Canadiens perdent leur emploi depuis quelques mois, mais contrairement à ce que prétend l'opposition, la majorité d'entre eux reçoivent des prestations. Réduire le nombre d'heures minimum à 360 pour tous ne ferait qu'encourager les jeunes et les intérimaires à opter pour le chômage au lieu de poursuivre des études. Le syndrome du travail saisonnier est déjà suffisamment étendu, et presque inévitable, en régions ressources, il serait dramatique de l'étendre aux grands centres urbains.
Récemment, le gouvernement Harper a augmenté de cinq le nombre de semaines de prestations pour tous les chômeurs qui ne profitent pas déjà d'un projet pilote en ce sens créé il y a quelques années. C'est une très bonne nouvelle. Tout comme l'ajout important de fonds et de semaines de prestations pour ceux et celles qui choisissent de parfaire leur formation professionnelle. Cela dit, d'autres changements tout aussi souhaitables ne figurent pas au programme du gouvernement, pas plus qu'à celui des libéraux. Ainsi, il faudrait revenir à des prestations qui remplacent au moins 60 % du salaire admissible comme le propose le Bloc, et réduire l'écart trop important du nombre d'heures nécessaire pour avoir droit aux prestations d'une région à l'autre. Quant à la norme des 360 heures, c'est la dernière chose à faire si l'objectif est de préparer la main-d'oeuvre pour l'avenir. Et ça, les libéraux le savent!
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j-rsansfacon@ledevoir.ca


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