ANGLICISATION

7800 étudiants et 100 M$ pour le Collège Dawson agrandi

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La CAQ trahit ceux qui l'ont placé au pouvoir

Tout juste entrée en fonction le 1er janvier dernier, la nouvelle directrice générale du Collège Dawson, à Montréal, confirme qu'elle travaille avec le ministère de l’Enseignement supérieur au rehaussement du devis de l'établissement dans le cadre de son projet d’agrandissement.


Le devis actuel du cégep, soit le nombre d’étudiants qu’un établissement est autorisé à accueillir par le ministère, prévoit l’inscription de 7075 étudiants à l’enseignement ordinaire à temps plein. Mais le nombre réel d’élèves a plutôt oscillé autour de 7900 ces 10 dernières années, en vertu de règles ministérielles permettant aux cégeps de déroger à leur devis dans certaines conditions.


Avec l’accord du ministère, pour l’instant – mais il n’y a rien de confirmé –, on regarde davantage à 7800. On essaie de développer un projet avec 7800 étudiants, explique la dirigeante de l’institution, Diane Gauvin, en entrevue à Radio-Canada.


En vertu des règles en place, cette hausse permettrait au cégep d’accueillir en pratique encore plus d’étudiants, mais la directrice générale de l’institution insiste que ce n’est pas ce qu'elle cherche à accomplir.


Si on accepte le fait qu’on peut aller jusqu’à 10 % [de plus que le devis], dans les mêmes espaces, on pourrait aller jusqu’à 8580 [étudiants]. Alors, ça peut être une option, mais [...] on a été tellement tassés tellement longtemps qu’il est important pour nous d’avoir les espaces adéquats. L’intention n’est toujours pas d’aller à 8500, pour être très claire.


— Diane Gauvin, directrice générale du Collège Dawson


Le ministère de l’Enseignement supérieur prévoit pourtant lui-même une augmentation du nombre d’étudiants de niveau collégial au Québec au cours de la prochaine décennie. À l’instar de la plupart des cégeps situés dans les grands centres urbains, le Collège Dawson devrait voir sa clientèle croître, jusqu’à dépasser à terme les 9000 étudiants inscrits, estime-t-on, dans un document du ministère daté de mai 2020.


La directrice générale n’en démord toutefois pas : Quand on regarde les projections du ministère pour 2029 pour le Collège Dawson, on parle de 9167 [étudiants], mais on n’a pas l’intention d’avoir 9167 étudiants en 2029 au Collège Dawson, martèle Diane Gauvin, faisant valoir que d’autres collèges pourront prendre la relève.


Manque criant d’espace


Cette réévaluation du devis du Collège s’inscrit dans le cadre du projet d’agrandissement de l’institution.


La directrice générale rappelle que le Collège souffre d’un manque criant d’espace, et ce, depuis plusie urs années : On travaille dans des espaces qui sont très, très exigus; c’est très inconfortable.


Sur la base de son devis actuel, l’institution souffre déjà d’un déficit d’espace reconnu par le ministère de 7085 mètres carrés. En rehaussant ce devis, le déficit s'accroîtra davantage, mais la directrice générale fixe déjà des limites à son projet d’agrandissement.


Il n’est pas question qu’on construise plus que ce qu’on a demandé. Donc, l’ajout d’à peu près 9000 mètres carrés, c’est le maximum.


— Diane Gauvin, directrice générale du Collège Dawson


Un projet ambitieux


Un document obtenu par Radio-Canada à la suite d’une demande d’accès à l’information permet d’en apprendre davantage sur les intentions du cégep. Le texte, intitulé Démarche pour la réalisation d’un projet visant à résoudre de manière permanente la problématique d’espace au Collège Dawson, daté du 30 novembre 2017, évoque quatre scénarios d’agrandissement.


Selon le scénario retenu, désormais évalué à plus de 100 millions de dollars, Dawson se porterait acquéreur de deux immeubles situés à proximité de son campus afin d’y établir un centre de formation en santé, assorti d’une clinique-école. La construction de gymnases et de bureaux est aussi prévue.


Le projet se veut ambitieux : Le Collège désire développer un centre de formation dans les sciences appliquées de la santé, à l’instar de ceux développés à Toronto, indique le document.


L’acquisition de nouveaux bâtiments permettra au Collège de regrouper sous un même toit plusieurs de ses programmes, y compris ses techniques en radiodiagnostic, radio-oncologie, physiothérapie, soins infirmiers et travail social.


Le centre de formation en santé du nouveau bâtiment permettra d’offrir une expérience pédagogique de haute qualité, écrit-on. Le texte fait aussi état de laboratoires spécialisés, de pratiques pédagogiques reconnues et appuyées par une technologie de pointe et d’apprentissage par la simulation.


Le Collège compte aussi bonifier son offre de programmes; dès l’automne prochain, Dawson offrira une technique en échographie médicale. Le document évoque également un nouveau programme en archives médicales, mais la directrice générale affirme que ce projet est sur les tablettes pour l’instant.


Cette bonification de l’offre de formation ne devrait toutefois pas avoir d'incidence sur le nombre total d’étudiants accueillis au Collège.


Quand on demande un nouveau programme, ce qu’on dit, c’est qu’on va réduire [le nombre d’étudiants] ailleurs.


— Diane Gauvin, directrice générale du Collège Dawson


Inquiétudes


En dépit des assurances de sa nouvelle directrice générale, les projets du Collège Dawson continuent toutefois d’inquiéter au plus haut point le Mouvement Québec français, qui presse le gouvernement Legault de retirer son appui au projet.


La situation du français dans la métropole est criante; le statut du français se trouve en régression, et c'est notamment par le concours d'institutions qui, normalement, devraient être réservées à la communauté q ébécoise d'expression anglaise, déplore le président du Mouvement, Maxime Laporte.


Frédéric Lacroix, auteur de Pourquoi la loi 101 est un échec, un essai sur la situation du français au Québec et à Montréal, estime que les cégeps francophones auront beaucoup de mal à rivaliser avec l’offre de formation du Collège Dawson.


On comprend que Dawson va devenir la référence québécoise pour la formation en techniques de santé. Ils vont offrir un environnement où il n'y aura pas de compétition possible pour les autres cégeps avec ce qu'ils vont offrir. [...] Ce qui est particulier, c'est que la formation est en anglais; elle prépare les étudiants à travailler en anglais à Montréal.


— Frédéric Lacroix, auteur de Pourquoi la loi 101 est un échec


Il se méfie aussi des engagements pris par la direction de Dawson.


Qu'est-ce qui nous assure que, dans l'avenir, ils ne vont pas dépasser à nouveau de 1000 [étudiants] et réobtenir une nouvelle normalisation, etc.? se demande-t-il.


La responsabilité de Québec


La directrice générale du Collège défend toutefois les dépassements passés en les attribuant au gouvernement.


C’est le ministère qui nous a demandé d’augmenter nos inscriptions en 2010; c’est pas nous. Nous, on avait la pression. C’était dans les médias; il y avait beaucoup, beaucoup de discussions sur le fait qu’il y avait beaucoup d’anglophones qui n’avaient pas d’espace dans les cégeps, et c’est le ministère de l’Éducation qui nous a demandé d’augmenter nos admissions, fait-elle valoir.


Mario Polèse, qui est professeur à l’Institut national de la recherche scientifique et qui a récemment lancé un appel à la retenue dans le débat linguistique, ne doute pas de la bonne foi du Collège


Les directeurs n'ont pas intérêt à se mettre à dos la majorité francophone, pour ne pas être perçus comme une menace, signale-t-il.


Initialement prévue en 2020, l’ouverture du nouveau pavillon n’aura vraisemblablement pas lieu avant 2026, selon la directrice générale de l’institution. Le Collège travaille encore à l’élaboration d’un dossier d’opportunité, mais beaucoup, beaucoup de choses ont retardé le développement du dossier, insiste Mme Gauvin.



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