Vendre son âme

Elle (Agnès Maltais) est la parfaite illustration de cet assujettissement de l'État à la grande entreprise qu'il dénonce continuellement.

L'affaire Desmarais


Avec le temps, on en est malheureusement arrivé à trouver normal que le gouvernement Charest perde tout sens de l'éthique dès que les intérêts du PLQ sont en cause. Quand même l'octroi des places en garderie fait l'objet de favoritisme, plus rien n'étonne.
Il est cependant navrant de voir le PQ si désireux de récupérer quelques sièges à Québec qu'il se fait le complice de la manoeuvre du maire Labeaume visant à empêcher toute contestation judiciaire de l'entente très discutable qui est intervenue entre la Ville de Québec et Quebecor sur le nouvel amphithéâtre.
La députée de Taschereau, Agnès Maltais, s'est dite fière de marrainer le projet de loi privé réclamé par M. Labeaume et elle a donné sa bénédiction à toute la démarche du maire. «La façon dont la proposition de Quebecor a été acceptée, tout le travail de démarchage qui a été fait, je le considère correct dans les circonstances», a déclaré Mme Maltais. Pauline Marois et son leader parlementaire, Stéphane Bédard, sont du même avis.
Faut-il comprendre que, pour le PQ, le respect de l'éthique est une question de circonstances? Il était impératif de protéger le droit des Beaucerons à contester le tracé de l'autoroute 73, mais pas celui des citoyens de Québec qui trouvent que le projet d'amphithéâtre est une arnaque?
Pourtant, même le ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard, a exprimé de sérieux doutes sur la légalité de l'opération et laisse entendre que l'adoption du projet de loi est loin d'être acquise. Si c'est rendu que le PQ est moins scrupuleux que les libéraux... Pas étonnant que certains députés péquistes soient mal à l'aise.
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«On ne permettra pas à une minorité de gâcher le rêve de la majorité», a lancé M. Labeaume, selon qui les motivations de ceux qui cherchent à faire dérailler le projet d'un nouvel amphithéâtre sont douteuses.
Il est vrai que les amateurs de hockey de la capitale, comme ceux de tout le Québec, souhaitent le retour des Nordiques. Même si la Ville avait finalement gain de cause, les délais occasionnés par une éventuelle contestation pourraient constituer un sérieux obstacle à la venue d'une équipe.
Quelles que soient les motivations de ses opposants, cela ne justifie cependant pas qu'on prive des citoyens d'un accès légitime aux cours de justice, comme on l'avait fait il y a quelques années pour empêcher un groupe de résidants de la MRC des Laurentides indisposés par les motoneigistes de s'adresser aux tribunaux.
D'ailleurs, même si l'avis du ministère était favorable au projet, on a souvent vu les décisions des gouvernements être déclarées illégales même si ces derniers étaient convaincus de leur bon droit. Les arguments invoqués par l'ancien directeur général de la Ville de Québec, Denis de Belleval, sont suffisamment étoffés pour justifier qu'on demande à la cour de se prononcer.
Personne ne remet en question l'intégrité personnelle du maire de Québec, ni son désir de servir au mieux les intérêts de sa ville, mais c'est un cow-boy qui tourne les coins rond, et les tribunaux sont précisément là pour empêcher les cow-boys de faire la loi.
On peut comprendre le désarroi de M. De Belleval en voyant le parti auquel il appartient toujours cautionner cette opération. Reconquérir la capitale, d'où il est presque totalement exclu depuis 2003, est une telle obsession au PQ qu'elle lui fait perdre tout sens des valeurs.
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Quand la controverse sur la commémoration de la défaite des plaines d'Abraham avait éclaté au début de 2009, Agnès Maltais avait supplié ses collègues de ne pas s'y opposer pour ne pas être accusée d'avoir privé la capitale de cette manne touristique. Quand l'incongruité de cette position pour un parti souverainiste est clairement apparue, le PQ a quand même cherché à ménager la chèvre et le chou.
D'entrée de jeu, il a accepté que le projet Labeaume-Péladeau soit entièrement financé par les contribuables. Alors qu'il reproche continuellement au gouvernement de ne pas resserrer suffisamment les dépenses, il n'a rien trouvé d'inconvenant à ce que l'État verse un milliard à un richissime homme d'affaires pour lui permettre de faire joujou.
Il est vrai que le PQ est prêt à tout pour plaire à Pierre Karl Péladeau, le seul gros capitaliste québécois auquel on prête des sympathies souverainistes, même si l'engouement de l'empire Quebecor pour François Legault en agace plusieurs. De là à vendre son âme...
Mme Maltais ne s'attendait sûrement pas à ce qu'Amir Khadir consente à l'adoption précipitée d'une loi spéciale qui empêcherait toute contestation d'une entente qu'il avait qualifiée de «vol» en mars dernier. Elle est la parfaite illustration de cet assujettissement de l'État à la grande entreprise qu'il dénonce continuellement.
Le PQ espérait peut-être que Québec solidaire serve de bouc émissaire aux nostalgiques des Nordiques, mais il pourrait bien devenir lui-même le dindon de cette triste farce, ayant perdu à la fois sa bataille et ses principes.


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