Anglicisation

Welcome to Québec!

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La lente agonie du Québec français


Le Québec semble plus attrayant pour les Canadiens des autres provinces, comme le montre un modeste solde migratoire interprovincial positif. Ce qui n’est pas arrivé souvent dans le passé. Une hypothèse: et si le Québec devenait attrayant, justement, car il est de plus en plus facile d’y travailler et d’y vivre en anglais...


Rien de nouveau en Outaouais


Il y a quelques années, en 2014, le président d’Impératif français, organisme voué à la défense et à la promotion du français situé en Outaouais, s’était indigné que le maire de Gatineau, Maxime Pedneaud-Jobin, mène une opération séduction auprès des promoteurs immobiliers en anglais seulement.


Pourtant, c’était un secret de polichinelle, plusieurs acteurs de l’industrie immobilière (agents d’immeubles, promoteurs immobiliers) menant des affaires dans la ville de Gatineau courtisaient des acheteurs potentiels en Ontario en faisant miroiter des prix plus bas pour les propriétés, mais aussi en insistant sur le fait qu’il est tout à fait possible, aisé même, de vivre en anglais à Gatineau. 


Tout ça n’était rien de nouveau. J’ai grandi à Aylmer, aujourd’hui un arrondissement de Gatineau, et l’anglais y a toujours été bien présent. Le prix des maisons est plus attrayant du côté de la rive québécoise et plusieurs familles ont choisi Gatineau pour s’y établir et elles continuent d’y vivre en anglais. 


D’ailleurs, suffit de se rendre dans la belle région du nord de Gatineau, dans le parc de la Gatineau, à La Pêche, à Lac-Sainte-Marie et autres endroits de villégiature prisés, pour constater que, très souvent, tout s’y passe en anglais. Et je ne parle même pas de la région du Pontiac. 


Travailler en anglais à Montréal


André Bolduc, dans La Presse, élabore: 


Fort de ce premier résultat positif au chapitre de la migration interprovinciale en 2019, le Québec a connu son solde migratoire total (international + interprovincial + solde des résidents non permanents comme des travailleurs temporaires, des étudiants et des demandeurs d’asile) le plus élevé des 60 dernières années avec un gain de 91 383 personnes pour la seule année 2019. Le record précédent était de 71 800 personnes en 2018.


Les données ne disent pas si ce sont d’ex-Québécois qui reviennent aux sources ou si ce sont des Canadiens des autres provinces qui adoptent le Québec. M. Termote est persuadé qu’il y a un peu des deux: des francophones qui reviennent au bercail parce que la manne pétrolière s’est tarie en Alberta, mais aussi des anglos qui mettent le cap sur Montréal pour le travail.


«Il existe des secteurs particulièrement attractifs, comme les jeux vidéo, la technologie, l’intelligence artificielle, pour lesquels il n’est pas nécessaire de maîtriser le français pour bien gagner sa vie», fait-il remarquer.


Encore une fois, c’est ici l’évidence. Bien sûr que les domaines évoqués ici par le démographe Termote fonctionnent souvent en anglais; mais c’est aussi vrai en finance, et pour plusieurs secteurs de pointe, et les start-up aussi. On peut très bien travailler, la plupart du temps, en anglais à Montréal. Et y vivre en anglais aussi.


Rien de plus facile. 


Il y a quelques années, notre capitaine de ligue de bière au hockey nous avait proposé l’excellent tournoi «Old timers» de Pointe-Claire, arrondissement de l’ouest de Montréal. Quelques coéquipiers avaient été surpris que tout s’y passe en anglais. «Comme quand on est allés jouer à Kanata! [à l’ouest d’Ottawa]», avait raillé l’un d’eux.


Effectivement. 


Faudra bien cesser de se mettre la tête dans le sable et de faire comme si cette réalité n’existait pas: oui, il est facile de vivre et de travailler en anglais au Québec. Dans plusieurs régions. 


Et fort d’un solde migratoire total de plus de 91 000 personnes en 2019, le Québec devra s’assurer de corriger le tir en matière de francisation et d’intégration. Combien de gens qui choisissent le Québec maîtrisent le français? 


Dans le cas où la connaissance du français est inexistante, minimale ou insuffisante pour travailler dans la langue officielle de la province, les infrastructures actuelles sont-elles suffisantes pour que l’impératif de francisation soit accompli?


Encore faudrait-il que la francisation et l’intégration soient élevées au rang de priorités en matière d’accueil des nouveaux arrivants, toutes catégories confondues. Ce qui impliquerait que l’on accompagne les belles paroles de fonds et des infrastructures nécessaires pour que l’on ne soit plus devant de rudes constats d’échec comme celui posé par la vérificatrice générale du Québec à la fin de 2017.


Car si le Québec devient «attractif» en raison du relâchement en matière de protection de la langue française et parce qu’il est facile d’y vivre et d’y travailler en anglais, je ne vois rien de bien réjouissant là-dedans. 




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